Texte de l’Introduction au Forum de la dissidence du 18 novembre 2017, par Michel Geoffroy ♦ Les commentateurs bien-pensants répètent en boucle qu’Emmanuel Macron aurait recomposé la vie politique française en dépassant le clivage gauche/droite. Ce mantra nous est assené depuis le premier tour de l’élection présidentielle. Mais ce mantra ne correspond pas à la réalité.
Emmanuel Macron n’est pas ni de gauche ni de droite : il est au contraire les deux à la fois. En même temps. Mais encore faut-il préciser ce que recouvrent ces deux termes désormais.
Emmanuel Macron incarne en effet l’aboutissement d’un double ralliement, d’une double convergence, qui a mis 30 ans à se concrétiser dans notre pays : le ralliement des socialistes au néo-capitalisme, d’une part, et le ralliement suicidaire de la droite institutionnelle à l’idéologie sociétale de la gauche, d’autre part.
Le Parti socialiste est-il, une nouvelle fois, moribond ? Mais comme le papillon doit abandonner sa chrysalide pour s’envoler, en réalité la gauche n’a pas disparu en 2017 mais elle s’est renouvelée : sous la forme d’une Nouvelle Gauche qui renouvelle le vieux progressisme. Car le progressisme se décline désormais dans l’accueil des immigrants, dans le sans-frontiérisme, dans la déconstruction sociétale, dans le féminisme agressif, dans l’écologie punitive et, surtout, dans le ralliement sans complexe à l’ultra-libéralisme et à la loi de l’argent.
Et cette Nouvelle Gauche recycle à la fois les politiciens socialistes et ceux qui, chez les Républicains, se prétendaient de droite mais qui adhéraient en réalité à l’idéologie de la gauche.
Emmanuel Macron achève ainsi ce qui a été commencé en 1983, avec le virage dit « de la rigueur », sous François Mitterrand, c’est-à-dire le ralliement définitif de la gauche de gouvernement au néo-capitalisme libéral/libertaire. Une gauche qui, pour cette raison, n’est plus sociale mais désormais sociétale.
De même Emmanuel Macron n’a pas tué la droite, même s’il a profité – c’est le moins que l’on puisse dire – de l’orchestration du Pénélopegate contre François Fillon : car la droite n’a pas eu besoin de lui pour se suicider, malheureusement.
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Revenons en effet sur le suicide de la droite.
Le suicide de la droite institutionnelle s’est concrétisé symboliquement le 23 avril 2017 à 20h03 lorsque François Fillon, « le candidat de la droite et du centre », a immédiatement appelé à voter pour Emmanuel Macron, au soir de son échec du premier tour de la présidentielle. Comme la droite nationale s’est suicidée le 3 mai dernier lors du débat télévisé opposant Marine Le Pen à Emmanuel Macron.
De quoi donc ces deux composantes politiques de la droite française sont-elles mortes ?
La droite institutionnelle est morte parce qu’elle a trahi son héritage et ses valeurs. Et la droite nationale est morte parce qu’elle s’est trompée à la fois d’époque et de stratégie.
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Le suicide de la droite institutionnelle a été initié en 1986 par Jacques Chirac, avec la cohabitation.
Car la cohabitation politicienne de l’opposition de droite d’alors avec le président socialiste François Mitterrand a débouché sur une connivence, puis sur une soumission de la droite institutionnelle au politiquement correct, c’est-à-dire à l’idéologie de la gauche.
Cette attitude a conduit la droite à se soucier davantage de l’opinion de la médiacratie et des lobbies que de ses valeurs et des attentes de son électorat.
La droite institutionnelle n’a alors cessé, d’abord, de renier son héritage national et gaullien, puis de tromper son électorat en permanence. Car cette droite est devenue éolienne, tournant vers la gauche à chaque nouveau vent médiatique. Elle promettait, bien sûr, lors des campagnes électorales, de revenir sur les réformes sociétales de la gauche, mais, ensuite, une fois élue, elle n’en faisait rien. Elle est ainsi devenue une droite d’impuissance gouvernementale parce que tétanisée par sa soumission au politiquement correct.
Au cours de ces 30 dernières années de reniement, la droite institutionnelle a donc perdu ses soutiens et, finalement, ses électeurs.
Elle a notamment perdu les classes moyennes et populaires autochtones, qui sont les principales victimes des politiques économiques libre-échangistes qu’elle a conduites et du chaos migratoire qu’elle a installé et qu’elle s’est montrée incapable de réguler, malgré ses promesses réitérées à chaque campagne électorale.
Mais la droite institutionnelle a aussi perdu les classes dirigeantes qui se sont ralliées à Emmanuel Macron et qui lui ont fait gagner la présidentielle de 2017.
Car la France d’en haut a renoué – dans les années 1990 – avec l’esprit tortueux des bourgeois des Lumières, c’est-à-dire des bourgeois aimant l’argent, anglophiles, libéraux en économie, oublieux de la décence commune, hostiles aux droits du travail, amoureux du genre humain mais grands contempteurs de Français.
François Hollande, si l’on en croit son ancienne compagne, raillait les Sans Dents de la France d’en bas. Mais il avait encore la décence de le faire en privé. Emmanuel Macron, lui, ne se gêne plus pour se gausser publiquement des ouvrières selon lui illettrées de l’entreprise GAD (1), des gens de rien (2) que, selon lui, on rencontrerait dans les gares ou bien encore des prétendus fainéants, cyniques et, bien sûr, extrémistes (3) qui douteraient de ses réformes (4).
On ne saurait mieux illustrer l’arrogance de cette nouvelle bourgeoisie des Lumières version bobo, qui parle des Français à la troisième personne comme s’il s’agissait d’une espèce qui lui est définitivement étrangère.
Aujourd’hui la droite institutionnelle n’existe plus en tant qu’expression politique. C’est un « astre mort », pour reprendre les mots du député du Vaucluse Julien Aubert (5). Non pas parce que le clivage gauche/droite aurait perdu sa raison d’être. Non pas à cause du génie politique prétendu d’Emmanuel Macron. Mais tout simplement parce que la droite institutionnelle a perdu toute identité propre face à une gauche qui, de son côté, s’est ralliée à l’ultra-libéralisme mondialiste.
Face à cette Nouvelle Gauche, la droite institutionnelle n’a plus rien à objecter, pour la raison principale qu’elle lui ressemble désormais en tout.
Et c’est bien pourquoi elle est aujourd’hui une opposition aphone.
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La droite nationale, derrière Marine Le Pen, n’a malheureusement pas su profiter, à la différence d’Emmanuel Macron, de ce déclin historique de la droite institutionnelle.
Si le Front national a su s’affirmer comme une force protestataire, il n’est pas apparu en 2017, une nouvelle fois, comme une force d’alternance crédible.
Pourquoi ? Parce que Marine Le Pen et son équipe, au-delà d’une attitude partisane sans doute trop monolithique, se sont, hélas, trompés à la fois d’époque et de stratégie.
- D’abord leur quête de dédiabolisation les a conduits à mettre en sourdine leur positionnement identitaire au moment même où l’opinion émettait des attentes de plus en plus fortes en la matière parce que le choc des civilisations devenait de plus en plus manifeste en Europe. Une totale faute de concordance des temps, donc !
- Ensuite, dans le vain espoir de récupérer l’électorat de Jean-Luc Mélenchon, ils ont accentué une ligne économique sociale-démocrate qui a fait l’effet d’un répulsif sur son électorat de droite.
- Enfin, ils se sont enfermés dans la voie sans issue du souverainisme nostalgique, incarnée dans le projet anxiogène de sortie de l’euro, comme si, au surplus, une politique monétaire pouvait faire l’objet d’une annonce électorale !
C’était aussi une erreur de temporalité. Car nous ne sommes plus en 1950 mais dans un monde désormais multipolaire, où seuls les grands blocs économiques, militaires et culturels auront la parole. Pas les petites régions folkloriques !
Le Front national n’a donc pas profité de l’exceptionnelle conjoncture politique qui s’offrait à lui en 2017, avec le rejet des partis institutionnels. Parce qu’il n’a pas apporté la preuve qu’il se situait à la hauteur des enjeux auxquels notre pays et l’Europe se trouvent confrontés. Comme Marine Le Pen n’a malheureusement pas donné le sentiment, personnellement, d’être à la bonne hauteur présidentielle lors de son débat télévisé avec Emmanuel Macron, le 3 mai 2017.
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Aujourd’hui, l’expression politique de la droite est en coma profond. Mais ne la regrettons pas !
Car les compromissions ou les fautes de ses dirigeants successifs ont, non seulement conduit au suicide de la droite, mais ces derniers ont surtout livré notre pays aux oligarchies qui ont pour projet de déconstruire la France, de livrer l’Europe à l’Islam et de mettre les Européens en servitude.
La responsabilité historique des politiciens de droite dans cette catastrophe est donc écrasante et les électeurs les ont à juste titre sanctionnés en 2017.
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Cependant, il serait stérile de disserter à l’infini sur les occasions perdues. L’histoire ne repasse pas les plats ! Il s’agit maintenant de reconstruire au milieu des ruines.
Tel est l’objet du Forum d’aujourd’hui.
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Mais pourquoi ce titre : « Face à Macron, une bonne droite » ?
D’abord, parce que la Nouvelle Gauche Macron n’avance que grâce au vide laissé par la disparition de toute expression politique de la droite, tombée en sédation profonde d’avoir perdu en 2017 l’élection présidentielle imperdable.
Ce vide politique à droite est paradoxal car la droite reste une réalité vivante dans notre pays et dans notre peuple. Toutes les études d’opinion montrent d’ailleurs qu’une majorité de nos concitoyens expriment des préférences à rebours du politiquement correct officiel.
Mais alors qu’est-ce qu’une « bonne droite » ?
C’est la droite qu’attend désespérément le peuple français : une droite de résistance et d’opposition, pour contrer l’entreprise de déconstruction de la Nouvelle Gauche sociétale et libérale/libertaire.
Mais c’est aussi et par conséquent une droite différente de celle que nous avons connue : une droite nouvelle qui soit à l’écoute de notre peuple et qui porte aussi un véritable projet alternatif à celui de la Nouvelle Gauche.
La droite est désormais l’espoir du peuple pour la raison que la Nouvelle Gauche sociétale l’a abandonné. Et parce que l’idéologie libérale/libertaire conduit à la disparition des peuples européens. C’est pourquoi la droite est aussi l’espoir de tous les Européens.
Contrairement à ce qu’on entend dire, le clivage gauche/droite n’a donc pas disparu : il a seulement changé de contenu.Il n’oppose plus, comme au XXe siècle, les collectivistes aux défenseurs de la propriété privée des moyens de production. Il oppose désormais
– les libre-échangistes, les mondialistes, les libertaires, les déconstructeurs et les immigrationnistes,d’une part, qui constituent la Nouvelle Gauche ;
– aux défenseurs de l’identité, de la liberté des peuples européens, comme du respect des cultures et de la multipolarité du monde, d’autre part, et qui constituent le nouveau positionnement de la Bonne Droite.
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Il ne faut pas se cacher que le chemin de la Bonne Droite et donc de la renaissance de notre pays et de notre civilisation sera long et difficile, et qu’il faudra du courage et de la détermination pour le parcourir :
– D’abord, parce que les forces qui correspondent à ce nouveau positionnement, à cette nouvelle attitude de la Bonne Droite, sont aujourd’hui éclatées en mille chapelles et qu’elles ne savent pas encore jouer collectif, à la différence de la Nouvelle Gauche ;
– Ensuite, la reconquête sera longue et difficile parce que l’Europe occidentale est beaucoup plus décadente que l’Europe orientale, comme le démontre par exemple son incapacité à répondre au défi migratoire et islamiste ;
– Enfin, la reconquête sera longue et difficile parce que le Système ne recule devant rien pour museler l’opposition des autochtones. En particulier en s’attaquant chaque jour un peu plus aux libertés publiques, à la liberté d’opinion comme à la liberté d’expression, et en renforçant sans cesse la censure et la répression judiciaire des opposants, conformément à ce qui a été décidé lors du Forum de Davos de janvier 2017.
Car il est dans la nature profonde de l’idéologie libérale/libertaire de déboucher sur la tyrannie.
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« Je ne céderai rien » a prévenu Emmanuel Macron (6). Jupiter croit sans doute nous impressionner.
A notre tour, donc, de ne rien céder à cette Nouvelle Gauche arrogante, totalitaire et décadente qui nous conduit au chaos.
A droite, l’heure n’est plus à la nostalgie, mais à l’action. L’heure n’est plus aux querelles de sensibilités, mais à l’union sur l’essentiel.
Comme l’heure n’est plus à la soumission au politiquement correct, mais à la liberté de pensée et à la prise de parole.
La Droite impuissante est moribonde ?
Vive le peuple de droite ! Vive la dissidence ! Vive la bonne Droite !
Michel Geoffroy
18/11/2017
Notes :
- Ouest France du 17 septembre 2017.
- «Une gare, c’est un lieu où on croise des gens qui réussissent et des gens qui ne sont rien», a affirmé Emmanuel Macron à la Halle Freyssinet, Le Figaro du 3 juillet 2017.
- A l’Ecole française d’Athènes le 8 septembre 2017.
- A Bucarest le 24 août 2017.
- LeFigaro.fr du 2 octobre 2017.
- A l’Ecole française d’Athènes le 8 septembre 2017.
Correspondance Polémia – 18/11/2017
https://twitter.com/_polemia/status/931816575098871808
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