Entretien réalisé par Breizh-Info ♦ Jean-Yves Le Gallou, fondateur de Polémia, est devenu il y a quelques mois soutien d’Éric Zemmour. On lui doit notamment le concept de remigration – le rapatriement d’immigrés extra-européens dans leur pays d’origine. À quelques jours d’une élection présidentielle importante, Yann Vallerie, rédacteur en chef de Breizh-Info l’a interrogé pour savoir comment il a vécu, de l’intérieur, la campagne, mais aussi pour connaitre son regard sur la situation politique, en France, à l’internationale, entre violence politique, guerre en Ukraine ou encore scandale McKinsey.
Entretien, comme d’habitude, sans langue de bois.
Breizh-info.com : Tout d’abord, qu’est-ce qui vous a amené à vous investir dans la campagne présidentielle aux côtés d’Éric Zemmour, vous qui aviez quitté la politique politicienne pour la métapolitique ?
Jean-Yves Le Gallou : La politique ne se réduit pas au combat électoral mais le combat électoral en fait partie.
Et la métapolitique a un double lien avec la politique : par les idées qu’elle diffuse au sein du monde politique (comme elle en diffuse dans les mondes intellectuels, culturels et économiques) ; et à travers les idées que les hommes politiques eux-mêmes reprennent (ou pas) et contribuent ainsi (ou pas) à diffuser
La politique et la métapolitique ne sont pas des mondes étanches.
Prenons un exemple : une femme politique qui par crainte du politiquement correct des médias et de ses adversaires nie le constat du Grand Remplacement fait reculer la prise de conscience et sert – consciemment ou non – l’invasion migratoire et les pouvoirs qui la mettent en œuvre. A contrario un candidat plus disruptif qui « dit ce qu’il voit, et ce qui est plus difficile encore voit ce qu’il voit » (Péguy) fait avancer les choses dans la bonne direction.
Vous avez compris pourquoi Eric Zemmour me paraît préférable à Marine Le Pen.
Breizh-info.com : Quelles sont les idées qu’Éric Zemmour défend que vous jugez essentielles ?
Jean-Yves Le Gallou : C’est davantage une question de priorités que de propositions. De projet que de programme. De stratégie que de tactique.
Priorités, projet, stratégie sont clairs chez Zemmour : il inscrit son combat électoral dans une seule perspective « que la France reste la France », c’est à dire un peuple de civilisation européenne et chrétienne. Refusant l’islamisation et l’africanisation. Prônant la remigration : 1 million d’étrangers de moins en cinq ans au lieu de 2 millions de plus, cela changerait sacrément les choses ! Et comment imaginer que celles qui n’ont pas le courage de nommer les faits aujourd’hui auraient le courage d’agir demain ?
Breizh-info.com : Comment avez-vous vécu la campagne électorale en France ? Il semblerait que le débat, cette notion pourtant majeure de la Civilisation européenne, ait disparu au profit de la violence politique, de l’anathème, de la « bulle individuelle ». Qu’en dites-vous ?
Jean-Yves Le Gallou : Tout l’art d’une campagne électorale est d’imposer ses thèmes dans le débat.
Eric Zemmour a imposé l’immigration et le Grand Remplacement. Il a aussi fort bien parlé d’instruction et de transmission.
Ses adversaires et les médias ont mis en avant :
- le feuilleton Covid,
- le pouvoir d’achat, vrai sujet mais qui se prête à toutes les démagogies : entre le président qui ouvre le chéquier et les oppositions qui se livrent au concours Lépine de la mesure la plus démagogique,
- et enfin la guerre russo-ukrainienne, propice à la manipulation de l’opinion à travers des images émotionnelles.
Breizh-info.com : Quel regard portez-vous sur les évènements qui se déroulent en Ukraine ? Au-delà de la guerre, ne sont-ce pas les conséquences terribles pour l’Occident, économiquement, qui devraient nous inquiéter ?
Jean-Yves Le Gallou : De Gaulle avait rêvé d’une Europe de l’Atlantique à l’Oural. Et privée de matières premières l’Europe aurait dû nouer un partenariat stratégique avec la Russie : « Paris, Berlin, Moscou » est une logique qui aurait pu prévaloir dans les années 2000. L’occasion a été manquée. C’est la géopolitique de Brezinski qui s’impose, opposant le monde atlantique (Etats-Unis et Europe occidentale) au monde orthodoxe et à la Russie. De l’autre côté la Russie a rallié la géopolitique eurasiste de Douguine. C’est à la charnière de ces mondes qu’ont eu lieu, hier, les guerres dans l’ex Yougoslavie et aujourd’hui en Ukraine. Cette guerre fratricide est profondément triste : des jeunes Européens meurent pour leur patrie respective alors que le pouvoir « woke » de Zelenski s’appuie sur les poitrines des nationalistes pendant que la Russie de Poutine utilise ses milices tchétchènes contre ses frères slaves.
L’Europe sortira de cette guerre plus affaiblie que jamais et dépendante pour ses approvisionnements en énergie des États-Unis et des pays arabo-musulmans. Le licol américain va se resserrer. Avec le « wokisme » qui l’accompagne…
Breizh-info.com : Les élections seront terminées, en juin. Avec à la clé possiblement de grosses déceptions pour ceux qui auraient tout misé sur le jeu électoral. On voit notamment qu’Emmanuel Macron semble tout de même bien parti pour être réélu, avec possiblement derrière une large majorité parlementaire. Du coup, que se passe-t-il après, dès demain ?
Jean-Yves Le Gallou : Une fois n’est pas coutume, je vais citer Jacques Chirac : « C’est à la fin de la foire qu’on compte les bouses ». Il est encore tôt pour tirer les conséquences de la séquence électorale. Reste que la puissance de l’appareil de propagande pour contrôler les esprits et influencer les votes est impressionnante. Notons toutefois que cet appareil de propagande exerce sa tyrannie dans tous les domaines de la vie sociale : entreprise, école, culture, sport. Nous vivons dans une Société-de-Propagande. Thème sur lequel je vais prochainement revenir.
Droite, gauche, extrême centre et présidentielle. Entretien avec Jean-Yves Le Gallou
Breizh-info.com : Quels sont les prochains évènements de la fondation Polémia que vous animez ?
Jean-Yves Le Gallou : Nous organiserons un forum de la dissidence le samedi 3 décembre. Il pourrait s’agir d’un décryptage des sondages, de leur rôle dans l’analyse mais aussi dans le formatage de l’opinion. Je ne pense pas seulement ici aux sondages électoraux mais à tous ceux qui sont mis en avant avec des questions souvent biaisés pour faire changer l’opinion des citoyens et des consommateurs. Le sondage est un instrument de l’ingénierie sociale.
Breizh-info.com : Vous avez longtemps travaillé dans une inspection générale interministérielle que pensez-vous de l’affaire Mac Kinse.
Jean-Yves Le Gallou : Au-delà des péripéties (les doublons, les conflits d’intérêt, le coût pour le contribuable, l’évasion fiscale), je crois que le scandale Mac Kinsey est significatif d’un basculement des élites françaises : malgré bien des imperfections, les grands corps de l’Etat, issus de l’X et de l’ENA s’inscrivaient dans une logique de service public ou l’Etat restait un instrument au service de la puissance française ; la logique des cabinets conseils qui recrutent aussi leurs cadres dans les grandes écoles scientifiques ou de commerce est différente : il s’agit de « moderniser » l’administration et la France, sous-entendu de les adapter à la mondialisation marchande et de démanteler leurs structures identitaires. Et au passage d’en tirer profit : l’objectif d’un cabinet conseil ce n’est pas le bien commun c’est le bonus de ses « partners », de ses associés, quitte à en redistribuer un peu à ses collaborateurs.
C’est vraiment un changement de paradigme. Qui a débuté lorsque Sarkozy a lancé la Revue générale des politiques publiques (RGPP), qui s’est poursuivi sous Hollande avec la modernisation de l’administration publique (MAP) et à qui Macron a donné encore plus d’ampleur. Mais enfin de Sarkozy à Macron, il y a une grande continuité : le ralliement de l’un à l’autre est finalement cohérent.
Propos recueillis par Yann Vallerie pour Breizh-Info
08/04/2022
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