Le président du MODEM exclut que le chef de l’État tire des conséquences gaulliennes, autrement dit honorables, de son propre discrédit et dépose les insignes de sa fonction. Par Dominique Jamet
Non seulement ça ne doit pas durer, mais ça ne peut pas durer. Invité ce dimanche du « Grand rendez-vous Europe 1/Le Monde/i>Télé », François Bayrou n’a fait que refléter une opinion de plus en plus généralement partagée en déclarant ne pas croire que François Hollande « puisse tenir jusqu’en 2017 avec une majorité déchirée ».
C’est le bon sens même. Appuyé sur une « majorité » massivement désavouée par le pays, et dont un nombre croissant de représentants à l’Assemblée s’activent à scier la branche pourrie sur laquelle ils sont assis, le gouvernement de Manuel Valls semble désormais à la merci de la première bourrasque venue, et les bourrasques ne manqueront pas dans les mois qui viennent, qu’elles surgissent par exemple à l’occasion d’un débat parlementaire, qu’elles soufflent en tempête de Bruxelles ou qu’elles résultent des deux nouveaux désastres électoraux promis au P.S. en 2015.
Pour autant, le président du MODEM, qui peut se targuer d’une solide expérience personnelle en matière de politique et de déconvenues, exclut que le chef de l’État tire des conséquences gaulliennes, autrement dit honorables, de son propre discrédit et dépose les insignes de sa fonction. De fait, François Hollande a affirmé avec une ténacité et une dignité inhabituelles chez lui – la ténacité du bernard-l’ermite incrusté dans sa coquille présidentielle, la dignité de la moule attachée à son bouchot de cinq ans – qu’il ne démissionnerait jamais. Jamais.
Dès lors que les institutions protègent en effet le président contre les intempéries, la seule solution à une crise majeure demeure la dissolution. Donc, à moins d’un changement du mode de scrutin, des élections législatives, toujours selon Bayrou, se traduiraient forcément par la victoire de la coalition de la droite et du centre républicain constituée sous l’égide du président de l’UMP. La logique et l’usage amèneraient alors le président de la République, contraint à la cohabitation, à faire appel au chef du parti le plus important de l’opposition devenue majorité. Tout cela est d’une grande logique.
Ici, le dormeur le plus solide, brutalement tiré du sommeil le plus profond, se réveille baigné de sueur et se dresse sur son séant. Hollande et Sarkozy, Sarkozy et Hollande, le président battu en 2012, le président rejeté de 2014, les deux hommes les plus impopulaires de France, le duo de clowns méchants porté par l’effet de mécanismes implacables à la tête d’un pays qui ne veut ni de l’un ni de l’autre et qui se retrouverait avec les deux, tel est le scénario à faire frémir dont François Bayrou, un monsieur si raisonnable, dessinait avant-hier les grandes lignes. L’ancien candidat centriste ne marche pas sur les traces de Prévert et Carné, d’Aurenche et Bost, de Michel Audiard, de Jacques Demy ou de Claude Sautet. Pour ses débuts dans le cinéma, François Bayrou ne s’est inspiré ni des Enfants du paradis, ni des Tontons flingueurs ni des Demoiselles de Rochefort. Il fait dans l’épouvante, il fait dans le gore, il nous propose un remake du Retour des morts vivants. Au secours !
Dominique Jamet
Source : Boulevard Voltaire
27/10/2014