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Immigration dans l’UE en 2021 : plus de demandes d’asile, moins d’expulsions

Immigration dans l’UE en 2021 : plus de demandes d’asile, moins d’expulsions

par | 5 juillet 2022 | Europe, Société

Immigration dans l’UE en 2021 : plus de demandes d’asile, moins d’expulsions

Par Paul Tormenen, juriste et spécialiste des questions migratoires ♦ Eurostat, le service de statistique de l’Union européenne, vient de publier les premiers chiffres de l’immigration issue de pays tiers dans l’Union européenne en 2021. Bien que partielles, les informations disponibles font ressortir que, si la crise sanitaire semble derrière nous, la crise migratoire ne cesse de s’amplifier. Plus inquiétant encore, alors que le nombre de franchissements clandestins des frontières extérieures de l’UE a fortement augmenté, les refus d’entrée sur le territoire de l’UE et les expulsions ne font que baisser depuis 2010.

Un panorama partiel

Les informations mises en ligne sur le site d’Eurostat ne permettent pas à ce jour de dresser un panorama complet de l’immigration issue de pays tiers (extérieurs à l’UE) dans l’Union européenne en 2021. En effet, les statistiques concernant l’immigration légale, tant en matière de flux (nombre de nouveaux titres de séjour délivrés, etc.) que de stock (nombre de ressortissants de pays tiers dans chaque pays européen) ne sont pour l’année 2021 pas encore disponibles. Seuls les chiffres de l’asile et de l’immigration clandestine ont été mis en ligne par le service de statistique de l’Union européenne.

Des demandes d’asile en forte hausse en 2021

Après une baisse ponctuelle en 2020, les demandes d’asile déposées dans les pays de l’Union européenne sont reparties fortement à la hausse en 2021. L’année dernière, 535 000 personnes ont déposé une demande d’asile dans les différents pays de l’Union européenne. Ce nombre est en progression de 118 000 par rapport à 2020. Il faut ajouter à ces chiffres les 86 500 nouvelles demandes d’asile déposées en 2021 par des migrants en ayant formulé une précédemment.

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Les Syriens, les Afghans et les Irakiens comptent pour 40 % des demandes d’asile déposées dans les pays de l’UE. Le demandeur d’asile est surtout un homme (à 69 %), âgé de moins de 35 ans (à 80 %).

Les principales destinations des primodemandeurs d’asile sont l’Allemagne (148 200 premières demandes), la France (103 000) et l’Espagne (62 100). Le nombre de premières demandes d’asile en France indiqué par Eurostat apparaît sous-estimé car il ne reprend pas les 24 700 déposées hors guichet unique (GUDA) annoncées par le ministère de l’Intérieur français en début d’année 2022.

En 2021, 521 000 décisions ont été rendues en première instance dans l’UE à la suite d’une demande d’asile et 197 000 à la suite d’un recours. La France a rendu le plus grand nombre de décisions (137 000), suivie de très loin par l’Allemagne (80 600).

En première instance, 112 100 personnes ont obtenu le statut de réfugié, 63 000 la protection subsidiaire et 27 100 personnes ont obtenu un titre de séjour pour raison humanitaire.

La France a donné une réponse positive à 15 % des demandes d’asile en première instance instruites en 2021 et la protection subsidiaire à 10 % des demandeurs. Le constat à tirer de ces chiffres est clair : tant en France que dans les autres pays de l’UE, la grande majorité des demandes d’asile a été jugée injustifiée.

Les recours formés par les demandeurs d’asile déboutés ont permis en 2021 à 22 100 d’entre eux d’obtenir le statut de réfugié, à 18 100 d’entre eux la protection subsidiaire et à 24 900 d’entre eux d’obtenir un titre de séjour pour raison humanitaire. En France, le contribuable peut être remercié pour financer l’aide juridictionnelle qui permet de mener à bien nombre de ces procédures.

Le nombre de demandes d’asile en attente de décision était au 31 décembre 2021 particulièrement important en Allemagne (264 400), en France (145 200), et dans une moindre mesure en Espagne (104 000).

Ces chiffres permettent de constater une fois de plus l’attractivité du système d’asile en France, un pays qui, au regard de l’importance de sa population, attire bien plus les migrants que les autres pays européens. Il est vrai que, depuis son élection en 2017, le président de la République française, Emmanuel Macron, a considérablement augmenté les moyens humains et matériels pour faire face à la demande d’asile, ce qui, conjugué à une piteuse politique d’éloignement des déboutés, a entraîné un formidable appel d’air.

L’immigration clandestine en forte hausse

De nombreux signaux montrent que l’immigration clandestine à destination des pays de l’Union européenne est en forte hausse. En 2021, l’agence Frontex a recensé pas moins de 200 000 franchissements illégaux des frontières extérieures de l’Union européenne, soit une augmentation de 57 % par rapport à 2020. Les statistiques des arrivées clandestines dans les pays du sud de l’Europe tenues par le HCR des Nations unies confirment également cette tendance. C’est dans ce contexte que, comme nous allons le voir, plusieurs pays d’Europe de l’Ouest ont choisi de baisser la garde en 2021.

En 2021, l’immigration clandestine vers l’UE en hausse de 57 % !

En 2021, les forces de l’ordre ont dans les différents pays de l’UE interpellé 681 200 personnes en situation irrégulière. L’étranger en situation irrégulière est fréquemment un homme (à 87 % des cas), âgé de 18 à 34 ans (dans 54 % des cas). Les Syriens (79 800), les Algériens (56 800) et les Afghans (52 800) figurent parmi les nationalités les plus représentées parmi les clandestins interpellés en 2021.

La France est le pays qui a, lors de contrôles, interpellé le plus d’étrangers en situation irrégulière sur son territoire (215 000), suivi par la Hongrie (134 100) et l’Allemagne (120 300).

342 000 étrangers en situation irrégulière se sont vu signifier l’ordre de quitter le pays dans lequel ils se trouvaient. Le nombre d’exécution des notifications d’obligation de quitter l’un des pays membres de l’UE est le plus faible depuis… 2010 et s’établit à 82 700.

Si les autorités françaises ont délivré un nombre important d’obligations de quitter le territoire (124 500), soit 37 % des 342 100 OQTF délivrées dans l’UE en 2021, seules 14 390 d’entre elles ont été réellement exécutées.

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En dépit de la forte reprise de l’immigration clandestine, le nombre de refus d’entrée (139 000) dans les pays européens a été en 2021 le plus bas depuis 2010. Ces refoulements ont été prioritairement pratiqués par les autorités hongroises (34 700) et polonaises (26 200). Les Ukrainiens (47 100), les Albanais (18 600) et les Moldaves sont les principales nationalités des personnes qui se sont vu refuser l’entrée dans l’Union européenne. Pourtant, en 2021, c’est par la mer Méditerranée que les clandestins se sont majoritairement acheminés en Europe. Mais il est vrai que, hormis la Grèce, le gouvernement espagnol et le gouvernement italien laissent l’immigration clandestine se pérenniser, au plus grand bénéfice des passeurs et autres trafiquants d’êtres humains.

Au-delà des événements spectaculaires qui ont marqué l’année 2021, comme la crise migratoire provoquée par le gouvernement marocain en mai à Ceuta et celle provoquée par le gouvernement biélorusse en juin à la frontière avec la Pologne et la Lituanie, c’est à bas bruit que l’immigration extra-européenne a progressé tout au long de l’année 2021.

Les statistiques d’Eurostat mettent en exergue que, dans les pays de l’UE, et plus particulièrement dans les pays d’Europe de l’Ouest, l’asile est toujours massivement détourné par des migrants économiques. Autre constat qui ne fait qu’être confirmé d’années en années : les étrangers en situation irrégulière appréhendés par les forces de l’ordre et qui se voient délivrer une obligation de quitter le territoire ne retournent que dans une faible proportion dans leur pays. Plus que jamais, en 2021, les pays d’Europe de l’Ouest sont apparus sans volonté de résister face à la pression migratoire grandissante.

Paul Tormenen
05/07/2022

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