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Présidentielle : la machine médiatique en marche

Présidentielle : la machine médiatique en marche

par | 1 octobre 2021 | Politique, Société

Présidentielle : la machine médiatique en marche

Il y a cinq ans, Polémia, sous la plume de Jean-Henri d’Avirac était le premier média à envisager la victoire d’Emmanuel Macron à la présidentielle de 2017. Voici un article de Jean-Henri d’Avirac qui décrit froidement et cliniquement le cynisme du monde politico médiatique. Des médias gouvernés par l’argent plus encore que par l’idéologie (ce qui explique le phénomène Zemmour : il fait de l’audience !). Un président Macron dont la politique sanitaire est moins dictée par les exigences du « grand reset » que par le calendrier de sa réélection ! Reste le fait que le mot COVID n’a pas été prononcé lors du débat Zemmour/Mélenchon qui a explosé toutes les audiences (4 millions de spectateurs) : sans doute un indice du retour au premier plan des préoccupations politiques des questions identitaires et régaliennes ainsi que sociales.
En tout cas voilà un article qui décoiffe. Polémia

Dans la perspective de la prochaine élection présidentielle, être ou ne pas être médiatiquement « bankable » s’imposerait comme la clé du scrutin. Nos analyses classiques d’un système médiatique qui serait ad vitam aeternam idéologiquement formaté atteignent leurs limites.

D’où qu’il vienne, quoi qu’il pense, celui qui veut être correctement traité par une médiasphère dominée par l’argent doit « prendre la lumière » et dresser au préalable un diagnostic sans concession de ses forces et faiblesses… glaçant et stimulant ?

Effet de loupe

Si depuis le début de l’année 2020, la gestion calamiteuse de la crise sanitaire par le pouvoir macronien s’impose comme une évidence, l’instrumentalisation politique du Covid pourrait constituer désormais et contre toute attente l’élément déterminant des mois qui nous séparent de la présidentielle.

Bien avant la plupart de ses « challengers », Emmanuel 1er alias Jupiter 2.0 a compris que l’image, le digital et l’émotion constituaient désormais le cœur du réacteur politique ou de ce qu’il en reste, bien avant les programmes, les idées ou les convictions.

Macron et le Covid-19 : « absurdistan » ou stratégie du choc ?

Quatre ans après l’installation de l’ectoplasmique macronie, le bilan est, au-delà même de l’amateurisme du quotidien, particulièrement édifiant sur le régalien, l’immigration, l’islamisation, l’insécurité, l’incapacité à réformer et à dialoguer avec les Français.

Sa suffisance teintée de libéral mondialisme agace le peuple, son arrogance de « premier de cordée » irrite la France qui peine à joindre les deux bouts. Sa bien-pensance d’extrême centre la boboïse avant de muter en posture autoritaire… Tout cela devrait avoir raison de l’idée même d’une nouvelle candidature du locataire de l’Élysée.

Covid-19 : autopsie d’un désastre français

Bien au contraire, ce dernier se trouve aujourd’hui dans la position la plus favorable pour remporter l’élection avec un score de popularité qui ferait pâlir d’envie prédécesseurs et concurrents.
Au cœur de l’analyse, une candidature Macron qui se révèle être la plus médiatiquement « bankable ».

En premier lieu, le futur candidat crée ce que les communicants appellent un effet de loupe en polarisant l’actualité sur la crise sanitaire, imposant tempo, thématique et registre émotionnel, en diminuant de fait la part de voix des sujets qui fâchent.

Emmanuel Macron est devenu le maître des horloges émotionnelles, aidé en cela par ses conseillers, idéologues post-rocardiens de l’Élysée ou de la Fondation Jean Jaurès et autres neuro- ou nudge-marketeurs qui impriment un rythme : Emmanuel exaspère puis libère, fait peur puis rassure, confine puis déconfine… Tout cela contient intrinsèquement un très fort potentiel médiatique, les questions de vie ou de mort, de peur, de norme sociale, de privation de liberté, polarisant l’attention et présentant l’immense avantage pour le président sortant de faire diversion en « déportant » le débat politique. Pour faire court, l’Élysée préfère aujourd’hui en dominante médiatique un clivage national à 25-75 sur la question sanitaire en sa faveur, qu’un clivage à 60-40 en sa défaveur sur le régalien et sa capacité à réformer… Ajoutez à cela un zeste de réseaux sociaux façon dialogue « cool » avec la jeunesse ou genre fan-club de McFly et Carlito et la machine se met en marche.

Les manipulations des communicants d’Emmanuel Macron décryptées

Cette machine sait pouvoir compter, en prime, sur les idiots utiles du système : certains opposants politiques qui ne manqueront pas de s’engouffrer hystériquement sur les thématiques jetées en pâture par le pouvoir… Soyons clair, voir Macron en porte-drapeau d’un projet orwellien au travers du passe sanitaire accrédite inutilement le flanc aux accusations complotistes. Malgré toute la vigilance qui doit prévaloir sur le long cours, l’agenda présidentiel n’est pas dominé par la recherche d’une contribution à la mise en place d’un projet planétaire totalitaire plus ou moins piloté par les labos, les GAFAM et le Great Reset mais bien par l’obsession des échéances politiques à court terme.

Quant à la médiasphère dont la monochromie laisse sans voix tout observateur avisé extérieur à l’Hexagone, elle sera au rendez-vous… Un rendez-vous plus capitalistique qu’idéologique.

Retour sur les liens organiques des média avec le Pouvoir

À un CNews près, le soutien affiché ou larvé de la quasi-totalité de la médiasphère à cette offre politique paradoxalement invertébrée et autoritariste est d’ores et déjà quasiment acquis.

Mais là encore prenons garde de ne pas caricaturer le paysage en injectant dans nos diagnostics nos prismes idéologiques… Une mauvaise analyse conduit à une stratégie hors-sol et à un plan d’action erroné. La dominante au cœur des médias n’est plus la couleur politique du journaliste standardisé depuis bien longtemps par les idéologues des écoles dédiées puis par les « valeurs » du Système et dont les effets demeurent incontestablement… Cette dominante tient désormais en un mot : l’argent.

C’est une bonne et une mauvaise nouvelle. Une bonne nouvelle, car si vous « prenez la lumière », que votre discours trouve un écho dans le public susceptible de doper la part de marché de la chaîne qui vous reçoit, que vous êtes médiatiquement « bankable », quelle que soit votre obédience, vous avez, à la manière d’un Zemmour, une chance d’exister médiatiquement et d’obtenir une part de voix significative. Et n’imaginons surtout pas que la progression de CNews, qui a multiplié par 2,5 en deux ans sa performance Médiamétrie, n’est pas de nature à infléchir la ligne éditoriale des autres médias qui, BFM et LCI en tête, vont devoir reconsidérer à la baisse leur tarification publicitaire, le nerf de la guerre.

« Qui tient les médias ? » Conférence de Jean-Henri d’Avirac

C’est aussi une mauvaise nouvelle car les liens organiques et financiers de la totalité de la médiasphère française avec le pouvoir demeurent incroyablement solides au travers d’un système de dépendance à cinq niveaux :

  • la dépendance directe à la République française d’une vingtaine de grands médias nationaux à très fort taux de pénétration (nos compatriotes croient naïvement que l’époque de l’ORTF est la préhistoire de la télévision française mais oublient que les présidents actuels sont nommés par le CSA dont le président est lui-même nommé en Conseil des ministres par le président de la République !) : France Télévisions (France 2, France 3, France 4, France 5) ; Radio France (France Inter, France Info, France Culture, FIP, France Bleu) ; France Médias Monde (TV5 Monde, France 24, RFI), LCP Public Sénat, Arte ;
  • la dépendance par la commande publique (vendeurs d’armes ou de travaux publics) : Bouygues (TF1, LCI, TMC) Dassault (Le Figaro, Le Figaro Magazine, La lettre de l’Expansion) ; Lagardère (Paris Match ; le JDD) ;
  • la dépendance par lien politique-idéologique : Xavier Niel (Le Monde, Télérama, L’Obs, Courrier international…) ;
  • la dépendance par lien amical : Pinault (Le Point) qui déclarait dès 2018 « sa grande admiration pour Emmanuel Macron » ; B. Arnault (Le Parisien, Aujourd’hui en France, Les Échos ; Radio Classique, Investir) ;
  • la dépendance des « redevables » : Patrick Drahi (Libé, BFM, L’Express, RMC) éternellement redevable à l’Élysée de l’opération SFR réalisée par son groupe Altice grâce à l’appui du ministre en charge à l’époque… un certain Emmanuel Macron ;

Ajoutons à cela des financements à la main du pouvoir sur l’ensemble du spectre médiatique :

  • les aides à la presse, généreusement accordées à certains « au nom du pluralisme » par le directeur des médias et des industries culturelles (!) ;
  • les plans médias de l’État intégrant ou non, selon le bon vouloir des ministres concernés, tel ou tel support pour des centaines de millions d’euros concernant les campagnes de prévention routière, d’information sur les droits, de recrutement des armées ou… de la prévention sanitaire !

Pseudo dissidents, opposants caricaturaux, réinformateurs d’un soir… avec de tels ennemis, Macron n’a pas besoin d’amis

L’annonce inquisitoriale du président de la République sur le passe sanitaire n’a pas été lancée début juillet à la légère.

Sur le plan politique, il y a fort à parier que l’onde de choc provoquée par cette mesure et le ton martial du petit Emmanuel avait été anticipée. Le moins que l’on puisse dire, c’est que le piège tendu aux opposants a magistralement fonctionné : parvenir à ce que médiasphère et réinfosphère dans leur quasi-totalité oublient pendant un été complet les questions délicates pour le pouvoir ou apercevoir des opposants patentés rangés derrière les nouveaux mentors Francis Lalanne et Jean-Marie Bigard a dû provoquer sous le bureau d’Emmanuel un début d’érection présidentielle !

Contrairement à leurs oppositions de droite ou de gauche et aux mouvements dissidents d’une manière générale, les très pragmatiques libéraux macroniens analysent le plus rationnellement possible les forces et faiblesses de leurs adversaires. Depuis quelque temps, ils ont bien compris que les postures égocentrées, les monomanies obsessionnelles et les « surréactions » constituaient le talon d’Achille de bon nombre de ces empêcheurs de tourner en rond.

La France de Macron, une dictature post-démocratique

Il suffit alors d’envoyer au bon moment et au bon endroit un os à ronger à ces chiens enragés et l’on peut ainsi poursuivre calmement sa route.

Faisons même le pari que le traditionnel regard épouvanté porté sur l’« extrrrrrême drrrroite » laissera progressivement la place dans la prochaine campagne à un élan de commisération, regard porté sur des gens « qui posent de bonnes questions mais qui ont décidément un problème et auxquels on ne peut raisonnablement pas confier des responsabilités faute de quoi le chaos serait au bout de ce chemin déjà si tourmenté par la crise »… Les éléments de langage sont prêts, la machine médiatique tout autant.

Face à ces rideaux de fumée, face à ces rouleaux compresseurs de l’opinion qui préfèrent fabriquer de l’abstention que de l’adhésion à la politique (et donc… de l’opposition), la dissidence doit s’organiser et se professionnaliser, se recentrer sur des combats explicites et intelligibles sous peine d’être ridiculisée.

Le risque est réel pour les prochaines échéances : au moment où s’écrivent ces lignes, avec de tels ennemis, Macron n’aura peut-être pas besoin d’amis pour gagner.

 

Jean Henri d’Avirac
01/10/2021

Jean-Henri d'Avirac

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