Lundi dernier avait lieu l’Assemblée générale des Nations unies. De très nombreux chefs d’État ont pris la parole devant l’assemblée. Malgré l’inefficacité récurrente du « machin » (dixit Charles De Gaulle), l’Assemblée générale reste un moment important de la diplomatie internationale. Barack Obama y a tenu un discours ambigu, annonçant être prêt à travailler avec des pays comme l’Iran et la Russie pour combattre l’État islamique, une position de bon sens.
Parallèlement, il a néanmoins continué à dénoncer le régime de Bachar al-Assad, dans le but manifeste de ménager l’ « allié inconditionnel » des États-Unis, l’État d’Israël.
Outre qu’il était particulièrement attendu, le discours de Vladimir Poutine fut à proprement parler historique : cela faisait en effet plus de dix ans qu’un président russe ne s’était pas exprimé à la tribune de l’ONU. Après avoir, lui aussi, donné son accord à une coalition internationale contre l’État islamique, le président Poutine a fortement critiqué la stratégie des Américains et de leurs vassaux en Syrie, affirmant :
« Des opposants du régime syrien sont aidés par des régimes occidentaux ; on leur donne des armes, on les forme au combat et ensuite ils passent aux côtés de l’État islamique ».
Les deux chefs d’État se sont entretenus en tête-à-tête, le premier depuis deux ans. Quant à François Hollande, il n’a fait que répéter le discours convenu de la diplomatie française, ou plutôt de ce qui en reste :
« Bachar doit partir ».
Un président sans doute « sous influence », comme peut l’être son premier ministre Manuel Valls, si l’on en croit l’ancien ministre Roland Dumas. La position du président français est d’autant plus décevante que son ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius, semblait enfin être revenu à la raison, déclarant le 22 septembre à propos de la Syrie :
« Pour éviter un effondrement comme en Irak, il faudra conserver l’armée et d’autres piliers de l’État ».
La position jusqu’au-boutiste de Hollande a été dénoncée par le président Poutine pour lequel ce serait « une énorme erreur » de ne pas collaborer avec le gouvernement syrien et ses forces armées « qui tiennent courageusement tête au terrorisme ». Et le président russe d’enfoncer le clou : « Nous devrions reconnaître que seules les forces armées du président Assad et les milices (kurdes) combattent réellement l’État islamique et d’autres groupes terroristes en Syrie ». Les frappes aériennes décidées en fin de semaine dernière par la France en Syrie, sans l’aval du Conseil de sécurité de l’ONU, ont par ailleurs déclenché l’ire de la diplomatie russe. « La France tue le droit international », a ainsi déclaré la porte-parole du ministère des Affaires étrangères russe Maria Zakharova. Il convient de remarquer que les frappes aériennes américaines, plus de 7.000 missions de bombardement en un an, n’ont nullement empêché l’État islamique de progresser sur le terrain, bien au contraire. La chute de Palmyre est à cet égard un cas d’école : alors que les colonnes de Daech ont fait route pendant plusieurs jours vers l’antique cité, en plein désert, et donc totalement à découvert, curieusement aucun raid aérien américain n’est venu gêner les combattants islamistes dans leur progression…
La Chine vient d’autre part de dépêcher son porte-avions nucléaire Liaoning au large de la Syrie, dans la région de Tartous où stationne déjà la flotte russe. Les hélicoptères et les chasseurs chinois seront déployés en novembre après qu’ils auront transité par l’Iran. S’ajouteront plus de 1.000 fusiliers‑marins. Cette opération militaire pourrait se faire sous le couvert de l’Organisation de coopération de Shanghai (*). La Syrie de Bachar al-Assad est désormais soutenue par deux puissances nucléaires des BRICS, un échec cuisant pour la diplomatie états-unienne. La Chine s’apprête parallèlement à fournir 8.000 hommes à une force de réaction des Nations unies, a annoncé le président chinois Xi Jinping. Pékin va également débloquer 100 millions de dollars pour aider l’Union africaine à mettre en place sa propre force de réaction susceptible d’agir sur le continent, ajoute le président chinois. L’Empire du Milieu entre ainsi formellement dans l’alliance associant l’Iran et la Russie dans la région, au grand dam d’Israël, l’Iran étant l’allié du Hezbollah, ennemi mortel de l’État hébreu. L’Iran et la Russie ont par ailleurs déjà établi une cellule de coordination en Irak.
Source : Le Kiosque courtois, Radio Courtoisie, semaine du 28 septembre au 4 octobre 2015
Note
(*) Voir :