« Perpétuer la domination de leurs partis sur la vie politique française, gagner des parts du marché électoral. »
Hier, lors de la séance de questions au gouvernement, le palais Bourbon a encore été le théâtre d’une empoignade ridicule, où le ministre de l’Intérieur, dans le rôle de l’indigné, a réussi le tour de force d’avoir à la fois la main sur le cœur, le poing fermé et vengeur, et, en même temps, l’index accusateur : il répondait à une question de Yannick Moreau, député de Vendée, qui l’interpellait sur la manifestation anti-terrain d’aviation qui s’est déroulée à Nantes, samedi dernier, dans les conditions que l’on sait.
Il fallait voir Manuel Valls écouter la « question », le menton dans la main, avec une expression digne d’une caricature d’Othello méditant la strangulation de Desdémone…
Prenant la parole, à la fureur du Maure, il a ajouté l’art du mensonge de Iago, protestant de l’impartialité qui l’anime, de l’honnêteté foncière de toutes ses intentions et actions ! Puis, soudain drapé du chiton de Thémis, il a pointé d’un doigt accusateur la complaisance de ses adversaires (l’UMP) à l’égard des ennemis de la République et de ses valeurs (la Manif pour tous). Et, estocade suprême digne d’un matador diplômé de la feria de Pampelune, il a rappelé le trouble passé politique du Claude Goasguen des seventies : on n’est pas le premier flic de France pour rien ! Tumulte, chahut, invectives, députés debout entamant une sortie collective de l’hémicycle, accompagnée des huées de l’autre moitié de nos représentants, tandis que, du haut de son perchoir, le pion président s’agitait comme un ara effaré pour ramener le calme. Tout cela était grotesque, futile, dérisoire et à nos frais.
Plus sérieusement, on mesure, en assistant à ce genre de scène sans dignité, à quel point d’abaissement sont parvenues nos institutions et les mœurs de ceux qui sont censés nous représenter ; en effet, ne nous trompons pas : c’est tout un système qui est ici en jeu. D’un côté, l’intervention d’un député cherchant à se faire entendre et approuver par ses pairs de l’UMP pour faire corps et donner une bonne image ; de l’autre, un ministre socialiste cherchant, à l’approche d’élections municipales au succès incertain, à camoufler les effets conjugués de sa partisannerie idéologique et de son incompétence professionnelle.
Mais chacun des deux et tous poursuivent, volens nolens, le même objectif : perpétuer la domination de leurs partis sur la vie politique française, gagner des parts du marché électoral, empêcher tout intrus (le Front national par exemple) de toucher au grisbi !
Fort heureusement, les Français commencent à s’en rendre compte, les caves se rebiffent : puissent les élections constituer au moins en partie une épreuve de vérité. Que celle-ci s’évade des geôles du mensonge et puisse un jour nous rendre libres !
Claude Wallaert
Source : Politique magazine
26/02/2014