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Ukraine-Russie…

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Bien entendu, dans les environs immédiats de ce blog, j’en connais qui ne vont pas manquer de me traiter d’idéologue attardé, de gauchiste indécrottable, voire de stalinien mal blanchi, en évoquant la si pratique « théorie du complot »… Pas grave ! Sans prétendre aucunement à la connaissance « de terrain » approfondie qu’ont certains donneurs de leçons, je crois à la persistance d’un « grand jeu » où s’affrontent sourdement les puissances antagonistes et où Washington mène le bal, dans l’hypocrisie la plus sordide et avec un mépris d’airain pour les peuples qui osent lui résister. Ce qui n’est ni le cas de cette Europe, pour laquelle on nous demande de voter, ni encore moins, hélas, de mon pays, couché comme jamais devant la puissance impériale. À l’heure où se tend très dangereusement la situation en Ukraine, je vous incite à lire cet article de Paul Craig Roberts, un ancien dirigeant de haut rang dans l’administration des États-Unis d’Amérique et fort peu marqué à gauche, comme l’indique son pedigree.
Bernard Langlois

Washington cherche la mise à mort de la Russie

Washington n’a pas l’intention de faire en sorte que la crise en Ukraine puisse être résolue. N’ayant pas réussi à s’emparer du pays et expulser la Russie de sa base navale de la mer Noire, Washington voit dans cette crise de nouvelles opportunités.

L’une d’elles consiste à redémarrer la guerre froide en forçant le gouvernement russe à occuper les zones russophones en Ukraine, où les manifestants s’opposent aux marionnettes du gouvernement anti-russe installé à Kiev par le coup d’État américain. Ces régions de l’Ukraine sont d’anciennes parties de la Russie elle-même. Elles étaient rattachées à l’Ukraine par les dirigeants soviétiques au 20e siècle, quand l’Ukraine et la Russie faisaient partie du même pays, l’URSS.

Les manifestants ont essentiellement mis en place des gouvernements indépendants dans les villes. La police et les unités militaires envoyées pour réprimer les manifestants, appelés « terroristes » à la mode américaine, ont, pour la plupart, fait jusqu’à présent défection et ont rejoint les manifestants.

Avec leur incompétence obamaïesque, la Maison Blanche et le Département d’État ont raté la reprise de l’Ukraine par Washington, ainsi Washington a tout mis en œuvre pour en rejeter la responsabilité sur la Russie. Selon Washington et ses « presstitués » de médias [de l’argot « presstitute »], les manifestations sont orchestrées par le gouvernement russe et n’ont aucune réelle légitimité. Si la Russie envoie ses troupes pour protéger les citoyens russes dans ses anciens territoires, cette action sera utilisée par Washington pour confirmer sa propagande d’une invasion russe (comme dans le cas de la Géorgie), et la Russie sera encore diabolisée (…).

Le gouvernement russe est dans une situation difficile. Moscou ne veut pas assumer la responsabilité financière de ces territoires, mais ne peut pas non plus rester à l’écart et laisser les Russes être mis à terre par la force. Le gouvernement russe a tenté de garder l’Ukraine intacte, en s’appuyant sur les élections à venir en Ukraine pour laisser émerger des dirigeants plus réalistes que les « vendus » installés par Washington.

Néanmoins, Washington ne veut pas d’une élection qui pourrait remplacer ses pantins et qui amènerait à une coopération avec la Russie pour résoudre la situation. Il y a de bonnes chances que Washington dise à ses laquais à Kiev de déclarer que la crise provoquée en Ukraine par la Russie empêche la tenue de cette élection. Les marionnettes de l’OTAN vendues à Washington soutiendraient bien sûr cette déclaration.

Il est presque certain que, malgré ses espoirs, le gouvernement russe soit confronté à la poursuite de la crise [diplomatique] autant qu’au gouvernement fantoche de Washington installé en Ukraine.

Le 1er mai, l’ancien ambassadeur de Washington en Russie, désormais « commandant en second  » [NdT : en fait secrétaire général adjoint] de l’OTAN mais en fait l’individu qui, étant américain, décide des frappes, a déclaré que la Russie n’était désormais plus un partenaire mais un ennemi. L’Américain, Alexander Vershbow, a déclaré aux journalistes que l’OTAN renonçait à « se rapprocher de Moscou » et qu’elle allait bientôt déployer un grand nombre de forces de combat en Europe de l’Est. Vershbow a appelé cette politique agressive de déploiement les « éléments défensifs de la région ».

En d’autres termes, nous sommes encore confrontés au mensonge selon lequel le gouvernement russe va oublier tous ses problèmes en Ukraine et lancer des attaques sur la Pologne, les pays Baltes, la Roumanie la Moldavie, ainsi que sur les régions d’Asie centrale, de la Géorgie, de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan. Le pipeauteur Vershbow veut moderniser les forces armées de ces états fantoches à la botte des américains et « saisir l’occasion de prendre en compte la réalité du terrain en acceptant l’adhésion des pays candidats à l’OTAN ».

Ce que Vershbow a dit au gouvernement russe est qu’il doit compter sur la bonne volonté et le caractère raisonnable de l’Ouest pendant que nous mettons en place des forces militaires suffisantes pour empêcher la Russie de venir en aide à ses citoyens opprimés en Ukraine. Notre diabolisation de la Russie fonctionne bien. Elle vous a fait hésiter à agir lors de la courte période où vous pouviez nous devancer et saisir vos anciens territoires. En attendant vous nous donnez le temps de masser des forces à vos frontières, de la mer Baltique à l’Asie centrale. Cela va vous distraire et vous éloigner de l’Ukraine. L’oppression que nous allons infliger aux Russes d’Ukraine va vous discréditer, et les ONG que nous finançons en Fédération de Russie feront appel aux sentiments nationalistes pour renverser votre gouvernement que ne sera ainsi pas venu à l’aide des Russes et n’aura pas protégé les intérêts stratégiques de la Russie.

Washington se lèche les babines, y voyant une occasion de convertir la Russie en État fantoche.

Poutine va-t-il rester assis tranquillement avec ses espoirs tout en attendant la bonne volonté de l’Occident afin de trouver une solution alors que Washington tente d’organiser sa chute ?

Le moment de vérité approche; la Russie devra soit agir pour mettre fin à la crise, soit accepter l’enlisement actuel et les distractions dans son arrière-cour. Kiev a lancé des frappes aériennes sur les protestataires à Slavyansk. Le 2 mai le porte-parole du gouvernement russe Dmitri Peskov a déclaré que l’utilisation de la violence par Kiev avait détruit l’espoir de désescalade suite à l’accord de Genève. Pourtant, le porte-parole du gouvernement russe a de nouveau exprimé l’espoir du gouvernement russe que les gouvernements européens et Washington allaient faire en sorte d’interrompre les frappes militaires et mettre la pression du gouvernement de Kiev pour satisfaire les manifestants de manière à maintenir l’unité Ukrainienne et rétablir des relations amicales avec la Russie.

C’est un faux espoir. Il suppose que la doctrine Wolfowitz [*] n’est que des mots, mais ce n’est pas le cas. La doctrine Wolfowitz est la base de la politique américaine envers la Russie (et la Chine). La doctrine stipule que tout pouvoir assez fort pour rester indépendant de l’influence de Washington doit être considéré comme « hostile » :

« Notre premier objectif est d’empêcher la réémergence d’un nouveau rival, que ce soit sur le territoire de l’ancienne Union soviétique ou ailleurs, qui constituerai une menace sur l’ordre [des relations internationales] équivalente à celle posée auparavant par l’Union soviétique. C’est une considération [dominante] sous-jacente à la nouvelle stratégie de défense régionale et qui demande que nous nous efforcions d’empêcher toute puissance hostile de dominer une région dont les ressources pourraient, sous contrôle consolidé, être suffisantes pour produire l’énergie mondiale. »

La doctrine Wolfowitz fournit la justification de la domination de Washington sur toutes les régions. C’est cohérent avec l’idéologie néoconservatrice des États-Unis comme étant le pays « indispensable » et « exceptionnel » donnant droit à l’hégémonie mondiale.

La Russie et la Chine sont sur le chemin de l’hégémonie mondiale des États-Unis. Sauf si la doctrine Wolfowitz est abandonnée, la guerre nucléaire en sera la conséquence probable.

 Paul Craig Roberts
Titre original :
Washington intends russia’s demise
Source en français :
politis.fr
02/05/2014

Paul Craig Roberts, économiste et journaliste (notamment au Wall Street journal), a été sous-secrétaire au Trésor dans l’administration Reagan (1981-1982), et est un des pères fondateurs des « Reaganomics ».

Note

[*] La doctrine Wolfowitz est la description d’une stratégie globale américaine qui devait rester confidentielle mais qui a été dévoilée dans le New York Times le 8 Mars 1992. Elle repose sur les 6 piliers suivants :

  1. maintien des USA comme seule superpuissance dans le monde (et visant à saboter toute émergence d’une superpuissance concurrente, Russie ou autre)
  2. établissement du leadership des USA dans l’ordre des relations internationales
  3. défense des interventions unilatérales ; minimiser le rôle des coalitions internationales
  4. institution des interventions [entre autres militaires] préventives
  5. prise en compte du danger causé par un potentiel renouveau de la Russie [du point de vue militaire]
  6. défense des intérêts occidentaux pour la mainmise sur les ressources pétrolières du Moyen-Orient et de l’Asie du sud-ouest [péninsule arabique]

Note de la rédaction de Polémia

Paul Craig Roberts est bien connu de nos lecteurs, nous avons déjà reproduit en français quelques uns de ses articles :

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