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Les Chrétiens et l’immigration

Les Chrétiens et l’immigration

par | 24 juin 2020 | Société

Les Chrétiens et l’immigration

Par Pierre Lours, essayiste et romancier, auteur de La Révolte des silencieux ♦ Pierre Lours analyse les fondements religieux de la dérive de l’idéologie chrétienne face à la question de l’immigration. Même si cette attitude cède la place progressivement à une conduite responsable alliant le cœur et la raison, elle est encore bien présente notamment au travers des actes politiques du Vatican.


Comment peut-on être Chrétien et ne pas vouloir accueillir toute la misère du monde ? Comment ne pas obéir aux commandements du Christ, « Tu aimeras ton prochain comme toi-même » ? (Matthieu 22:39) Qui, en voyant les images de ces cohortes de réfugiés marchant vers l’eldorado européen ou embarquant en Libye sur les esquifs de criminels passeurs, n’a pas eu un sentiment de gêne, d’impuissance viscérale face à cette misère qu’il faudrait secourir pour suivre les préceptes d’amour de Jésus ?

Et ce n’est pas la lucide constatation de Michel Rocard qui nous réconforte. Le Premier Ministre socialiste de confession protestante, précisant des propos tenus à l’émission 7/7 du 3 décembre 1989, déclare solennellement le 7 janvier 1990 devant des socialistes d’origine maghrébine participant à un colloque sur l’immigration : « Aujourd’hui je le dis clairement. La France n’est plus, ne peut plus être, une terre d’immigration nouvelle. Je l’ai déjà dit et je le réaffirme, quelque généreux qu’on soit, nous ne pouvons accueillir toute la misère du monde. »

Ce déchirement maintes fois ressenti par les chrétiens entre leur cœur et leur raison, c’est le philosophe chrétien Pascal qui en donnera la clef. « (…) Il ne faut pas que l’homme croie qu’il est égal aux bêtes, ni aux anges, ni qu’il ignore l’un et l’autre, mais qu’il sache l’un et l’autre. L’homme n’est ni ange ni bête, et le malheur veut que qui veut faire l’ange fait la bête. S’il se vante, je l’abaisse ; s’il s’abaisse, je le vante ; et le contredis toujours, jusqu’à ce qu’il comprenne qu’il est un monstre incompréhensible. Que l’homme maintenant s’estime à son prix. (…) ».

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La France devient petit à petit un pays immergeant alors que d’autres émergent avec ténacité et courage. Et c’est dans cette inquiétante régression portée suicidairement par tous ceux qui se réclament du progrès, qu’arrivent d’innombrables pauvres multitudes que nous acceptons pour de bonnes et de mauvaises raisons… mais toujours pour leur malheur et le nôtre aussi.

La culture chrétienne est fortement marquée par l’amour du prochain et par le péché. Profitant de cette sensibilité chrétienne, le marxisme a disséqué les imperfections de notre société pour la détruire. La colonisation lui a donné un terrain favorable pour déployer ses critiques caricaturales avec un systématisme et une mauvaise foi propres aux idéologies totalitaires. Des fautes d’autant plus dénoncées par les communistes qu’ils avaient un lourd bilan à cacher, la meilleure défense étant évidemment l’attaque. Ainsi, la propagande marxiste a habilement manipulé nombre d’ idiots utiles de confession chrétienne, notamment ces Français porteurs de valises de billets de banques au profit du FLN pendant la guerre d’Algérie , en leur faisant croire qu’ils agissaient en toute bonne foi puisqu’ils rachetaient les fautes de la France et libéraient des peuples opprimés.

Toujours est-il que depuis la décolonisation et mai 68, les Français sont priés de battre leur coulpe, culpabilisation s’appuyant sur leur adhésion à la société de consommation qui incite à vivre tous les caprices. Cette culpabilité est naturelle pour des chrétiens en recherche d’une occasion de se confesser, de se montrer grand dans l’humilité, n’hésitant pas à dénoncer et à porter généreusement des fautes que d’autres ont commises, croyant imiter le Christ. Évidemment ils se donnent le beau rôle en critiquant ainsi, sans en avoir l’air, des Anciens à qui ils doivent beaucoup. Et comment mieux expier qu’en invitant toute la pauvreté du monde ? Plus exactement en faisant inviter par la collectivité nationale (c’est plus confortable financièrement et moins engageant que d’aider le voisin de palier), en tendant les bras de l’État à celui qui cristallise magnifiquement nos insuffisances, notre matérialisme consumériste effréné, l’Émigré, qui devient lui aussi un nouveau Rédempteur souffrant injustement toutes les douleurs du monde.

***

Cependant la réalité est têtue. Pour bien accueillir, pour bien aimer, il faut en avoir les moyens et avant tout être disponible pour l’autre, c’est-à-dire offrir et enseigner un modèle harmonieux où il pourra s’insérer, trouver un nouveau nid, une place qui le consolera de son exil. Mais les Français s’aiment-ils assez pour que cette condition soit réalisée ?

Alors faute de pouvoir apporter une aide efficace et chrétienne à nos frères émigrés, le chrétien à mauvaise conscience va s’acharner à se punir, se flageller, se détruire, en bon pénitent repenti, rayonnant un martyr moderne, pour sauver sa petite âme et gagner son Paradis promis.

Au détriment du salut du prochain.

Pierre Lours
24/06/2020

Source : Correspondance Polémia

Crédit photo : Domaine Public

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