Périodiquement, l’Éducation nationale annonce des réformes visant à étendre l’autonomie des établissements scolaires. Mais cette « autonomie » ne peut aujourd’hui s’exercer que dans le cadre contraint de la prétendue « refondation », c’est-à-dire destruction de l’institution scolaire, appelée à occuper les enfants plus qu’à les instruire.
La véritable autonomie supposerait une quadruple liberté de choix : des parents, des élèves, des professeurs et des établissements scolaires. Une vraie révolution qui a été proposé aux journées de Béziers. Claude Meunier-Berthelot fait ici le point pour Polémia en posant une simple question : dans le système actuel à quoi peut bien servit l’autonomie des établissements scolaires ?
Polémia
L’autonomie des établissements scolaires est, aujourd’hui, brandie par certains comme la panacée à tous les maux dont souffre l’Éducation nationale, comme si les dérèglements de l’institution scolaire ne résultaient que d’un centralisme outrancier.
Il est vrai qu’à force de saucissonner les problèmes – et ce saucissonnage sert les gouvernements qui s’y emploient avec un zèle inégalé ! – la vue d’ensemble se perd à l’horizon et conduit à énoncer des contre-vérités.
Boite de Pandore
En réalité, cette autonomie – prétendûment revendiquée mais déjà acquise – n’est qu’une « boîte de Pandore » qui permet de répandre tous les maux générés par les réformes successives et concertées de la multitude de ministres qui se sont succédé à la tête de l’Éducation nationale, réformes ayant constitué autant d’étapes dans la mise en œuvre de la Grande Réforme révolutionnaire issue du plan Langevin-Wallon de 1947 et qui – ne l’oublions pas – pourrissent également ses satellites, écoles privées dites « sous contrat ».
Bien s’entendre sur son impact…
Certes, si l’indépendance peut être propre à libérer des lourdeurs administratives liées à la centralisation des décisions, il ne faut pas pour autant assimiler l’autonomie des établissements publics à une libération du joug de ceux qui règnent en maîtres sur l’Éducation dite nationale depuis des lustres et, en conséquence, l’assimiler à celle des écoles privées hors contrat pour prétendre qu’ainsi, l’efficacité peut être mieux assurée.
C’est exactement l’inverse qui se produit dans le système éducatif aujourd’hui dévoyé, car cette autonomie ne signifie pas pour autant liberté de choisir – en particulier de changer la trajectoire de la refondation-destruction de l’institution scolaire – et donc, il n’est pas davantage question d’ amélioration de la qualité des prestations.
Obligation de moyens
En effet, dans un contexte de véritable institution scolaire où existe la volonté d’instruire le plus et le mieux possible, l’autonomie des établissements est au service de la liberté et d’une obligation de résultat pré-déterminé, sans obligation de moyens, l’organisation administrative et pédagogique étant laissé à la discrétion de chaque responsable d’établissement et de son équipe pédagogique : tel est le cas des établissements privés dits « hors contrat », et c’est ce qui permet d’obtenir de bons résultats.
Dans le système éducatif aujourd’hui dévoyé, c’est exactement l’inverse qui se produit : l’autonomie des établissements est au service de la destruction de l’institution scolaire, instaurant une obligation de moyens mais sans obligation de résultat pré-déterminé, s’agissant de supprimer les cours, de ne plus assurer de transmission de savoirs et de laisser les élèves construire leur savoir à partir d’une multitude d’activités de loisirs et d’endoctrinement aux valeurs dites de la république.
Ces activités, dont le vide intellectuel est patent et dont les principes iniques sont travestis sous un langage ésotérique qui puisse permettre de leur conférer un semblant de légitimité, ainsi de l’« enseignement pratique transdisciplinaire dérogatoire », de « interdisciplinarité », du « projet personnel de réussite éducative » etc. – ne sont, en réalité, que miroirs aux alouettes.
Passage obligé de la destruction de l’institution scolaire
Pour réaliser ces activités – « activités périscolaires » désormais généralisées à l’école primaire, « éducation civique et morale » au collège, « éducation artistique et culturelle » en lycée – chaque établissement doit et ne peut qu’agir en partenariat avec l’environnement institutionnel et « culturel » (au sens large) local. Il ne peut donc pas être question de centralisme de décision pas plus que d’exigences de résultats.
À cela s’ajoute le fait que s’opère aujourd’hui, un grand remplacement du personnel enseignant par du personnel sans qualification, sans compétences spécifiques pour enseigner – « emploi-avenir-professeur », « contrat de service civique », « réserve citoyenne »… – afin d’accompagner cette politique éducative et sans risque pour le système, qu’un véritable enseignement soit dispensé.
Conclusion
Dans ces conditions, l’autonomie des établissements n’est en réalité que le passage obligé de la révolution de l’institution scolaire et l’un des masques de son anéantissement.
Claude Meunier-Berthelot
Correspondance Polémia – 21/06/2016
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