Jean-Yves Le Gallou, président de Polemia.com, essayiste.
♦ « Marion a engrangé parce qu’elle a été fidèle à ce qu’elle croit. Et parce qu’elle n’a pas hésité à transgresser les règles du politiquement correct. »
D’un tour à l’autre le FN n’a gagné nulle part mais il a progressé en voix partout, y compris dans les triangulaires qu’il ne pouvait guère gagner.
Partout ? Pas tout à fait. Malgré une participation en hausse de 20% le FN a perdu, en nombre de voix, 10% de ses électeurs du premier tour en Ile-de France. Là où son candidat Wallerand de Saint-Just a tenu une ligne mollassonne : timide sur la défense des valeurs et maladroite en réponse aux questions de la Manif pour Tous ; frileuse sur l’identité et à contre-emploi dans la recherche du vote immigré (qui de toute façon s’abstient aux régionales !) A force de chercher à rassurer, Wallerand a découragé ses électeurs ! Au final, c’est Chéri j’ai rétréci l’électorat !
A l’autre bout de la chaîne électorale, c’est en Provence-Alpes-Côte-d’Azur que le FN a enregistré ses meilleurs résultats. Avec une progression spectaculaire au premier tour : partant de moins de 30% d’intentions de vote au départ pour aboutir à 40,5% dans les urnes. Puis un nouveau rebond au second tour avec 23% de voix supplémentaires. Le tout permettant de déboucher sur le meilleur score FN de France : plus de 51% dans le département du Vaucluse, 45,2% sur l’ensemble de la région.
Cette progression mérite d’être méditée.
Marion a engrangé parce qu’elle a été fidèle à ce qu’elle croit. Et parce qu’elle n’a pas hésité à transgresser les règles du politiquement correct.
En lançant sa campagne dès juillet sur une thématique centrée sur l’identité et les traditions de sa région. En se montrant, au risque de passer pour « ringarde » aux yeux des imbéciles, dans les fêtes votives, chevaux et taureaux aux Saintes-Maries-de-la-Mer par exemple, en défendant les crèches et les santons.
En prenant sur sa liste des identitaires, dont Philippe Vardon de Nissa Rebella. Un zeste de diabolisation pour Estrosi et les médias de propagande mais une louche de communication alternative. D’une grande efficacité sur le terrain militant et les réseaux sociaux.
En prenant ses distances vis-à-vis des mantras sur les « valeurs républicaines » qui n’ont plus rien à voir avec la Res Publica mais sont la traduction en novlangue du politiquement correct. En reconnaissant la réalité du Grand Remplacement sans céder aux tentations du déni de réalité. En ne tombant pas dans le piège bêlant de la laïcité et en affirmant sans complexe que l’islam, religion étrangère, ne peut avoir la même place que le catholicisme, religion partie prenante de l’identité française.
En ayant pris sans détour le point de vue de la Manif pour Tous contre la loi Taubira et en ayant manifesté avec ardeur sans déserter ensuite le combat. En assumant crânement son refus de financer l’association politisée du Planning familial qui milite pour la théorie du genre et l’avortement.
Sur tous ces points Marion n’a pas suivi des conseils de prudence, elle n’a pas « pasteurisé » son discours, elle a assumé ses convictions. En donnant du sens, elle a redonné ses lettres de noblesse à la politique. Et c’est pour cela qu’elle a marqué des points. Certes, elle n’a pas emporté la victoire car elle a subi comme les autres candidats FN (mais ni plus, ni moins) une puissante campagne d’ahurissement médiatique, mais elle a su particulièrement bien mobiliser les siens, tous les siens.
La recette des succès futurs est là : la transgression tranquille appuyée par une communication privilégiant les réseaux sociaux.
La victoire n’est pas encore au rendez-vous mais le brillant parcours Marion annonce la fin du cycle libéral libertaire de 1968 et l’avènement d’un nouveau cycle politique fondé sur l’identité, l’enracinement et les traditions. La génération 2013 arrive aussi dans les urnes.
Jean-Yves Le Gallou
15/12/2015
Source : Boulevard Voltaire
Correspondance Polémia – 16/12/2015
Image : Marion Le Pen-Maréchal et Christian Estrosi
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