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L’Union européenne paye sa jizya à la Turquie

L’Union européenne paye sa jizya à la Turquie

par | 22 mars 2016 | Europe, Géopolitique

L’Union européenne paye sa jizya à la Turquie

Gabriel Robin, juriste, essayiste

♦ Nous le paierons très cher

Le sommet organisé entre la Turquie et l’Union européenne s’est achevé vendredi 18 mars. Les médias nationaux n’ont que très peu commenté ce moment historique.

Ils étaient trop occupés à dresser des louanges indues à l’exécutif, suite à l’opération policière ayant permis l’arrestation de Salah Abdeslam au cœur même du territoire occupé de Molenbeek, géographiquement situé en Belgique.


Il y avait pourtant beaucoup de choses à dire à propos d’un sommet qui a vu l’Union européenne, colosse aux pieds d’argile, négocier sur un pied d’égalité avec la seule Turquie du sultan Erdoğan. La Turquie s’est muée en néo-Empire ottoman avec les bénédictions de Donald Tusk, d’Angela Merkel et de François Hollande. Sans grandes difficultés, elle a su obtenir tout ce qu’elle était venue chercher. De l’autre côté, l’Union européenne a dévoilé son vrai visage, celui d’un nain politique dirigé par des irresponsables d’une terrible médiocrité.

Le Premier ministre turc Ahmet Davutoğlu avait de quoi pavoiser pour sa gestion brillante des négociations. Il a fait la démonstration de ce que doit être un grand politique au service de sa nation. Concrètement, en quoi consiste l’accord ? Déjà, la mise en place du principe du « un pour un », arrêté lors du premier sommet du 7 mars. La Turquie va sous-traiter pour l’Europe la crise des « migrants ». Comme l’a indiqué François Hollande : « Tout migrant ou réfugié qui se présente sera ramené en Turquie, mais dans le respect du droit, c’est-à-dire après examen personnel de sa situation. » Pour chaque migrant syrien réadmis, l’Europe s’engage à en réinstaller un autre sur son territoire.

Au-delà des difficultés techniques considérables que suppose ce mécanisme, il saute aux yeux qu’il s’agit tout simplement d’une arnaque. En outre, quid des « migrants » africains ? Quid des « faux réfugiés » ? Quid de la Grèce qui ne pourra pas servir de rempart, faute de moyens ? De nombreuses questions qui ont fait dire à un diplomate européen en marge du sommet que « personne n’est très fier de cet accord ».

Si le dispositif est mauvais, il est aussi très coûteux. Ankara percevra une aide de trois milliards d’euros, déjà promise. Mais l’Union européenne aux abois ne s’est pas arrêtée là, promettant 3 milliards d’euros supplémentaires. Jouissant de la première armée conventionnelle en Europe (hors Russie), la Turquie ne fera pourtant que faire ce qu’elle devrait théoriquement faire : surveiller sa frontière. À titre de comparaison, le budget 2015 de Frontex n’était que de 114 millions d’euros.

Derniers cadeaux, et non des moindres : la réouverture des négociations relatives à l’adhésion de la Turquie à l’Union européenne et la libre circulation des Turcs sur le territoire européen. « Un migrant pour un migrant » auquel il faudra bientôt ajouter un Turc ? Pour nous protéger de l’invasion, l’Union ouvre grand ses portes à d’autres envahisseurs. Délirant. Cerise sur le gâteau, Ahmet Davutoğlu s’est permis en conclusion d’attaquer les Européens sur leur soutien supposé aux Kurdes, n’hésitant pas à comparer le PKK à l’État islamique. Faut-il y voir un chantage au terrorisme islamiste ? Je le crois.

Donald Tusk se moque de nous quand il ose déclarer que l’accord a été « rééquilibré ». Il est aussi tout à fait inauthentique – ou inconscient, c’est selon – quand il dit au nom de tous les Européens : « Nous sommes ici aujourd’hui parce que l’Europe est la destination définitive des réfugiés, parce que nous sommes le continent le plus tolérant du monde. » Non, cette institution apolitique négociait avec la Turquie parce qu’elle est incapable de se défendre, parce qu’elle est une prison des peuples du continent soumis à son joug. L’Union européenne frappée par la récession se rêve en nounou du monde comme les États-Unis se sont longtemps rêvés en gendarmes du monde. Bon flic, mauvais flic. Nous le paierons très cher.

Gabriel Robin
21/03/2016

Source : Boulevard Voltaire.fr

Correspondance Polémia – 22/03/2016

Image : Le sommet fatal !

 

 

 

 

 

 

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