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Jean Arthuis : 7 bonnes raisons de s’opposer au traité de libre-échange transatlantique

Jean Arthuis : 7 bonnes raisons de s’opposer au traité de libre-échange transatlantique

par | 13 avril 2014 | Économie

Jean Arthuis : 7 bonnes raisons de s’opposer au traité de libre-échange transatlantique

« En définitive, dans cette négociation, l’Europe s’avère avoir peur de défendre nos intérêts. »

Bien que partisan de l’Europe, le sénateur centriste Jean Arthuis s’oppose fermement au traité de libre-échange transatlantique actuellement négocié par les États-Unis et les autorités européennes. Il expose ici les dangers que ferait peser cet accord sur la France et sur l’Europe.

C’est une chose de vouloir abaisser les barrières tarifaires et faire converger les réglementations, pour accroître le commerce et les investissements de part et d’autre de l’Atlantique. C’en est une autre de laisser Washington piétiner les intérêts européens sans avoir le courage de les défendre avec fermeté. C’est pourquoi, bien qu’issu d’une famille politique traditionnellement favorable au libre-échange et à l’alliance atlantique, je suis contre l’Accord transatlantique de libre-échange actuellement négocié par les États-Unis et les autorités européennes.

À cela, sept raisons précises et concrètes.

Premièrement

je m’oppose à l’arbitrage privé des litiges entre États et entreprises. Demain, suivant la proposition des États-Unis, une entreprise s’estimant lésée par la décision politique d’un gouvernement pourrait y recourir. Une telle procédure est rigoureusement contraire à l’idée que je me fais de la souveraineté des États.

Je m’oppose à la signature d’un accord avec une puissance qui espionne massivement et systématiquement mes concitoyens européens, ainsi que les entreprises européennes.

Deuxièmement

je m’oppose à toute remise en cause du système européen des appellations d’origine. Demain, suivant la proposition des États-Unis, il n’y aurait plus qu’un registre non contraignant, et uniquement pour les vins et spiritueux. Une telle réforme tuerait nombre de productions locales européennes dont la valeur repose sur leur origine certifiée.

Troisièmement

je m’oppose à la signature d’un accord avec une puissance qui espionne massivement et systématiquement mes concitoyens européens, ainsi que les entreprises européennes. Les révélations d’Edward Snowden sont à cet égard édifiantes. Aussi longtemps que l’accord ne protège pas les données personnelles des citoyens européens et américains, il ne saurait être signé.

Quatrièmement

les États-Unis proposent un espace financier commun transatlantique, mais ils refusent catégoriquement une régulation commune de la finance, de même qu’ils refusent d’abolir les discriminations systématiques faites par les places financières américaines à l’encontre des services financiers européens. C’est vouloir le beurre et l’argent du beurre: je m’oppose à cette idée d’un espace commun sans règles communes et qui maintiendrait les discriminations commerciales.

Cinquièmement

je m’oppose à la remise en cause de la protection sanitaire européenne. Washington doit comprendre une fois pour toutes que nonobstant son insistance, nous ne voulons dans nos assiettes ni des animaux traités aux hormones de croissance, ni de produits issus d’OGM, ni de la décontamination chimique des viandes, ni de semences génétiquement modifiées, ni d’antibiotiques non thérapeutiques dans l’alimentation animale.

Sixièmement

je m’oppose à la signature d’un accord s’il n’inclut pas la fin du dumping monétaire américain. Depuis la suppression de la convertibilité-or du dollar et le passage au système des changes flottants, le dollar est à la fois monnaie nationale étasunienne, et unité principale de réserve et d’échanges dans le monde. La Réserve fédérale pratique donc sans cesse le dumping monétaire, en agissant sur la quantité de dollars disponible pour favoriser les exportations des États-Unis. La suppression de cet avantage déloyal suppose, comme le propose la Chine, de faire des «droits de tirage spéciaux» du FMI la nouvelle monnaie mondiale de référence. En termes de compétitivité, l’arme monétaire a le même effet que les droits de douane.

Septièmement

au-delà du seul secteur audiovisuel, étendard de l’actuel gouvernement qui sert de cache-sexe à sa lâcheté sur tous les autres intérêts européens dans la négociation, je veux que toute l’exception culturelle soit défendue. Notamment, il est inacceptable de laisser les services numériques naissants d’Europe se faire balayer par les géants américains tels que Google, Amazon ou Netflix. Géants, maîtres absolus en optimisation fiscale, qui font de l’Europe une «colonie numérique».

En définitive

dans cette négociation, l’Europe s’avère avoir peur de défendre nos intérêts.

D’ores et déjà, à l’approche des élections européennes, les deux extrêmes font leur miel des lâchetés des autorités européennes dans la négociation avec Washington. Leur europhobie ne saurait se nourrir plus longtemps de notre manque de courage politique. Il est grand temps que la classe politique républicaine, avec calme, responsabilité et sang-froid, dise non à l’Accord transatlantique.

Or, elle seule en a la force et l’envergure. Plutôt qu’une Europe timorée, inféodée, c’est cette Europe de courage et de fermeté que j’entends défendre. Du reste, cette voie du courage est le seul chemin pour un accord véritablement équitable de libre échange.

 Jean Arthuis
Source : lefigaro.fr
10/04/2014

Jean Arthuis a été ministre de l’Économie et des finances, il est tête de liste UDI-MoDem « Les Européens » en Bretagne, Pays de la Loire, Poitou-Charentes.

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