Les ministres de l’Intérieur de l’Union européenne, puis les chefs d’État, se sont réunis la semaine dernière pour faire face à la crise des « réfugiés » afin de se répartir 120.000 d’entre eux. On notera qu’au printemps dernier, ils s’étaient mis d’accord sur 40.000 et que, depuis lors, Bruxelles n’a pu en placer que 33.000. Cela augure mal pour les autres !
D’autant que la situation est déjà dépassée. D’ici au mois de janvier, a-t-on appris, l’Allemagne, rouvrant ses frontières aux « vrais « réfugiés, devrait en accueillir un million !
Il y a eu un accord pour leur répartition, mais à la majorité qualifiée car depuis le Traité de Lisbonne la règle de la majorité s’est substituée à celle de l’unanimité, changement qui témoigne de la discorde au sein des États membres. Ainsi, même ceux qui ont voté contre cette répartition (Hongrie, République tchèque, Slovaquie, Roumanie) devront accepter des réfugiés. François Hollande a tenu à préciser que ce serait « obligatoire » mais comme on n’a aucun moyen de le leur imposer par la force – l’Union européenne n’ayant pas de char – ces dissidents seront pénalisés financièrement.
D’un côté, on les aide à améliorer leur niveau de vie, d’un autre on les ponctionne parce qu’ils n’obéissent pas à Bruxelles. C’est le chantage : ou bien vous renoncez à votre souveraineté, au droit régalien de maîtriser le peuplement de votre territoire, ou bien vous êtes punis ! Le bâton de la sanction après la carotte des subventions, ainsi va Bruxelles qui n’est pas au service des peuples mais entend que ces derniers soient au sien.
La faute à qui si ces « migrants » peuvent ainsi déferler par centaines de milliers ? Aux dirigeants de l’Europe qui ont laissé les frontières de l’Union poreuses. Ce n’est pas nous qui le disons mais le président du Conseil européen, Donald Tusk, qui, à l’issue de la réunion des chefs d’État, a déclaré : « La question est celle-ci : comment reprendre le contrôle de nos frontières extérieures ?»
N’est-ce pas, là, l’aveu qu’elles sont hors contrôle, que l’on peut pénétrer en Europe comme dans un moulin, ce dont ne se sont pas privés tous ceux qui, dans le monde, aspirent à bénéficier de ce qui reste encore de notre prospérité ?
Les accords de Schengen prévoyaient la libre circulation des biens et des personnes à l’intérieur des frontières de l’Union. Cela impliquait la protection vigilante de ses frontières extérieures, ce qui n’a pas été le cas. Il paraît que l’on va le faire maintenant, trente ans après la signature, en 1985, desdits accords !
On va essayer d’accomplir à la hâte, dans l’improvisation et sous la pression migratoire et la panique, ce que l’on aurait dû faire à froid, il y a quelques décennies !
Les dirigeants européens ont prévu des équipes d’intervention rapides, composées de policiers, de juristes, d’interprètes et la constitution de gardes-côtes et de gardes-frontières européens, postés en Italie et en Grèce, les deux principaux points de passage maritime des clandestins vers l’Europe.
Il est prévu des points de contrôle et d’enregistrement – en jargon technocratique : des hotspots – chargés de distinguer le bon grain de l’ivraie, autrement dit ceux qui relèvent du droit d’asile et les migrants « économiques ». Les premiers seraient répartis dans un des pays de l’Union les acceptant, les autres étant reconduits chez eux avant qu’ils ne pénètrent sur le territoire de l’Union.
Sur papier, c’est bel et bon. Sauf que, concrètement, ce n’est pas demain que l’on verra appliquer ces dispositions. Or, il y a urgence. On doit noter que la Grèce et l’Italie sont les passages maritimes mais que ceux qui viennent des Balkans ne passent pas tous par là. Bruxelles souhaitait donc le même contrôle sur le territoire hongrois. Ce que la Hongrie a refusé.
Qui se chargerait de la tâche ? Les Grecs et les Italiens, débordés, ont déjà donné, dans une certaine solitude, mais il n’y a pas de police européenne spécifique pour contenir ceux qui vont se presser dans ces centres. Il faudrait que chaque État fournisse des membres de ses forces de l’ordre, comme les casques bleus de l’ONU qui appartiennent à divers pays. La question n’a même pas été débattue à Bruxelles, sachant que les pays volontaires seraient peu nombreux. Va-t-on désigner des volontaires comme on veut imposer la présence de « réfugiés » aux pays qui n’en veulent pas ?
Ce n’est pas tout : le tri puis l’enregistrement des demandeurs exigera beaucoup de temps, pour savoir quelle est leur nationalité, vérifier leur identité, détecter les faux papiers et leurs liens avec les mafias et les leaders djihadistes. En attendant, qu’en faire ? La seule solution est de les mettre « en attente » dans des camps ! Cela a été évoqué par les chefs d’État et de gouvernement pour en conclure que voir des milliers de « réfugiés » dans des camps, (et qu’il faudrait nourrir) donnerait une mauvaise image de l’Europe après que Merkel a assuré que nous avions les moyens d’accueillir tout le monde.
Il est probable d’ailleurs que certains des demandeurs d’asile n’accepteraient pas d’être ainsi en rétention. Mais la question la plus importante est celle-ci : comment reconduire les faux demandeurs d’asile qui sont de vrais prédateurs économiques ? Là encore, ni police, ni armée européenne pour effectuer ce nécessaire travail !
Il est naïf de croire que, déboutés après avoir attendu des semaines voire des mois dans un camp, ils vont sagement retourner chez eux. Ils contourneront nos frontières et nous serons revenus à la case départ. Rappelons qu’en France, selon la Cour des comptes, 99% de ceux qui n’obtiennent pas l’asile ne sont pourtant pas expulsés mais restent sur notre territoire.
Ces réunions bruxelloises relèvent de la simple communication pour faire croire au bon peuple, qui s’effraie du déferlement de « réfugiés », que l’on prend le problème à bras-le-corps, alors que nos dirigeants restent aussi impuissants aujourd’hui qu’ils l’étaient hier.
André Noël
Source : Bulletin d’André Noël – n° 2439
Semaine du 28 septembre au 4 octobre 2015