Après les dernières découvertes relatives aux activités de la National Security agency (NSA), seul les Suisses sont restés sereins, alors que le président de la République française et la chancelière allemande exigeaient de M. Obama des « explications ».
Il n’y a aucune explication à fournir à personne : tous les services de renseignements du monde espionnent partout où ils peuvent. Il faut espérer que les Français et les Allemands n’ont pas attendu les révélations de M. Snowden pour apprendre qu’ils étaient espionnés par l’Amérique. Il faut également souhaiter – pour les autorités – que les informations balancées sur les lignes surveillées étaient dûment fabriquées à l’usage des espions. Il faut enfin postuler que les services secrets européens, comme les services de renseignements suisses, avaient piraté les lignes téléphoniques les plus cryptées du Pentagone et de la Maison Blanche, et qu’ils n’ignorent rien des relations les plus inappropriées du président.
Les réactions indignées des chancelleries française et allemande étaient fondées sur le postulat qu’on n’espionne pas ses alliés ni ses amis. Ce postulat est une sottise. Toutes les adolescentes ont lu le journal intime de leur grande sœur quand elles ont pu le dénicher. Mais en outre, il faudra bien s’aviser enfin que les Etats-Unis d’Amérique ne sont ni nos alliés ni nos amis : ils sont nos concurrents, nos adversaires et même, sous certains aspects, nos ennemis.
S’ils ont « libéré » l’Europe en 1945 et s’ils ont institué un « plan Marshall », ce n’était certes pas dans notre intérêt mais dans le leur. Toutes les guerres qu’ils ont menées, et qu’ils mènent encore, c’est pour asseoir leur puissance économique et financière. Pour atteindre cet objectif – légitime de leur point de vue – les Américains sont capables de nous écraser tous sans pitié.
Lorsqu’on veut souper avec le diable, il faut avoir une longue cuillère. Le Conseil fédéral serait bien avisé de s’en souvenir !
Claude Paschoud
Le pamphlet, octobre 2013, Lausanne