À l’automne 2007, quand nous avons créé le « Bulletin de réinformation » sur Radio Courtoisie, Emmanuel s’est immédiatement proposé pour diriger et former une jeune équipe.
Son emploi du temps était déjà très chargé. Mais l’idée de se lever à 5 heures du matin chaque vendredi lui plaisait. Il fut ainsi l’un des fondateurs du Bulletin de réinformation. Il imprima sa marque à la journée du vendredi dont l’équipe est toujours restée fidèle à l’esprit d’Emmanuel. Et comme on a le gène et la culture de la réinformation chez les Ratier, deux de ses filles ont repris le flambeau : l’une le vendredi et l’autre le mardi.
La réinformation, c’est la vérification et, bien sûr, la critique du flux continu d’informations des médias dominants. C’est aussi la recherche d’informations complémentaires occultées ou plus simplement peu mises en lumière.
Le dévoilement des faits, cœur du métier d’Emmanuel
Le dévoilement des faits était le cœur du métier d’Emmanuel. Notamment avec Faits & Documents, une lettre confidentielle papier qui aurait pu disparaître à l’heure d’Internet et que, pourtant, ses abonnés continuaient de lire avec la plus grande attention :
- pour ses biographies remarquables ;
- pour ses mises au point ;
- pour ses décryptages ;
- pour ses démasquages.
Sans Emmanuel, nous resterions persuadés que le petit Manuel Valls avait souffert de la répression du méchant Caudillo alors que son papa multipliait les expositions de peinture sous Franco.
Sans Emmanuel, nous croirions encore que notre cher premier ministre a « Israël au cœur » depuis l’origine alors que Valls, en tant que maire d’Evry, a multiplié les manifestations pro-palestiniennes…
Bref, Emmanuel a déconstruit Manuel.
Loin du journalisme de cour, Emmanuel illustrait au plus haut point le vrai journalisme d’investigation.
Documentaliste de l’extrême
Bourreau de travail, archiviste minutieux, Emmanuel était un journaliste rigoureux – pardon pour l’oxymore ! Homme indulgent et bienveillant, Emmanuel ne correspondait en rien à la caricature de l’ « extrémiste de droite » à laquelle même ses adversaires du Système avaient renoncé.
Et pourtant Emmanuel était bien un « extrémiste » : un extrémiste dans la recherche des faits, de leur vérification, de leurs sources. Emmanuel était un documentaliste de l’extrême comme il y a – et c’est valorisant – des sportifs de l’extrême !
Il y a quelques années, les candidats bacheliers eurent pour épreuve de philo : « Le vrai est-il toujours vraisemblable ? »
Le vrai est-il toujours vraisemblable… Beau sujet qu’il est possible de décliner : le vraisemblable est-il toujours vrai ? Ce que l’opinion commune estime établi peut-il relever de la pure affabulation bien vendue ? Faut-il croire les narrations officielles des événements ? Mais de petits mensonges et de réelles contradictions suffisent-ils pour qu’on les rejette en bloc ? Et parmi les versions alternatives des événements lesquelles croire ? lesquelles retenir ? Bien malin qui peut le dire !
« C’est dans Faits & Documents, donc c’est exact »
Emmanuel n’apportait pas de réponses philosophiques à ces questions. Mais il portait à la connaissance de ses lecteurs des faits. Et chacune de ses informations était précise et sourcée.
Le doute est inséparable de la démarche de réinformation. Il faut douter des affirmations. Mais il faut aussi douter du doute. Derrière chaque information, des intérêts et des passions se cachent bien souvent. Comment éviter de tomber dans leurs pièges ?
Emmanuel nous a donné des pistes en précisant ainsi sa position « Je ne me considère pas du tout comme complotiste (…) je pense plutôt qu’il y a un système de cercles concentriques, avec des satellites autour qui regroupent des gens puissants ou qui cherchent à avoir plus de pouvoir – et bien sûr, et ça peut paraître une évidence, des groupes de pression et des lobbys. »
C’était la force d’Emmanuel : apporter à ses lecteurs du fait brut, déniché, vérifié, sourcé, mis en perspective. Au point que la phrase « c’est dans Faits & Documents, donc c’est exact » était devenue proverbiale.
Faits & Documents, toujours pillé, jamais cité mais formidable source d’informations pour ses lecteurs.
Regretter le compagnon irremplaçable, poursuivre l’œuvre du combattant
Quand nous avons appris la mort d’Emmanuel dans l’aven d’Orgnac, nous sommes nombreux à avoir jugé la perte irremplaçable.
Comment remplacer le joyeux compagnon qui aimait les plaisirs de la table comme ceux du retour à la nature lors de belles randonnées ?
Comment faire face à la destruction de son cerveau, ordinateur central de sa base de données ?
Comment poursuivre 40 ans de travail insensé, de documentation pointilleuse, de constitution d’un réseau éclectique, assortis d’une crédibilité à toute épreuve ?
Et pourtant c’est en prolongeant son action que nous honorerons sa mémoire.
En faisant vivre le réseau amical qu’il avait constitué.
En enrichissant les Archives du Vexin.
En trouvant les hommes qui continueront Faits & Documents.
En livrant chaque jour la bataille de la réinformation. Avec rigueur.
Il y a une bataille d’opinion formidable aujourd’hui : entre les gros porte-avions des médias de propagande et la flottille de vedettes rapides des médias dissidents.
Soyez confiants ! Comme à la fin de l’ère secondaire, les petits mammifères de la réinfosphère viendront à bout des dinosaures de la propagandosphère !
Avec les réseaux sociaux, chacun d’entre vous peut être acteur. Chacun peut relayer des informations dissidentes. Mais à une condition : c’est qu’elles soient fiables, sourcées, vérifiées. Il y a tellement de faits vrais qui vont dans notre sens qu’il faut se garder de relayer des informations foireuses qui servent ensuite à nous discréditer. Ne relayons pas les bouteillons !
Poursuivre l’œuvre d’Emmanuel c’est rester rigoureux. La réinformation ce n’est pas une désinformation en sens contraire, c’est le contraire de la désinformation.
Sa famille, ses amis proches, tous ceux qui vont poursuivre le travail d’Emmanuel auront besoin de vous : de votre présence, de vos contributions financières, de vos informations, à condition qu’elles soient 5 sur 5, et de vos relais.
Emmanuel a rejoint l’autre monde ! Nous sommes tristes.
Mais je me plais à l’imaginer, au-dessus de Delphes, sur les hauteurs du Parnasse, accueilli par Clio, la muse de l’histoire, et sa sœur Calliope, la muse du bien dire.
Jean-Yves Le Gallou
19/09/2015
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