Par Pierre Boisguilbert ♦ Chassez le non-naturel, il revient au galop. C’est la grande leçon du meeting complètement raté de Valérie Pécresse au Zénith.
La fusée qui devait remettre sa campagne en orbite a explosé dès le départ. Il n’y a jamais eu de deuxième étage. On était finalement, comme de nombreux militants dans la salle, gêné pour elle. Elle a chanté faux tout au long d’une interminable partition qu’elle était, par nature, incapable d’interpréter. Le compositeur s’est trompé d’interprète. C’était du Bécassine parodiant du Déroulède. Le problème de la forme rejoint le fond. Si elle est aussi mauvaise, c’est qu’on l’oblige à déclamer des convictions qu’elle ne partage pas. Alors elle force la voix pour convaincre. Tout est à contretemps, les slogans des jeunes chauffeurs de salle qu’elle reçoit presque avec surprise, les applaudissements suscités qui ne viennent pas et donnent des blancs terribles. Les phrases n’ont pas de fin, restent en l’air et l’effet s’écrase au sol.
Pécresse n’est pas une oratrice. Ceux qui dirigent sa campagne auraient dû le savoir et lui éviter ce chemin de croix. Cela donne raison à Rachida Dati qui a qualifié Patrick Stefanini, l’homme-orchestre du concert raté, de « loser » Et pourtant elle était au premier rang et lui a même donné la bise. Elle a dû regretter amèrement d’être venue. Nadine Morano était catastrophée et Sarkozy devant sa télé a dû se féliciter de son assourdissant silence. Ciotti dont la thématique a été privilégiée a souffert le lendemain sur BFMTV pour défendre la prestation de celle qui ne pense pas comme lui et parle donc si mal de ses idées. Pécresse devrait se concentrer sur les plateaux télé et les débats, où elle a de la repartie et où elle est souvent bonne et parfois convaincante. Sa limite, c’est le meeting et le besoin de sincérité publique.
Sur le fond, cependant, les médias n’auront retenu qu’une chose, son allusion au grand remplacement. On lui a reproché immédiatement de faire du Zemmour, bien sûr, de s’aligner sur le « complotisme » d’extrême droite. Elle s’en défend et affirme avoir toujours dit la même chose sur une hypothèse qu’elle veut éviter. Elle accuse alors les journalistes d’avoir une mémoire de bigorneau. Comme quoi elle est meilleure dans l’exercice de l’entretien. Cependant, c’est pathétique, celle qui a démontré avoir le charisme d’une huître s’en prend aux mémoires de bigorneau des journalistes. Drôle de plateau de fruits de mer.
En regardant ce meeting catastrophique, une formule assassine m’est revenue. Elle était de Jean-Claude Brialy, lors d’un Festival du cinéma de Cannes. C’était à la sortie d’un film raté aux prétentions d’épopée américaine. Il avait déclaré : « C’est Autant en emporte le vent… sans le vent. »
Autant en emporte le meeting de Valérie Pécresse.
Pierre Boisguilbert
15/02/2022