Accueil | Géopolitique | Libye : les forces de l’OTAN ont un moral d’acier mais s’essoufflent !

Libye : les forces de l’OTAN ont un moral d’acier mais s’essoufflent !

Libye : les forces de l’OTAN ont un moral d’acier mais s’essoufflent !
Libye : les forces de l’OTAN ont un moral d’acier mais s’essoufflent !

Tandis que les États-Unis, qui se sont retirés rapidement après le début des hostilités, font la leçon aux forces de l’OTAN, les chefs militaires de la coalition soulèvent la question de la durée. Moins de la moitié des vingt-huit États membres se sont mobilisés et seuls huit pays participent aux bombardements. On le sait, l’Allemagne et la Pologne s’abstiennent de toute aide. Ce sera la première partie de cet article.

Au-delà de la coalition, on parle assez peu de la Libye, les médias se fixant surtout sur les actions opérationnelles militaires. Une délégation d’experts indépendants s’est rendue sur place pour justement sonder les parties antagonistes. Ces experts ont déposé un rapport que Polémia présente en seconde partie.

Comment va la coalition ?

Le lecteur trouvera, à la suite, plusieurs citations prélevées dans la presse française et étrangère qui illustrent ce rapide tour d’horizon sur la coalition.

« Le secrétaire à la défense américain, Robert Gates, a déploré, vendredi 10 juin, le manque d’investissements militaires et de volonté politique des alliés des États-Unis au sein de l’OTAN. Ces “lacunes” pourraient “compromettre” l’efficacité de la mission en Libye. » (LeMonde.fr, 10/06/2011.)

« Trois nations en donnent le tempo : les Etats-Unis, acteur hors catégorie par sa puissance, la France et le Royaume-Uni. Seize autres pays jouent les seconds rôles, pour ne pas dire les figurants. Il ne faut pas leur en vouloir, a tenu à dire le secrétaire américain à la Défense, Bob Gates, le 9 juin, qui, pour la énième fois, appelait les Européens à “partager le fardeau” de la sécurité mondiale : « Franchement, bon nombre de ces alliés restent à l’écart, non parce qu’ils ne veulent pas participer, mais simplement parce qu’ils ne peuvent pas. Les moyens militaires ne sont tout simplement pas là”. » (LeMonde.fr, 11/06/2011.)

« Selon le commandant suprême allié pour la transformation de l’OTAN, le général français Stéphane Abrial : “pour le moment, les forces engagées ont absolument tous les moyens nécessaires pour conduire les opérations ” mais : “si les opérations durent plus longtemps, bien sûr que la question des ressources deviendra critique”. » (LePoint.fr, 14/06/2011.) «

« Aux États-Unis, la Chambre des représentants américaine a adopté, lundi 13 juin au soir, un texte visant à interdire l’utilisation de fonds pour les opérations militaires américaines en Libye et nombre d’élus du Congrès ont exprimé leur mécontentement face à la décision de Barack Obama de se passer du feu vert des parlementaires pour déclencher les opérations en mars et pour les poursuivre après le délai légal de soixante jours sans autorisation du Congrès. » (LeMonde.fr, 14/06/2011.)

« La Norvège, faisant face à une pénurie de bombes, aura déclaré, à travers son ministre de la Défense Grete Faremo, vouloir acquérir plus de munitions tout en annonçant une date butoir pour son retrait du front. La Norvège, qui n’aura pas largué autant d’explosifs depuis la Seconde Guerre mondiale, semble donc effectuer là un geste de bonne volonté. Tandis que le nombre d’avions de combat déployés sera rapidement réduit (de 6 à 4), la Norvège devrait cesser toute activité militaire sur le front libyen au plus tard le 1er août. Le Danemark a épuisé son stock de munitions mais espère pouvoir se ravitailler auprès des Pays-Bas, qui, tout comme la Turquie et l’Espagne, traînent les pieds pour prendre une part plus active dans les opérations. » (leFrancofil’, 15/06/2011.)

« Le numéro deux de la Royal Air Force (RAF) sonne l’alarme. Sir Simon Bryant vient de dire à des parlementaires britanniques que, “si l’opération en Libye devait durer au-delà du mois de septembre, la capacité de l’armée de l’air à répondre, dans l’avenir, à de nouvelles urgences risque fort d’être compromise”. Dans un document révélé lundi 20 juin par le Daily Telegraph, l’Air chief marshal souligne que “les opérations intenses, menées de façon concomitante, en Afghanistan et en Libye font peser une tension ‘considérable’ sur les équipements et les personnels. (…) De nombreux secteurs sont ‘en surchauffe’”. »
« Or, ces opérations interviennent dans un contexte d’économies substantielles dans les budgets de défense. La Royal Air Force doit perdre 15% de ses 32.000 emplois dans les trois ans. Le nombre de ses officiers de renseignement va être divisé par deux. Elle accuse déjà un déficit de 25% chez les techniciens et les mécaniciens. Une crise de recrutement s’annonce. “Le moral est fragile”, explique Sir Bryant, même si “l’esprit de combat reste positif”. »
« La même inquiétude sur les capacités à venir de la marine britannique avait été exprimée il y a quelques jours par l’amiral Mark Stanhope, le first sea lord. Il avait aussitôt été convoqué par le premier ministre, David Cameron. »(*)
« En France, l’amiral Pierre-François Forissier (**), chef de la marine, a insisté publiquement le 10 juin sur les contraintes de “régénération” des équipements et des hommes. Elles feront que, si l’opération libyenne dure jusqu’à la fin de 2011, il faudra se passer de l’unique porte-avions français en 2012. L’état-major et l’Elysée ont vu rouge. »
« Les chefs militaires ne sont pas en train de dire que les opérations en cours sont mal conduites, bien au contraire (…). Mais, à la différence des responsables politiques, les militaires pensent “le coup d’après” ». (LeMonde.fr, 21/06/2011.)

« Dans un entretien au quotidien britannique The Guardian, publié mercredi 22 juin, Amr Moussa, secrétaire général de la Ligue arabe jusqu’en mai 2011 mais qui en garde les commandes jusqu’en septembre, fait part de ses « scrupules » après les pertes civiles imputées par Tripoli à l’OTAN. L’Égyptien rappelle que la Ligue arabe avait accepté de soutenir les frappes aériennes en Libye afin de protéger les populations civiles victimes d’attaques des forces de Mouammar Kadhafi. « Quand je vois des enfants se faire tuer, mon devoir est d’avoir des scrupules. C’est pourquoi j’ai mis en garde contre le risque de pertes civiles”, a déclaré M. Moussa. L’OTAN a été accusée par le régime libyen d’être à l’origine de la mort de 24 civils, dont des enfants, en 48 heures, entre le samedi 18 et dimanche 19 juin. » (LeMonde.fr, 22/06/2011.) «

L’Italie a jeté un pavé dans la mare en demandant, mercredi 22 juin, un cessez-le-feu “immédiat” en Libye, voulant privilégier la démarche diplomatique. Une éventualité aussitôt rejetée par Paris puis par le chef de l’OTAN. » (LeMonde.fr, 22/06/2011.)

Que se passe-t-il réellement en Libye

Il en est de la guerre de Libye comme de tout autre événement national ou international à résonance politique et mondialiste : elle est source d’une information biaisée qui tourne vite à la désinformation. Depuis le début du conflit lancé, voilà trois mois, par Nicolas Sarkozy et David Cameron, les informations qui sont livrées par les médias sont unilatérales, partielles et unanimes : les insurgés sont des champions et Kadhafi est au bord du gouffre.

Le ministre des Affaires étrangères, Alain Juppé, avait déclaré, en mars, que c’était une affaire de quinze jours. Or on s’aperçoit aujourd’hui que non seulement le colonel Kadhafi tient toujours les rênes malgré des bombardements intensifs qui ne peuvent être que meurtriers, mais surtout que c’est la coalition qui s’essouffle, principalement, par épuisement des moyens humains, financiers et matériels.

Face à cette information incomplète et partisane, « un groupe d’experts français et étrangers des questions de défense et du monde arabe », sous la bannière du Centre international de recherche et d’études sur le terrorisme et d’aide aux victimes du terrorisme (CIRET-AVT1) et du Centre français de recherche sur le renseignement (CF2R2), s’est rendu sur place à Tripoli et en Tripolitaine (du 31 mars au 6 avril), puis à Benghazi et en Cyrénaïque (du 19 au 25 avril) pour rencontrer les représentants des deux parties.

La délégation dit avoir pu être autonome, en terre arabophone, en matière de traduction, grâce à la présence et à la disponibilité d’un de ses membres, Mme Sayda BenHabylès (Algérie), ancienne ministre de la Solidarité, ancien Sénateur, membre fondateur du CIRET-AVT, Prix des Nations unies pour la société civile.

Leur enquête éclaire certaines zones d’ombre, notamment sur la question des mercenaires et sur la personnalité des dirigeants du Conseil national de la transition (CNT), dont la composition hétérogène a déjà engendré les premières dissensions et n’augure rien de très constructif pour l’avenir.

Après un rappel descriptif du régime libyen (chapitre I), le rapport comprend douze chapitres articulés principalement autour de l’armée, les causes de la révolution, les événements, les insurgés, les actions de l’OTAN, les stratégies internationales, la position de la France, le risque terroriste et, en conclusion, l’avenir de la « révolution ».

Cet ensemble est bien structuré et donne une assez bonne vue globale du conflit et des intentions des protagonistes, sans néanmoins offrir la possibilité de discerner sur quelle sorte d’issue débouchera cette révolte que l’on appelle faussement « révolution ».

René Schleiter
Polémia
23/06/2011

Cet article vous a plu ?

Je fais un don

Je fais un donSoutenez Polémia, faites un don ! Chaque don vous ouvre le droit à une déduction fiscale de 66% du montant de votre don, profitez-en ! Pour les dons par chèque ou par virement, cliquez ici.

Voir aussi