Par Pierre Boisguilbert ♦ Cette polémique sur la livraison de blindés à l’Ukraine tombe bien. Elle a permis à nos médias d’occulter ce qui aurait dû être une bombe – la preuve de la corruption des bons dirigeants ukrainiens actuels.
L’aide massive internationale en Ukraine a été largement détournée par des profiteurs de guerre comme dans les pires dictatures africaines ou républiques bananières. Ainsi le régime des combattants et résistants au totalitarisme de Poutine pour la défense des valeurs de l’Occident est corrompu. On le savait. On n’osait plus le dire pour ne pas abîmer l’image de la sainte Ukraine de Zelensky. On en a la preuve. Onze mois jour pour jour après le début de la guerre en Ukraine, plusieurs hauts responsables ukrainiens ont démissionné après qu’un scandale de corruption a été dévoilé par la presse. Ces hauts fonctionnaires sont accusés d’avoir, en fonction de leurs places dans les institutions, touché des pots-de-vin, financiers ou matériels, lors de la signature de différents contrats en lien avec l’invasion. Une dizaine de personnalités publiques ont été limogées. Cinq gouverneurs régionaux et quatre vice-ministres ont été démis de leurs fonctions. Le vice-ministre de la Défense Viatcheslav Chapovalov, chargé de l’appui logistique des forces armées, le chef adjoint de l’administration présidentielle Kyrylo Tymoshenko, le procureur général adjoint Oleksiï Simonenko, les gouverneurs des régions de Dnipropetrovsk, de Zaporojie, de Soumy, de Kherson, de la capitale Kiev, un vice-ministre de la Politique sociale et deux vice-ministres du Développement territorial ont été limogés.
Le vice-ministre des Infrastructures, Vassyl Lozynsky, est accusé d’avoir empoché 400 000 dollars (367 000 euros) de pots-de-vin sur des contrats d’achat de générateurs. Le vice-ministre de la Défense a, quant à lui, démissionné après une enquête de la presse ukrainienne accusant son ministère d’avoir payé des produits alimentaires, destinés à l’armée, « deux ou trois fois plus cher » que le prix du marché. L’escroquerie atteindrait 303 millions d’euros. De son côté, Kyrylo Tymoshenko n’a pas donné de raison à son départ. Il s’était attiré des critiques après avoir utilisé à des fins personnelles un SUV offert par les États-Unis pour évacuer des victimes dans les zones de combat. Il a ensuite publiquement renoncé à cette voiture et l’a envoyée au front pour des besoins humanitaires. Ce n’est pas une véritable surprise. Le pays était classé à la 122e place sur 180 sur l’indice de perception de la corruption de l’ONG Transparency International en 2021. L’UE a fait des mesures anticorruption l’une des réformes clés devant être mises en œuvre par l’Ukraine si celle-ci souhaite accéder au statut de candidat à l’adhésion au bloc européen. Zelensky fait donc le ménage pour rassurer ses donateurs.
Cela tombe très mal avec la livraison de chars lourds, d’où l’embarras de nos médias. Berlin a autorisé, mercredi, ses alliés à transférer des chars Leopard à l’Ukraine, et annoncé une première livraison de 14 blindés. La décision d’Olaf Scholz a été prise après plusieurs semaines d’hésitation au sein du gouvernement allemand et de négociations entre Berlin et ses alliés. Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a déclaré être « sincèrement reconnaissant » envers le chancelier allemand, Olaf Scholz, pour son autorisation d’envoyer des chars Leopard à Kiev. L’Allemagne fait le « nécessaire » pour soutenir l’Ukraine en autorisant l’envoi de chars Leopard mais veut empêcher une « escalade » du conflit qui déboucherait sur « une guerre entre la Russie et l’OTAN », a déclaré le chancelier allemand, Olaf Scholz, devant le Bundestag.
Pour les Allemands, au regard du poids de l’histoire, cet engagement est très délicat. L’ambassadeur russe en Allemagne a dénoncé la décision « extrêmement dangereuse » de Berlin de livrer des chars Leopard à l’Ukraine. Cette mesure va « amener le conflit vers un nouveau niveau de confrontation », a commenté Sergueï Netchaïev. « Cela nous persuade une fois encore que l’Allemagne, à l’instar de ses alliés les plus proches, ne veut pas d’une solution diplomatique à la crise ukrainienne, et qu’elle veut une escalade permanente », a-t-il ajouté. M. Netchaïev a aussi accusé Berlin, à travers ces livraisons de chars, de « revenir sur sa responsabilité historique » pour « les crimes du nazisme » durant la Seconde Guerre mondiale. « Des chars portant des croix allemandes vont une fois encore être envoyés sur le front de l’Est ce qui va inévitablement conduire à la mort de soldats russes mais aussi de civils », a-t-il accusé.
On voit comment la propagande de Poutine sur les nazis ukrainiens va se servir de ce revirement allemand. Un revirement salué par les journalistes du système, ceux-là mêmes qui, il n’y a pas si longtemps, ne voulaient pas entendre parler d’armée allemande. Ceux-là qui, aujourd’hui, par idéologie, acceptent que l’Allemagne se hisse au premier rang des armées européennes. Hier, les Allemands ne devaient plus avoir d’armée, maintenant leurs blindés doivent faire la guerre en Ukraine comme au temps du Reich hitlérien, toujours contre les Russes. Les contradictions du camp du bien lui seront un jour fatales.
Pierre Boisguilbert
27/01/2023