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Haro sur la musique : une blanche vaut deux noires !

Haro sur la musique : une blanche vaut deux noires !

par | 17 avril 2021 | Europe, Société

Haro sur la musique : une blanche vaut deux noires !

Par Thierry De Cruzy, journaliste ♦ C’est nouveau, la musique a une couleur. Il y aurait trop de Blancs dans la musique classique. Il est vrai qu’une blanche vaut deux noires, tout débutant en solfège le sait. La dernière offensive vient de l’université d’Oxford qui veut « décoloniser » ses cours de musique classique. Elle s’inscrit dans un projet plus vaste qui vise toute la musique européenne.

Les dictionnaires de la musique ne l’expliquent pas, mais la seule écriture musicale connue est celle de la civilisation européenne. Aucune autre civilisation de l’histoire de l’humanité n’a pu concevoir une écriture musicale permettant d’archiver les compositions de ses musiciens. Il existe bien des systèmes comparables aux neumes grégoriens, mais ce ne sont pas des transcriptions de mélodies. Il y a bien eu et il existe de grands musiciens dans toutes les civilisations, mais plus de traces de leurs musiques après leur mort. L’Europe est seule capable de rejouer les œuvres de ses compositeurs. Corollaire, c’est aussi la seule à disposer de grands orchestres. Cette particularité mériterait quelques réflexions.

Elle suscite l’admiration d’une partie de l’humanité sensible au Beau. Barbara Hendricks et Jessye Norman ont été saluées dans le monde entier, pour leur voix, pas leur couleur de peau. On trouve de nombreux musiciens classiques en Asie, le continent qui organise le plus grand nombre de master class. Oubliée l’interdiction du Grand Timonier en 1966 de toutes les musiques occidentales sur le territoire chinois, car elles représentaient « l’impérialisme et le capitalisme ». On en trouve aussi en Amérique du Sud avec le programme El Sistema. En France en septembre dernier, la jeune Vénézuélienne Glass Marcano (24 ans), formée par ce programme, a remporté le concours de chefs d’orchestre La Maestra, réservé aux femmes.

Les Jaunes contre les Noirs ?

Cette musique suscite aussi l’envie de ceux qui sont incapables de s’astreindre à la discipline et la longue formation nécessaires à la maîtrise d’un instrument. Le masochisme semble avoir pris le pas sur l’esprit critique pour conduire l’Occident. Ainsi, répondant aux injonctions de Black Lives Matter, un rapport de l’université d’Oxford, récemment médiatisé, considère que « la musique blanche européenne de la période esclavagiste » (Mozart, Schubert, Beethoven, etc.) cause « une grande détresse aux étudiants de couleur ». Il faudrait leur expliquer ce que fut la vie de ces compositeurs « esclavagistes » : Mozart a terminé dans une fosse commune, Schubert est mort à 31 ans syphilitique et Beethoven devint sourd à la moitié de sa vie.

Le projet vise donc à « décoloniser » le programme musical de l’université britannique. Elle ne fait qu’obéir aux directives de la presse étasunienne : le New York Times accuse la musique classique de masquer « un problème raciste », la National Public Radio observe que ce milieu est « extrêmement blanc et de plus en plus marginalisé » et New Music USA va jusqu’à affirmer que « la musique classique est intrinsèquement raciste ».

Dans la même veine, on avait eu en janvier dernier le trompettiste « racisé » Ibrahim Maalouf, relaxé en appel dans une affaire d’agression sexuelle sur mineure, qui s’était distingué avec son tweet : « Sublime orchestre de Vienne qui chaque année excelle autant musicalement qu’il se fait tristement remarquer par son manque de diversité ethnique. 2021 on veut plus de diversité ! » C’est la violoniste chinoise Zhang Zhang, du Philharmonique de Monaco, qui lui répond : « La musique est le langage de tous les humains. Même quand nous ne parlons pas la même langue nous pouvons jouer ensemble. La musique est un témoignage de notre humanité. […] Votre haine et la culture de la dénonciation ne passeront pas par nous. » Une Jaune qui défend la musique blanche contre une attaque proche-orientale, le conflit devient intercontinental.

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Structurellement raciste !

La dimension raciale de la musique est pleinement assumée par la Cité de la musique. Personne n’est intervenu en 2014 quand elle organisait une exposition sur la musique noire (« Great Black Music »), « ferment d’une identité commune, panafricaine ». Le concept de musique noire est explicité par le conseiller scientifique de l’exposition, Emmanuel Parent, dans Libération : « Dans cette communauté [des musiciens africains, afro-américains et sud-américains, NDLR], la notion de musique noire n’est même pas un sujet de débat tant elle est naturelle, alors que pour les chercheurs ou la sphère publique, elle est plus problématique. » Le titre de l’article est encore plus explicite : « L’approche raciale de la musique a été portée par les Noirs eux-mêmes. » D’autant plus que les revendications touchent le nerf de la guerre. L’industrie musicale est gérée par des Blancs et aurait donc exploité les artistes noirs. Les grands labels (Universal, Sony, Warner) ainsi que les plates-formes de streaming sont dans le collimateur. Dans un ouvrage paru en 2002, le journaliste étasunien Norman Kelley faisait cette présentation : « L’histoire de la musique populaire [aux États-Unis] peut être décrite comme un processus d’innovation noire et de popularisation blanche. » Pour lui, l’industrie du disque s’est aussi construite « sur l’exclusion systématique des personnes noires des positions de pouvoir », en résumé : « Black roots, white fruits » (racines noires, fruits blancs).

Trop de Blancs, pas assez de femmes, élitiste, et surtout trop chère (ce qui est moins dit), la musique classique cumule les handicaps. La question raciale est aussi le moyen de dénoncer une baisse d’audience. Le classique ne fait plus recette : de 1982 à 2017, la part de spectateurs de moins de 30 ans a chuté de 27 à 9 %. Plus besoin de conservatoires à l’heure où des « génies » du clavier issus des banlieues font des clips avec des (dizaines de) millions de vues sur YouTube avec leurs appels au meurtre musicaux ; les décisions des bailleurs de fonds et celles des politiques sont simples à comprendre.

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Échec aux « déconstructeurs »

Déjà la Révolution française avait éliminé la musique sacrée du cérémonial officiel. Elle sera remplacée par les orchestres militaires de plein air. S’inscrivant dans les « déconstructions » des modèles classiques dans les arts, au début du xxe des compositeurs ont tenté de s’affranchir des lois de l’harmonie. Ils se sont aventurés dans les « musiques » atonales, dodécaphoniques, sérielles… Aujourd’hui encore le ministère de la Culture impose dans les conservatoires des épreuves avec ce genre de partitions pour l’obtention des diplômes. Mais qui peut citer quelqu’un écoutant ces compositions ? Où sont proposés leurs enregistrements dans les bacs des disquaires et pourquoi leurs scores sont microscopiques sur les plates-formes de téléchargement musicales ? Cette absence d’audience malgré les fortunes investies par les institutions (l’IRCAM est installé au cœur de Paris, tandis que la musique classique a été reléguée à la porte de la Villette) est révélatrice de son échec, même si le cérémonial européen tente de l’intégrer comme pour l’inauguration du tunnel du Saint-Gothard en juin 2016. Mais la musique ne fonctionne pas comme les autres arts. Les boniments des critiques institutionnels ne suffisent pas à imposer leurs critères. Il suffit d’aller dans n’importe quelle exposition d’art contemporain, pour constater qu’on peut y présenter toutes les lubies contraires aux règles esthétiques classiques, sauf que les organisateurs ne font jamais entendre les « musiques » s’inscrivant dans cette démarche, l’oreille ne le supporte pas. La grande majorité des individus entend les fausses notes sans avoir fait de solfège. Ce qui signifie qu’il est impossible de s’affranchir des règles de l’harmonie. Ce constat est très mystérieux et révélateur des qualités particulières de la musique, seul art inaccessible aux révolutionnaires (déconstructeurs).

Pour faire plier les peuples, il reste les arguments intersectionnels relayés par les médias. Ce n’est pas parce qu’ils sont simplistes qu’il faudrait les sous-estimer. Ils sont adaptés aux populations qui servent de levier. Ils sont d’autant plus dangereux qu’ils s’inscrivent dans une période où les musiciens classiques ne peuvent plus exercer leur rôle. Par ses mesures sanitaires, l’État interdit les concerts. Le confinement de la musique ne laisse la place qu’aux musiques artificielles, enregistrées ou transmises, c’est-à-dire des musiques mortes. Cette situation est sans équivalent dans l’histoire et périlleuse. Le récent suicide du claveciniste François Grenier de l’ensemble Hemiolia en est une triste illustration : « … il ne supportait plus de ne pouvoir vivre et transmettre son art avec cette crise sanitaire qui n’en finit pas. »

Remplacement de répertoires

Les autres musiciens, les créateurs de musiques artificielles, profitent de cette situation. Le grand remplacement musical est en cours, parfaitement racisé. Alors que le rock sera bientôt réservé aux EHPAD, le rap est devenu le genre le plus écouté et le plus vendu en France (cf. Polémia : https://www.polemia.com/repondre-rap-etat-des-lieux-victoire-culturelle-musique-anti-francaise/). Ces chansons sont bien souvent des appels au meurtre des Blancs et de leurs bébés, au viol des Blanches, au pillage et à la guerre. Les provocations sont étudiées pour attirer l’attention des médias et assurer la promotion des compositions. Les procédures engagées ne débouchent jamais sur des condamnations dissuasives. Rapprochée des attaques contre la musique classique, cette impunité laisserait imaginer un projet visant à éliminer les anciens répertoires. Exit le grégorien en 1962, exit les répertoires traditionnels avec les folkeux, exit la chanson française avec le rap, et maintenant la musique classique. À chaque fois, dans l’enthousiasme général, il faut bien que les jeunes s’amusent ! Cela n’a pas d’importance, ce n’est que de la musique.

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Le parallèle avec l’attitude de l’État islamique à l’égard de la musique est éloquent. En février 2015 dans l’est de la Syrie, sa police religieuse avait brûlé des instruments de musique comme étant contraires à la loi islamique. S’appuyant sur des dogmes (loi islamique, racisme) et tout aussi injustifiée, cette politique est similaire à celle qui s’attaque à la musique classique.

La musique a deux fonctions principales : harmoniser les individus de la communauté qui la produit et séduire ceux qui peuvent l’entendre. Jacques Chailley disait que « la chanson est le plus fidèle reflet de l’âme d’un siècle », ainsi la musique rend compte de l’état d’une société.

On peut toujours rêver de la contre-offensive menée contre cette campagne culturelle visant la musique de la civilisation européenne. Même si elle est improbable, il est déjà trop tard pour les agresseurs ; originaire d’Europe, cette musique a séduit d’autres continents sur lesquels la propagande intersectionnelle n’a pas de prise, que ce soit l’Asie ou l’Amérique du Sud. Si le front musical cède en Europe, il ne fera que se déplacer. La musique ne fait que rendre compte de l’état des civilisations.

Thierry De Cruzy
17/04/2021

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