Par Michel Geoffroy, auteur de Immigration de masse. L’assimilation impossible, La Super-classe mondiale contre les peuples et La Nouvelle guerre des mondes ♦ L’essai que Julien Langella, cofondateur de Génération identitaire et vice-président d’Academia Christiana, vient de publier aux éditions de La Nouvelle Librairie Refaire un peuple[1] ne laisse pas indifférent. Le sous-titre précise d’emblée le projet de l’auteur : Pour un populisme radical.
Pour Julien Langella en effet, « s’il veut répondre à l’immense espoir qu’il a suscité partout, le populisme doit être vraiment radical : il doit tenter de résoudre nos problèmes à la racine et non se contenter d’effets de manche démagogiques[2] ».
Analyses radicales, préconisations radicales… Julien Langella ne déçoit pas le lecteur en effet, tout au long des 360 pages de son essai…
Pourquoi refaire un peuple ?
Refaire un peuple : l’expression est empruntée à Frédéric Mistral, le fondateur, avec d’autres poètes, du Félibrige en vue du renouveau de la langue et de la culture du pays d’oc. Une culture chère à Julien Langella. Un exemple aussi.
Pourquoi refaire le peuple français ? Parce qu’il a perdu son identité à cause de l’idéologie des droits de l’homme abstrait et à cause de l’abrutissement consumériste, lesquels marchent ensemble depuis la révolution des Lumières.
Julien Langella va droit au but. Il pointe la responsabilité de l’idéologie libérale et du capitalisme dans la destruction de notre identité car « le libéralisme, qui est un matérialisme n’est pas immoral : il est amoral[3] », écrit-il : c’est « la caution idéologique des capricieux narcissiques[4] ».
En se désintéressant de la morale – de la distinction entre le bien et le mal – et donc du bien commun et de la vie bonne, le libéralisme ouvre la voie à la banalisation de l’égoïsme, à la recherche aveugle du profit et finalement à la marchandisation, sans limite, de l’homme lui-même.
La trinité diabolique du communisme de marché
Pour Julien Langella nous subissons « la trinité diabolique du communisme de marché[5] » : la publicité, le crédit et l’obsolescence programmée. À laquelle il faut ajouter la course au gigantisme qui détruit tout : la liberté de l’homme comme la préservation de la nature. Pour lui, « la société de consommation n’est pas une déviance de la croissance économique : c’est son unique raison d’être[6] ».
Et s’il faut « s’opposer au collectivisme et à l’accaparement des richesses par l’État… que font-ils ces financiers, fonds de pension et grands groupes industriels à part accaparer toutes les richesses et ressources du monde ? Il est là, le collectivisme de notre époque. C’est lui que nous devons dénoncer[7] ». Comme il faut dénoncer la lubie libérale de l’« indépendance » des banques centrales, qui ne vise qu’à affranchir le pouvoir monétaire et financier des nations et de la prise en compte du bien commun.
Et si nous souffrons en même temps de l’étatisme et de la déconstruction libérale, cela provient du fait qu’on a réduit l’État au rôle de pompier chargé d’éteindre les incendies sociaux que le marché dérégulé provoque partout en Occident.
Un programme radical
L’auteur ne se borne pas à un réquisitoire contre les idoles de la modernité libérale et capitaliste, fût-il mené à grands coups de marteau, jubilatoires.
Il présente aussi un programme de reconstruction tout ou long de son essai, qu’il résume en 27 propositions finales pour une révolution populiste.
Un « projet communautarien » dont les maîtres mots sont proximité, relocalisation, subsidiarité, « self gouvernement », démocratie locale, ordre, autorité, bien commun, identité, solidarité, agroécologie, autosuffisance, réforme des institutions politiques notamment.
Même si, finalement, Julien Langella rappelle qu’« il n’y a pas grand-chose à inventer : tout a déjà été dit sur les principes du bien commun, de la nature humaine, de la liberté et de la vie en communauté. Le populiste, le vrai, doit réactualiser ces vérités pour les adapter aux enjeux actuels[8] ».
Radicalisons-nous !
Julien Langella n’ignore pas qu’un tel projet – « un combat à mort entre la course au profit et la souveraineté de l’État[9] » – suscitera des doutes, des inquiétudes ou des oppositions. Comme il l’écrit dans l’une des nombreuses formules imagées dont il a le secret, « les faux rois de ce monde vétuste et sans joie ne se laisseront pas détrôner sans combattre[10] » !
« Que faire ? » – l’interrogation éternelle du politique – est d’ailleurs le titre du dernier chapitre de l’essai.
Julien Langella y répond en deux mots : « Radicalisons-nous » ! Le populiste doit se radicaliser, c’est-à-dire se faire « lanceur d’alerte, éveilleur de peuple, combattant insatiable[11] », mener « un combat intégral ». Car pour réaliser le programme qu’il propose « il faut tout donner… À commencer par soi-même : son corps, son esprit et sa joie[12] ».
Refaire un peuple commence donc ici et maintenant !
Les bobos ne vont pas aimer
Le lecteur pourra parfois se sentir décontenancé par le style de l’essai, direct, imagé, rapide parfois, ainsi que par les références qu’invoque Julien Langella, à rebours de toute correction politique : en effet, citer Maurras, Salazar ou José Antonio Primo de Rivera n’est pas courant de nos jours ! Julien Langella a aussi le sens des formules chocs : comme lorsqu’il écrit, par exemple « qu’il n’y a de choix qu’entre l’autocratie et la ploutocratie[13] ». On le sent pressé : pressé de conclure, pressé d’agir, parce qu’il y a urgence à refaire notre peuple, avant qu’il ne soit remplacé et détruit.
Mais l’essai se veut aussi pédagogique avec un index et une liste de lectures recommandées ; et parce qu’il se livre à une mise en perspective originale du déclin français et européen, en synthétisant des thématiques habituellement dispersées.
Les bobos, le MEDEF et les GAFAM n’aimeront pas le livre de Julien Langella : ni ses références, ni ses analyses, ni son réquisitoire, ni ses conclusions.
C’est aussi une autre bonne raison de le lire cet été !
Michel Geoffroy
18/06/2021
[1] Langella (Julien), Refaire un peuple, éditions de La Nouvelle Librairie, 2021, 22,50 €.
[2] Ibid., p. 169.
[3] Ibid., p. 59.
[4] Ibid., p. 340.
[5] Ibid., p. 151.
[6] Ibid., p. 234.
[7] Ibid., p. 99.
[8] Ibid., p. 339.
[9] Ibid., p. 242.
[10] Ibid., p. 225.
[11] Ibid., p. 337.
[12] Ibid., p. 351.
[13] Ibid., p. 260.
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