Le traitement médiatique français du terrible séisme marocain et le positionnement humanitaro-diplomatique de Paris ont souligné le prisme bobo et le recul de l’influence de notre pays.
Tout a été au départ concentré sur Marrakech, la ville rose chouchou à juste titre du tourisme international. C’est tout juste si le récit médiatique n’était pas calqué sur un remake des derniers jours de Pompéi.
Et puis il a fallu se rendre à l’évidence, les principales victimes et les plus importants dégâts avaient touché les villages berbères du Haut Atlas. C’est une région magnifique de roches ocre alternant avec des oasis de verdure comme dans les Tarzan de notre enfance. Ce sont des villages archaïques qui attirent les touristes pour la beauté visuelle de logements cependant misérables mais fascinants. Tout cela est fragile comme un pan de montagne instable, emporté régulièrement par les crues et cette fois rasé par le séisme du siècle. Des villages relativement peu peuplés, mais au Maroc ce terme est relatif.
À Marrakech, quelques victimes et des dégâts limités aux quartiers anciens de la médina et du mellah, l’ancien quartier juif. Les équipes de télé se sont installées d’ailleurs le plus souvent dans des rooftops fréquentés par les touristes et une clientèle aisée, les prix y sont français, à la frontière du Marrakech des pauvres. Dans cette ville, le bling-bling et l’authentique se côtoient. Il y avait une sorte de déception médiatique des dégâts limités à Marrakech qui s’est vite fait jour, avec toutefois la reconnaissance de la solidarité des Marocains entre eux et même des touristes.
Complexe d’infériorité, revendication sur le Sahara… vers une guerre Algérie-Maroc ?
Et puis est vite venu le temps de la critique. Pourquoi donc le Maroc ne répondait-il pas immédiatement aux propositions françaises d’aide humanitaire ?
La raison en est simple, Paris n’est plus le partenaire privilégié du Maroc. Cela est dû au fait que le président Macron a visiblement préféré les rapports avec l’Algérie. Cela est dû surtout au fait que la diplomatie française n’a pas pris en compte le fait saharien. Le roi a expliqué clairement que les relations du Maroc avec les autres pays dépendraient dorénavant de l’attitude des gouvernements de ces pays sur la marocanité du Sahara occidental, ancien Sahara espagnol.
Paris n’est plus privilégié et est même, à dire vrai, sur une liste grise. On préfère l’Espagne et la Grande-Bretagne qui sont en phase avec le discours national marocain, et les pays arabes amis comme le Qatar ou les Émirats. C’est un camouflet pour Paris d’un pays qui affirme sa souveraineté et qui n’a plus besoin de la France, ayant une reconnaissance internationale diversifiée.
Reste une interrogation à prendre en compte : l’absence du roi. Au Maroc la santé du roi est un sujet tabou mais omniprésent. Son silence a alimenté rumeurs et inquiétudes même si l’on sait que le souverain ne réagit jamais à chaud ; il aime cependant être en contact avec le peuple, quitte à dénoncer parfois les insuffisances de son gouvernement ou plus largement de son administration. Si le roi était souffrant ou en France pour d’autres raisons, certains pensaient qu’il allait dépêcher sur place le prince héritier qui porte beau et est très apprécié. Il n’en a rien été, c’est une erreur qui sera oubliée dès l’arrivée du « commandeur des croyants » à Marrakech, comme on l’annonce. Il y a une dimension oubliée par nos médias, toujours très « cellule psychologique » : le poids de la religion dans le Maroc traditionnel et bien au-delà. Cela fait partie de la solidarité de la résilience, avec aussi un certain fatalisme.
C’est pourquoi les victimes sont enterrées le plus vite possible, comme le veut le Coran, et que les boutiques rouvrent comme si de rien n’était.
C’est passé, mektoub.
Pierre Boisguilbert
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