La gauche dégringole dans l’opinion avec la pitoyable présidence Hollande. Néanmoins avec le gouvernement Valls 2 elle prend rang pour l’avenir autour d’une stratégie lisible et cohérente : néo-capitalisme et réformes sociétales. On ne peut pas en dire autant de la droite parlementaire.
Une stratégie cohérente
Les médias de propagande ont mis en scène les états d’âme des militants du PS. Cependant cela ne peut masquer le fait que la stratégie Valls 2 est cohérente à la fois idéologiquement et politiquement.
Cohérente idéologiquement, parce que le néocapitalisme repose sur l’individuation des mœurs et la déconstruction de toutes les normes culturelles et sociales qui pourraient faire obstacle au libre-marché censé rendre la mondialisation heureuse.
Les grandes entreprises mondiales et leurs fondations préconisent d’ailleurs les réformes « sociétales » (qu’il s’agisse des discriminations positives, du féminisme ou de la promotion de l’homosexualité) comme on se souvient que l’ancienne présidente du MEDEF se déclarait favorable au métissage des cultures. La gauche bobo-libertaire est donc parfaitement en phase avec le néocapitalisme.
Les réformes sociétales servent aussi à faire croire que la gauche se préoccupe toujours du « progrès social » et du « changement », alors qu’en réalité elle sert le néocapitalisme.
La gauche peut désormais se passer du peuple
La stratégie Valls 2 est cohérente politiquement aussi, parce que la gauche a rompu avec le peuple et les classes moyennes autochtones – qui votent désormais majoritairement populiste – puisqu’elle a abandonné l’ambition socialiste de sortir du capitalisme et de faire fonctionner l’ascenseur social.
La gauche se concentre désormais sur une stratégie de niches électorales (immigrés, « minorités » diverses, bobos) et cherche à séduire les puissances d’argent car celles-ci maîtrisent les médias et donc le système politique en post-démocratie. Et comme l’a montré l’élection présidentielle de 2012, on peut très bien en post-démocratie être élu tout en étant minoritaire dans l’opinion.
Les habits neufs de la gauche
Donc quand M. Valls déclare « aimer l’entreprise » sous les applaudissements du MEDEF le 27 août dernier, il trahit moins une gauche historique moribonde qu’il ne conforte une nouvelle ligne et – accessoirement – son avenir politique personnel. Car François Hollande peut finir par devenir, du fait de son impopularité abyssale, le fusible qui permettra de sauver à terme la nouvelle stratégie de la gauche.
M. Valls se range aussi clairement dans le camp de l’oligarchie occidentale puisque la ligne néocapitalisme et réformes sociétales correspond très exactement à l’idéologie que les Etats-Unis veulent imposer au monde et donc aussi à celle de l’Union européenne.
La droite parlementaire privée de son seul argumentaire politique
La droite parlementaire, qui aime prendre ses désirs pour des réalités, ferait donc bien de réfléchir avant d’enterrer la gauche.
La ligne Valls la prive durablement, en effet, de son seul véritable argumentaire politique : car l’économie, le soutien aux entreprises et les « réformes » relèvent désormais aussi bien « de la gauche » que « de la droite ». En témoigne d’ailleurs la cacophonie que l’on entend déjà à l’UMP ou à l’UDI entre ceux qui déclarent soutenir les mesures annoncées par le gouvernement et ceux qui veulent s’y opposer.
On ne voit d’ailleurs plus très bien en quoi la droite pourrait se distinguer de la gauche façon Valls sur ce plan, sinon de promettre de « réussir » là où celle-ci échoue : c’est-à-dire, en clair, de faire la même chose que la gauche mais en mieux.
Voilà sans doute une perspective séduisante pour les électeurs !
La droite parlementaire se sent morveuse
La droite se sent aussi mal à l’aise – pour ne pas dire morveuse, comme on dit trivialement – face aux réformes sociétales, comme on l’a bien vu lors des manifestations contre le « mariage » des homosexuels, par exemple.
Pour cette raison qu’on peut difficilement s’affirmer en même temps libéral en économie et contre la mise en œuvre de réformes sociétales qui reposent sur les mêmes principes individualistes et narcissiques que le libéralisme.
On ne peut oublier en outre que la droite parlementaire a une grande part de responsabilité dans des réformes dont elle fait mine de contester aujourd’hui les conséquences. Car c’est elle qui, le plus souvent, les a initiées ou votées ; et qu’elle a toujours refusé de les remettre en cause, malgré ses promesses électorales, lorsqu’elle était au pouvoir.
La droite parlementaire n’est plus crédible
En réalité, on s’aperçoit que la droite parlementaire n’a pas de ligne crédible à opposer à la nouvelle stratégie de la gauche.
La situation est sur ce plan bien différente de celle des années 1980, quand la droite surfait sur le néolibéralisme à la sauce Reagan/Thatcher pour contrer les socialo-communistes. Mais aujourd’hui elle a même perdu le monopole de cet étendard ambigu.
Quant aux questions relatives à l’immigration, à l’identité nationale ou à l’Europe – qui constituent pourtant les « grandes querelles » de notre temps, comme disait De Gaulle – la droite les aborde à reculons et avec de telles circonlocutions politiquement correctes que cela ne signifie plus rien. Car elle redoute plus que tout d’être accusée de « pactiser » avec le Grand Satan populiste. Donc elle préfère se réfugier dans un « ni-nisme » lâche et impolitique.
La droite parlementaire n’a pas envie de gouverner
La droite parlementaire réussit donc la performance, unique en Europe, de ne profiter ni de la débâcle de la gauche historique ni de la droitisation croissante de l’opinion.
En panne d’idées, livrée de surcroît au combat des ego et tétanisée par la progression du Front national, la droite parlementaire ne donne pas véritablement l’impression d’avoir envie de gouverner, en outre.
Pour nous rejouer quoi, d’ailleurs, au juste ? La rupture avec Alain Juppé ? L’union centriste avec François Fillon ? Nicolas Sarkozy contre-attaque ?
On comprend mieux aussi, dans ce contexte de très mauvais remake, les nobles déclamations de certains sur le refus de toute nouvelle cohabitation : car la droite ne saurait que faire d’une victoire, en réalité.
La gauche, qui à la différence de la droite sait toujours s’unir quand il le faut, ne peut que profiter à terme d’une droite aussi durablement calamiteuse.
À moins que ne se produise enfin une rupture salvatrice à droite. La seule rupture qu’attendent vraiment nos concitoyens.
Michel Geoffroy
03/09/2014
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