Avec l’aisance et le manque de scrupules propres à tous les appareils de propagande, les médias sont passés sans transition, dans la présentation du drame de Montauban et de Toulouse, d’une approche holiste du crime (« c’est le climat de haine et de xénophobie entretenu par l’extrême droite qui a provoqué ce crime raciste ») à une approche purement individualiste : « Mohamed Merah est un assassin isolé qui ne renvoie à rien d’autre que lui ». Même si on découvre maintenant qu’un obscur groupe dénommé « les soldats du califat » aurait revendiqué le crime de Toulouse, les médias s’en tiennent à cette ligne : Mohamed Merah est un « petit voyou » qui a « dérivé » (lefigaro.fr du 23 mars 2012). Circulez, il n’y a rien à voir !
Mais le drame de Montauban et de Toulouse révèle pourtant aussi, dans sa sanglante brutalité, une réalité que le Système s’est efforcé par tous les moyens de nous cacher : il révèle le visage d’une France dont on ne parle jamais dans les médias. Car c’est le visage inquiétant d’une France défigurée par le communautarisme. Armée de citoyens ou armée de minorités ?
Le meurtre des parachutistes met d’abord en pleine lumière un fait jusque-là occulté, sauf dans les milieux informés, à savoir qu’une partie importante de nos forces armées, y compris les unités d’élite, est désormais constituée de Français issus de l’immigration et, pour beaucoup d’entre eux, de religion musulmane.
C’est, certes, le propre des armées de métier de recruter parmi les « minorités » comme l’illustrent les armées britannique et américaine : les minorités voient en effet dans la carrière militaire un levier de promotion sociale.
Mais alors que les forces armées des pays occidentaux sont de plus en plus engagées dans des conflits ou des missions d’interposition ayant lieu dans des pays musulmans, cette situation n’est pas neutre. Que se passerait-il si la France devait, par exemple, entrer en guerre avec un pays du Maghreb ? Quel serait le comportement de ces soldats ?
Ce n’est pas une question absurde car le geste de Mohamed Merah se place justement dans cette perspective : l’assassinat de soldats français d’origine maghrébine visait, semble-t-il, à les châtier par procuration pour l’intervention française en Afghanistan. Cela veut dire que dans l’esprit du tueur leur origine ou leur religion devait l’emporter sur leur loyauté.
La question de la double allégeance
Ce raisonnement, nous dit-on, est celui d’un fou criminel isolé.
Peut-être, mais il pose quand même une question pour l’avenir, d’autant que cet assassinat a aussi valeur d’avertissement. Comme le fait remarquer le professeur Jean-Pierre Filiu, la stratégie terroriste vise aussi à « prendre en otages les musulmanes et les musulmans des pays concernés (afin) de les retrancher de la communauté nationale » (Le Monde du 22 mars 2012).
Le geste criminel de Mohamed Merah pose implicitement la question de la double allégeance.
Cette question a toujours été cruciale dans les sociétés européennes et elle a souvent malheureusement conduit à la guerre civile ou aux guerres de religion précisément. Les protestants anglo-saxons accusaient les catholiques d’être sujets d’un souverain étranger : le pape. Inversement les catholiques reprochaient aux protestants d’entretenir des relations privilégiées avec les ennemis du royaume, mais de religion réformée.
Merah montre par son crime que, si d’aucuns croient possible un islam de France, d’autres estiment que la loyauté musulmane doit l’emporter sur toutes les autres. Et malheureusement ces derniers semblent les plus violents.
Le gentil Merah
Bien entendu, fidèles à leur habitude quand il s’agit de traiter d’un criminel d’origine maghrébine, les médias nous inondent de témoignages décrivant Mohammed Merah comme « calme et gentil » (lefigaro.fr du 22 mars 2012). Mais ces témoignages, même s’ils sont sélectionnés à des fins de désinformation, lèvent aussi malgré eux le voile sur une autre réalité occultée : la progression du préjugé communautaire dans notre pays.
Car qui dit que Merah était « calme et gentil » ? Ses proches, c’est-à-dire des gens qui ont la même origine que lui.
Comme on apprend en même temps que l’intéressé était non seulement surveillé pour ses activités de djihad, mais également « connu des services de police » (15 condamnations, dont un certain nombre pour des actes commis avec violence), les témoignages sur sa « gentillesse » nous enferment dans un terrible dilemme.
Un terrible dilemme
Car :
- soit les proches de Merah trouvent sympathique un homme qui se rend coupable de violences répétées et qui tue des militaires français et des enfants juifs, ce qui montre à tout le moins qu’ils n’ont pas les mêmes valeurs que celles des Français de souche ; ce type de témoignage correspond en réalité au comportement souvent observé dans les « banlieues sensibles » où l’interpellation des délinquants soulève des réactions, souvent violentes, de solidarité de la part de la population ;
- soit ils signifient que l’on peut être « calme et gentil » et brusquement basculer dans la fureur homicide. Ce phénomène a d’ailleurs été relevé dans le cas d’autres djihadistes étrangers qui étaient bien « intégrés » selon les critères dominants de l’oligarchie occidentale. Mais si c’est le cas, cela conduit à s’interroger sur la réalité d’une « intégration » aussi superficielle.
Dans les deux branches de l’alternative on peut douter de la solidité de ladite intégration.
L’importation des conflits
Merah a tué des enfants juifs pour venger, semble-t-il, les enfants palestiniens tués par les soldats israéliens. Les quatre victimes de Toulouse ont été inhumées en Israël car elles avaient la double nationalité. Les soldats ont été tués parce que la France était présente en Afghanistan.
En d’autres termes, Merah montre que la France se trouve désormais impliquée sur son sol pour des conflits qui ne la concernent pas.
La sombre prévision du général De Gaulle à propos de l’OTAN trouve là une dramatique confirmation : l’aventurisme et l’atlantisme nous font courir le risque d’une implication dans des conflits qui ne seront pas les nôtres. L’immigration massive, que De Gaulle n’avait pas prévue, nous conduit aussi sûrement à importer des haines qui nous sont étrangères.
L’effondrement de l’appareil judicaire et policier
Le drame de Montauban et de Toulouse lève enfin le voile sur le dramatique effondrement de la Justice et de la Force publique dans notre pays.
Car Merah était connu des services de police et suivi par ceux du renseignement. Mais cela ne l’a nullement empêché d’accomplir ses crimes, comme tous les criminels récidivistes qui courent les rues et dont les performances peuplent la rubrique Faits divers de nos journaux. On nous dit que ce n’était pas possible de le localiser et de l’empêcher de nuire. Mais c’est ce qu’on nous dit dans toutes les affaires criminelles !
Comme, par exemple, dans le cas de ce violeur parisien multirécidiviste de nationalité sénégalaise qui avait « affolé toutes les polices au moment des fêtes de fin d’année » (sic) (lefigaro.fr du 29 février 2012) et que personne ne trouvait. La police belge, elle, l’a trouvé et arrêté sans problème (Le Parisien du 1er mars 2012). Ou comme celui du suspect angolais du meurtre d’une adolescente nantaise, après d’autres agressions : celui-ci était, nous dit-on, placé « sous surveillance électronique », mais cela n’a rien empêché du tout (Le Monde du 21 mars 2012).
Décidément les limiers français ne sont plus à la hauteur et le commissaire Maigret doit se retourner dans sa tombe !
Et les Français de souche qui sont harcelés par les forces de police ou de gendarmerie, parce qu’ils téléphonent en roulant ou parce qu’ils roulent trop vite, apprécieront sans doute mieux ainsi l’efficacité de nos polices dans la prévention du crime.
Mais qui a peur ?
Certes, le tueur est mort – après 32 heures de siège, ce qui est quand même beaucoup – et Nicolas Sarkozy peut continuer de jouer au superflic en serrant les maxillaires. « Mission accomplie », titre la Pravda-Figaro du 23 mars, sans doute pour copier le « Justice est faite » d’Obama après la mort de Ben Laden. On a les héros que l’on peut.
Mais tout le monde a vu les images de cette nuée d’hommes cagoulés menant le siège du domicile du criminel. Tout le monde a vu ces policiers et ces gendarmes équipés comme des chevaliers du Moyen Age, armés jusqu’aux dents, et ce déploiement sans précédent.
Mais combien étaient-ils pour un seul homme ? Que craignaient-ils donc pour être si nombreux ?
D’avoir affaire à une horde de Talibans ? Mais on ne cesse de nous dire que Merah était tout seul. Si telle est l’explication, les forces de l’ordre étaient pour le moins mal informées. A moins qu’elles aient eu peur que le « quartier populaire » dans lequel vivait l’assassin ne se soulève en sa faveur ? Mais on ne cesse de nous dire que les personnes d’origine immigrée sont gentilles, travailleuses et pacifiques…
Évidemment tout cet étalage de forces de police sert à merveille la scénarisation médiatique et électorale d’un Nicolas Sarkozy émule de Rambo, mais ce n’est sans doute pas la seule raison. Car enfin pourquoi nos superflics sont-ils cagoulés et habillés couleur de muraille ? Pourquoi nos militaires, quand ils empruntent les transports en commun, cachent-ils leur uniforme ? Nos ancêtres, eux, se battaient à visage découvert.
De quel côté était vraiment la peur, hier, dans le quartier des Izards ?
Michel Geoffroy
23/03/2012