Les analyses n’ont pas manqué depuis des mois pour montrer que le TTIP (Transatlantic Trade and Investment Partnership) était, en corrélation avec son frère, le TPA (transpacifique) une énorme machine de guerre montée par les intérêts financiers et industriels des États-Unis pour imposer une zone de libre-échange mondial où disparaîtront les spécificités des administrations et services publics nationaux ayant jusqu’ici relativement protégé les citoyens contre les abus des multinationales. Inutile de reprendre le procès ici.
« Les électeurs nationaux n’auront rien à dire. Ainsi fonctionne la démocratie en Europe, plus que jamais colonie des États-Unis ».
Or malgré un rejet général de ce projet par les opinions publiques européennes (celles du moins ayant pris la peine de s’informer), nous apprenons le 28/05 qu’avec 28 voix pour et 13 contre, les eurodéputés de la commission « commerce international » ont apporté leur soutien jeudi au projet de traité de libre-échange avec les États Unis en y ajoutant quelques garanties, par exemple sur la protection des données personnelles. Ce compromis, débattu jusqu’à la dernière minute, prépare le terrain à un feu vert en séance plénière, à Strasbourg le 10 juin.
Devant ce qu’il faut bien appeler cette trahison des parlementaires européens, les gouvernements les plus réticents, eux-mêmes travaillés en permanence par les lobbies, n’auront plus qu’à s’incliner. A plus forte raison en sera-t-il des syndicats et mouvements politiques hostiles au traité.
Certes, le texte sur lequel les élus européens ont voté n’est qu’un rapport d’initiative. Il est censé envoyer à la commission de Jean-Claude Juncker – qui négocie en ce moment avec Washington – les « recommandations » des députés. Or comme la Commission est, encore plus que les gouvernements, pénétrée par les lobbies et intérêts transatlantiques, ce ne sera pas d’elle que surviendront des objections, sauf sur des points mineurs. Si bien que les eurodéputés pourront, une fois les négociations terminées entre Bruxelles et Washington, valider ou rejeter le texte final. Le vote de ce jour permet d’anticiper une validation de leur part.
Les électeurs nationaux n’auront rien à dire. Ainsi fonctionne la démocratie en Europe, plus que jamais colonie des États-Unis. On constatera sur cette question que se maintient la complicité des députés européens et de leurs collègues nationaux. Marine Le Pen, pour sa part, n’aurait pas jugé bon d’assister à la séance du Parlement. Pourtant, si le TTIP était ratifié, cela en serait fini des quelques volontés d’indépendance des Européens. Munich avant la Deuxième Guerre mondiale avait montré ce par quoi se paie le renoncement. Mais qui parle de Munich à propos du TTIP et de ses nombreux soutiens en France?
Jean-Paul Baquiast
Source : europesolidaire.eu
29/05/2015