Accueil | Politique | Nucléaire et démocratie directe

Nucléaire et démocratie directe

Nucléaire et démocratie directe

par | 18 mars 2011 | Politique

Nucléaire et démocratie directe

La récente catastrophe au Japon repose la question de la sécurité de l’industrie nucléaire. Le raisonnement économique conduit à la construction d’un nombre toujours plus grand de centrales de production d’électricité. On sait que la consommation d’électricité double tous les dix ans. Les centrales nucléaires sont rentables mais dangereuses et exigent des mesures de sécurité particulièrement fortes. Cela dit, ces usines ne sont pas les seules à être dangereuses. Que dire de beaucoup d’usines chimiques ? On se souvient de l’incident de Sévéso en Italie qui a conduit à élaborer de nouvelles législations (directive Sévéso).

Le Vert français Noël Mamère a demandé un référendum sur l’utilisation des centrales nucléaires. Cela conduit à se poser des questions sur le fonctionnement de notre démocratie. Faut-il imposer des centrales nucléaires à la population ou faut-il la consulter ? Là encore, il serait erroné de raisonner dans l’abstrait en ignorant les expériences étrangères dans les pays qui ont la démocratie directe.

Première constatation : Trois des quatre grands pays à démocratie directe, la Suisse, les Etats-Unis, l’Allemagne ont des centrales nucléaires. Certes, en Allemagne, le parlement fédéral a voté une sortie du nucléaire pour 2025. Par contre, en Italie, c’est un référendum en 1987 qui a abouti à la sortie du nucléaire mais un nouveau programme a été élaboré et doit être soumis au peuple le 12 juin 2011. Quant aux USA et à la Suisse, la démocratie directe n’a pas conduit à supprimer les centrales nucléaires

L’exemple suisse

Quatre centrales nucléaires ont été mises en service de 1969 à 1984. Elles sont toutes situées en Suisse alémanique à Mühleberg, Gösgen, Beznau et Leibstadt. Ces centrales produisent 41,3% de l’électricité suisse (en France, le nucléaire fabrique 78% de notre électricité).

Le 23 septembre 1990, le peuple a rejeté l’initiative intitulée « pour un abandon progressif de l’énergie atomique » avec 52,9% de non. Par contre, le même jour, le peuple a voté un moratoire sur les constructions avec 54,5% des voix qui a abouti au gel des constructions de centrales pour 10ans.

Le 18 mai 2003, le peuple a rejeté les deux initiatives « Sortir du nucléaire » et « prolonger le moratoire » par 66,3% et 58,4% de non. Jusqu’à présent, le peuple suisse a donc donné son feu vert à la construction de centrales en ne demandant pas de prolonger le moratoire de 1990.

Trois projets de nouvelles centrales sont en cours de réalisation. Mais le ministre de l’environnement Suisse Doris Leuthard (réputée pro nucléaire) vient de décréter un nouveau moratoire suite aux évènements du Japon en disant qu’il faut réexaminer les règles de sécurité en la matière et de pas prendre de décision prématurée.

Les cantons sont amenés à donner des avis consultatifs. En février dernier, 51,2% des Bernois ont approuvé la construction d’une nouvelle centrale à Mühleberg. L’Union démocratique du centre et le parti libéral suisses ont demandé d’étudier la sécurité des centrales mais souhaitent qu’on ne prenne pas de retard dans le programme. Par contre, les socialistes et les Verts demandent la sortie du nucléaire. En été 2012, le conseil fédéral (gouvernement) doit prendre une décision qui pourra être soumise au référendum consultatif.

Conclusions

Contrairement à ce que l’on pourrait croire a priori, l’existence de la démocratie directe ne semble pas changer grand-chose aux décisions politiques de continuer ou d’abandonner le nucléaire. En Suisse et aux Etats-Unis, la population n’a pas montré d’hostilité systématique. En Italie, un référendum a débouché sur la sortie du nucléaire mais dans d’autres pays comme en Allemagne, c’est le parlement qui a été dans ce sens.

L’important est de ne pas prendre de décisions précipitées qu’elles soient populaires ou parlementaires. La procédure suisse des initiatives populaires permet de prendre ce temps car il faut souvent deux à trois ans entre le dépôt des signatures déclenchant un référendum et la votation elle-même. Le déclenchement d’un référendum juste à la suite d’un évènement n’est sûrement pas la bonne méthode pour légiférer : que la décision soit parlementaire ou référendaire, il est toujours urgent d’attendre plutôt que de prendre des décisions précipitées.

Yvan Blot
17/03/2011

Ivan Blot

Cet article vous a plu ?

Je fais un don

Je fais un donSoutenez Polémia, faites un don ! Chaque don vous ouvre le droit à une déduction fiscale de 66% du montant de votre don, profitez-en ! Pour les dons par chèque ou par virement, cliquez ici.

Voir aussi