Par Michel Geoffroy, auteur de La Super-classe mondiale contre les peuples ♦ Le livre que Pierre-Antoine Plaquevent vient de publier aux éditions Le Retour aux Sources, Soros et la société ouverte [1], tombe à point nommé. Le personnage vient en effet d’être nommé « Personnalité de l’année » par le Financial Times. On dénonce souvent en effet l’action des fondations du milliardaire George Soros pour favoriser l’immigration en Europe. Mais la plupart du temps on ne dépasse pas ce constat critique.
Le mérite de Pierre-Antoine Plaquevent est au contraire d’analyser en profondeur les racines intellectuelles et philosophiques de l’action de George Soros.
Son essai, très documenté a d’ailleurs pour sous-titre significatif : « Métapolitique du globalisme ». Il ouvre en effet de très nombreuses perspectives, souvent originales.
La généalogie de l’utopie de la société ouverte
Dépassant largement la simple biographie de George Soros, Pierre-Antoine Plaquevent s’attache en effet à définir la généalogie du concept de « société ouverte » qui constitue la clef de voûte de son action militante.
Il montre que ce thème a été diffusé par Karl Popper, en réaction contre les « totalitarismes » du 20e siècle, que ce dernier plaçait sur le même plan. Il a aussi été repris de Friedrich Hayek et rejoint l’Ecole de Francfort sur la déconstruction nécessaire de la « personnalité autoritaire ».
George Soros décrit ainsi la société ouverte qu’il appelle de ses vœux : « Toutes les relations sont contractuelles… Aucun des liens existants n’est définitif, les rapports entre l’individu et la nation, la famille et ses proches dépendent entièrement de sa propre décision… La structure organique de la société a été désintégrée au point où ses atomes, les individus, flottent sans entraves »[2].
On ne saurait mieux avouer – car les oligarques mondialistes ne cachent nullement leurs projets – que la société ouverte est en réalité une non-société, où tous les obstacles à l’envahissement du monde par le marché ont été détruits et où l’homme, réduit à l’état d’individu-atome, est devenu lui-même une marchandise.
Pour le plus grand profit des firmes mondialisées et de la super classe mondiale. Pierre-Antoine Plaquevent montre d’ailleurs comment George Soros tire souvent personnellement avantage des campagnes qu’il organise au nom de « l’ouverture ».
Une utopie négative
Pierre-Antoine Plaquevent démontre que l’utopie de la société ouverte est un concept négatif, une anti-valeur, qui ne sert qu’à attaquer « ses ennemis [3]», c’est-à-dire tout ordre social, en propageant le chaos partout.
Car c’est au nom de cette utopie que l’on préconise par exemple la dépénalisation de l’usage des drogues, le laxisme pénal et éducatif, l’avortement et l’euthanasie pour tous, le droit des immigrants à s’installer où ils veulent, ou la légalisation de toutes les pratiques sexuelles.
Et on ne se borne pas à réclamer, puisqu’on organise aussi ce chaos : comme par exemple lorsque les ONG financées par les fondations de l’Open Society vont chercher les migrants dans les eaux territoriales libyennes (comme l’a révélé l’agence Frontex) pour les conduire en Europe.
L’ingénierie sociale au service du mondialisme
L’auteur nous rappelle aussi que Karl Popper a conceptualisé la stratégie sociotechnique – ou ingénierie sociale- préconisant de conduire des changements progressivement et par paliers, sans traumatiser la population à outrance, mais avec continuité.
C’est le principe de « graduation » repris de la Fabian Society permettant de transformer progressivement la société contre son gré et que met en œuvre par exemple l’Union Européenne pour déconstruire les nations.
Une « construction » que soutient évidemment George Soros car « là toutes les nations sont minoritaires, et c’est la raison pour laquelle ce projet me tient à cœur [4]».
Soros en tant qu’archétype du nouveau messianisme révolutionnaire
Pierre-Antoine Plaquevent voit en George Soros l’archétype de la nouvelle dynamique du messianisme révolutionnaire.
Selon lui, Soros personnalise en effet le retour de « l’internationalisme révolutionnaire porté par les communistes dans les années 20 partout en Europe[5] ». Il est pour cette raison anti-communiste, mais par anti-nationalisme et par cosmopolitisme. D’où aussi ses relations tendues avec l’Etat israélien, trop territorial et trop national à ses yeux.
Soros incarne pour cette raison ces nouveaux trotskistes qui constituent la super classe mondiale, et qui pensent que la conjonction de la spéculation financière et des leviers para-étatiques que constituent les ONG et les institutions internationales,permettront le mieux d’ouvrir les sociétés réputées « closes »c’est-à-dire de réaliser la promesse eschatologique de la révolution mondiale et de la fin des Etats-nations.
Un manuel du mondialisme
Mais l’étude de Pierre-Antoine Plaquevent ne se borne pas à un examen métapolitique approfondi de l’action protéiforme de George Soros.
Elle est aussi un manuel détaillé du mondialisme, le premier en langue française, permettant de connaître les multiples ramifications de l’Open Society, « corps mystique de la société ouverte », comme l’auteur la désigne non sans ironie.
Des ramifications qui donnent évidemment le vertige.
La Konservintern contre la société ouverte
Le dernier intérêt, et non des moindres, de l’ouvrage que Pierre-Antoine Plaquevent consacre à George Soros, tient à sa réflexion sur les moyens de contrer son influence destructrice.
S’inspirant de l’analyse du Katechonselon Carl Schmitt dans sa « Théologie politique [6]» – désignant une « figure théopolitique qui aurait pour effet de freiner l’universelle dissolution propre à la modernité et aux anti valeurs héritées des Lumières [7]», incarnée autrefois dans la Chrétienté mais aussi dans la figure de l’Etat comme garant du Bien Commun -, l’auteur estime que face à l’offensive mondialiste, la réponse ne peut qu’être internationale. Dans la voie tracée en Europe par la Hongrie et les pays du groupe du Visegrad.
« Face à ce millénarisme agressif et millénariste, l’alliance conservatrice qui tente de s’organiser dans le monde afin de juguler le globalisme et d’orienter le système politique international vers la multipolarité ne représente-t-elle pas elle-même la forme contemporaine du Katechon ? [8]».
Face à l’alliance planétaire des oligarchies mondialistes, héritière du Komintern d’hier, Pierre-Antoine Plaqueventplaide ainsi pour la mise en place d’une Konservintern, d’une nouvelle alliance internationale des peuples et des nations qui refusent de disparaître.
On l’aura compris, Soros et la société ouverte de Pierre-Antoine Plaquevent est un livre à ne pas manquer.
Michel Geoffroy
19/12/2018
[1]« Soros et la société ouverte » Pierre-Antoine Plaquevent ; le retour aux sources 2018
[2]« Soros et la société ouverte » Pierre-Antoine Plaquevent ; le Retour aux sources ; 2018 ; page 115
[3]« la société ouverte et ses ennemis » Karl Popper , 1945
[4]« Soros et la société ouverte » op.cit.page 315
[5]« Soros et la société ouverte » op.cit.page 305
[6] « Théologie politique » Carl Schmitt 1922 ; édition Gallimard de 1969
[7]« Soros et la société ouverte » op.cit.page 344
[8]« Soros et la société ouverte » op.cit.page 348
Source : Correspondance Polémia
Crédit photo : Georges Soros par Niccolò Caranti [CC BY-SA 3.0], via Wikimedia Commons
- De quoi la dette est-elle le nom ? Introduction au Forum de la Dissidence - 17 novembre 2024
- Non aux impôts, oui à l’arrêt des dépenses nuisibles ! - 17 octobre 2024
- David Engels nous invite à défendre l’Europe civilisationnelle - 10 octobre 2024