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Racket américain et démission d’État

Racket américain et démission d’État

par | 27 février 2015 | Économie

Racket américain et démission d’État

Le dessous des cartes du rachat d’Alstom par General Electric, par Leslie Varenne et Éric Denécé. Rapport du Centre français de recherche sur le renseignement.

Nos talentueux économistes du gouvernement viennent de délester notre pays d’un des plus beaux fleurons de l’industrie française. Le lecteur aura compris de lui-même : il s’agit tout bonnement de la vente, presque à la sauvette dans un complet silence médiatique, de la société française Alstom aux Américains par nos ministres Sapin et Montebourg soutenus par le président de la République et le premier ministre, ainsi que par la nuée d’inspecteurs des finances virevoltant dans les ministères concernés.
Les raisons officielles ? Faire face aux prétendus défis de la mondialisation, alors qu’en réalité il est plus vraisemblable que le gouvernement et la présidence de Alstom ont faibli devant le chantage et la pression judiciaire exercés par la justice américaine à l’occasion notamment d’une sordide affaire de corruption en Indonésie.
Polémia s’est procuré un rapport émis par le Centre français de recherche sur le renseignement (Cf2R) dont sont reproduits ci-après un résumé et la conclusion. Le lecteur pourra en prendre connaissance en totalité en cliquant ICI. Nous lui conseillons vivement de lire ce rapport.
Polémia

Racket américain et démission d’État. Le dessous des cartes du rachat d’alstom par General Electric. Résumé

Le 19 décembre 2014, l’assemblée générale des actionnaires d’Alstom a autorisé la vente des activités de sa branche Énergie à General Electric (GE).

Une nouvelle fois la France a capitulé devant son allié américain en lui cédant dans des conditions litigieuses et rocambolesques les activités rentables et pour partie stratégiques d’un fleuron de son industrie.

Quelles sont les réelles raisons qui ont conduit à cette vente ? En effet, il est troublant que la France ait cédé sans état d’âme une entreprise dont les activités sont si importantes pour son indépendance.

Les risques liés aux procédures judiciaires pour corruption engagées contre Alstom dans de nombreux pays ont joué un rôle déterminant dans le rachat de la société française. La justice américaine a su habilement exploiter les craintes des dirigeants du groupe. En effet depuis plusieurs décennies, les règles juridiques édictées à Washington s’imposent au reste du monde, au détriment des droits et des intérêts des autres nations. Ce sont elles, et non une soi-disant complémentarité économique ou la recherche de la taille critique, qui sont à l’origine de la cession de la branche Energie du groupe français.

L’affaire Alstom met par ailleurs en lumière deux faits préoccupants :

  1. d’une part, l’attitude de nos « élites » qui, derrière un discours circonstancié sur la mondialisation – mais en réalité motivées par la satisfaction d’intérêts personnels ou la dissimulation d’erreurs stratégiques – sont en train de vendre nos joyaux industriels à l’étranger, n’hésitant pas à sacrifier notre indépendance militaire et nucléaire ;
  2. d’autre part, l’incompétence et l’impuissance des politiques, qui n’ont toujours pas compris ce qu’était la guerre économique et moderne et se révèlent incapables de défendre nos intérêts. Dans ce dossier, rien n’a été fait pour sauver Alstom, le gouvernement n’a pas été à la hauteur des enjeux.

Enfin, pour aboutir à cet accord et pendant toute la période des négociations, il y a eu une multiplication « d’affaires » dans l’affaire : suspicion de manipulation de cours et de délits d’initiés, conflits d’intérêts, projet de déménagement du siège d’Alstom à Singapour, etc. Autant d’éléments qui, ajoutés à la vente déshonorante d’activités stratégiques nationales, font de l’affaire Alstom un véritable scandale d’État.

Conclusion : La trahison des « élites »

Derrière un discours circonstancié sur l’inéluctabilité de la mondialisation, nos élites sont en train de vendre nos joyaux industriels à l’étranger, motivées par la satisfaction d’intérêts personnels ou la dissimulation d’erreurs stratégiques, n’hésitant pas à sacrifier notre indépendance militaire et nucléaire sous de faux prétextes. Elles semblent ne plus croire à la nécessité d’une industrie française, et ne se considèrent plus comme solidaires avec leurs concitoyens. De tels comportements ne s’observent nulle par ailleurs en Europe.

Rappelons que dès l’arrivée des socialistes au pouvoir, en 2012, Patrick Kron avait commencé à préparer le déménagement du siège d’Alstom à Singapour afin de s’affranchir de la fiscalité française et de s’installer dans un pays n’ayant pas d’accord d’extradition avec la France. Par ailleurs, la campagne de communication lancée par GE en France au printemps 2014 pose la question des agences médias françaises y ayant collaboré à des fins mercantiles.

Ce phénomène se trouve amplifié par l’incompétence ou la compromission d’une partie des dirigeants politiques et des hauts fonctionnaires. Dans ce dossier, le gouvernement n’a pas été à la hauteur des enjeux. Rien n’a été fait. Pire, certains, dans la haute administration ont torpillé dès le départ la solution d’un rachat d’Alstom par la France. Cette option a donc à peine été étudiée.139 hauts fonctionnaires de Bercy ont eu le culot – faute d’autres arguments valables – de justifier cette décision au nom de « l’intégration silencieuse des discours du Front national dans la politique économique de la France ». Affligeant. Défendre les intérêts nationaux, c’est aujourd’hui être du Front national !

De plus, il convient de signaler l’irresponsable passivité des parlementaires sur ce dossier, qui n’ont jamais mesuré l’ampleur des enjeux en cours et ont laissé le gouvernement cafouiller à sa guise. En particulier, pourquoi Jean-Pierre Chevènement, dans un premier temps fortement opposé au démantèlement d’Alstom, a-t-il aussi rapidement changé d’avis ? Serait-ce à cause de sa circonscription de Belfort où GE et Alstom sont les premiers employeurs?

Enfin, il convient de ne pas oublier le silence assourdissant des syndicats, que l’on n’a pas entendus dans cette affaire. Comment la CGT, d’habitude plus réactive, a-t-elle pu rester aussi silencieuse sur ce dossier et pendant autant de temps ? En effet, rappelons que le 4 novembre 2014, au terme de la procédure d’information-consultation des instances représentatives du personnel, le conseil d’administration d’Alstom a autorisé, à l’unanimité, la signature d’un accord avec General Electric pour la cession des activités Énergie. Ainsi que l’a déclaré lui-même Patrick Kron, « les partenaires sociaux ont émis un avis favorable ce qui n’est pas très fréquent dans ce type d’opérations ».

Ce sont là autant de signes inquiétants d’une démission collective. Entre la trahison des élites, l’amateurisme dont a fait preuve le gouvernement dans ce dossier, l’abandon par la France de son indépendance et sa souveraineté nationales et les multiples affaires, la cession des activités énergie d’Alstom est un véritable scandale d’État.

L’affaire Alstom révèle par ailleurs l’incompréhension de la compétition économique des dirigeants politiques français. Elle est à rapprocher d’autres offensives que les États-Unis ont déclenchées contre nous, profitant de notre faiblesse politique du moment à cause d’un président impopulaire et passif : remise en cause par Washington de la vente de navires Mistral à la Russie et le racket dont a été victime BNP/Paribas. C’est pourquoi il est temps de sortir de l’aveuglement dans lequel nous baignons : nous ne sommes plus amis avec les États-Unis, tout au plus alliés…La guerre économique est depuis longtemps déclarée et il est affligeant que nous ne rendions pas les coups !

Leslie Varenne et Éric Denécé
Source :
cf2r.org
Décembre 2014

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