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Fraude sociale. Le point sur les premières révélations

Fraude sociale. Le point sur les premières révélations

par | 4 septembre 2019 | Société

Fraude sociale. Le point sur les premières révélations

Par André Posokhow, consultant ♦ Dans l’article paru sur le site de Polémia le 3 aout 2019 intitulé La fraude documentaire occultée malgré son énorme coût potentiel, nous avions présenté la thèse avancée par le juge Prats et la sénatrice Nathalie Goulet d’une fraude potentielle de 14 milliards d’euros reposant sur une immatriculation sociale frauduleuse.
Cette thèse a donné lieu à une polémique et au déclenchement d’une mission d’enquête confiée à la sénatrice Nathalie Goulet et à la députée Carole Grandjean.
Une conférence de presse s’est tenue ce 3 septembre au Sénat qui semble, avant le rapport définitif de la mission qui devrait être rendu fin septembre, confirmer l’ampleur de cette fraude documentaire et partant, de ses conséquences.


Quel est le lièvre de la fraude sociale que N.Goulet et C.Prats ont levé ?

En 2011, un inventaire a permis de faire apparaître qu’il y avait en France 17,6 millions de personnes possédant un Numéro d’Identification du Répertoire (NIR) nées à l’étranger. (20,8 millions en 2018).

Une observation : sur ces 17,8 M, il n’y a pas que des étrangers. Beaucoup de Français sont nés hors de France.

A la suite d’une étude sur un échantillon représentatif, policiers et statisticiens ont abouti en 2011 à un taux de fraude de 10,4% soit 1,8 millions de personnes qui posséderaient aujourd’hui un NIR qui leur a été attribué sur la base de faux documents.

Sur la base de dépenses de sécurité sociale à hauteur de 483Md€ et d’un nombre de cartes Vitale de 53 millions, l’enjeu considérable du coût potentiel de la fraude pourrait être de plus de 14 Md€ comme annoncé par C.Prats, si tous les titulaires de ces faux documents étaient actifs ou fraudaient ce qui n’est pas certain.

Réticences et polémique

Les réticences

Selon la DNLF, les fraudes aux prestations détectées et non pas évaluées atteignent 700 M€ en 2017.
Ce chiffres qui se compte en millions d’euros est sans commune mesure avec ceux qu’annonce le juge Prats qui se comptent en milliards d’euros.
L’incohérence qui existe entre ces chiffres suscite des interrogations dont l’enjeu financier est considérable.

Or les réponses ne sont pas satisfaisantes à ce jour et il apparaît clairement que le juge Prats et la sénatrice N. Goulet se heurtent depuis des années à de fortes réticences aux questions orales du Sénat..

C’est la raison pour laquelle le juge Prats a parlé d’une omerta et a affirmé que cette affaire pouvait être considérée comme un scandale d’Etat.

La polémique

La commission des affaires sociale du Sénat a confié au début de 2019 à son rapporteur général, Jean-Marie Vanlerenberghe (MoDem), le soin d’approfondir l’estimation du magistrat. Dans son rapport remis le 4 juin il arrive à une estimation du risque comprise entre 200 à 800 millions de prestations frauduleuses, c’est à dire très en dessous de l’estimation du juge Prats.

Nathalie Goulet et C.Prats ont considéré que le rapport de la commission sociale du Sénat minimise l’ampleur de la fraude aux prestations sociales des personnes nées à l’étranger et que son enjeu financierpourrait être plus élevé qu’avant ce rapport.

C’est ce que devait déterminer la mission d’enquête sur la fraude sociale et son impact sur les finances publiques confiée à Nathalie Goulet et à Carole Grandjean par le premier Ministre.

Les premiers constats de la mission

Ce mardi 3 septembre les deux parlementaires ont rendu leurs premiers constats lors d’une conférence de presse au Sénat. Dans cette note de Polémia nous nous bornerons à les présenter, un rapport final qui devrait rendre des conclusions définitives et une évaluation du coût devant être rendu public dans les semaines qui viennent.

Ces constats mettent en évidence de graves incohérences

  • Au Répertoire national d’identification des personnes physiques (RNIPP) sont inscrites 110 millions de personnes.
  • Sur ces 110 millions, 84 millions sont considérées comme étant en vie. Or, 1e incohérence apparente, les recensements récents affichent seulement 67 millions de personnes résidant en France.
  • Il y aurait donc un excédent d’environ 17 millions de personnes que l’on peut analyser, selon le juge Prats, selon l’ordre d’idée suivant : 6,4 millions de personnes qui seraient nées en France et environ 9 millions de personnes nées à l’étranger.
  • Question : les 84 millions touchent-elles toutes des prestations sociales ?
  • Anomalie ahurissante le fichier RNIPP affiche 3,1 millions de personnes centenaires. Or, selon l’INSEE il n’y aurait que 21 000 centenaires en France.
  • Sur ces 3,1 millions de personnes, selon le juge Prats, 1,5 millions seraient nées en France et 1,6 millions à l’étranger. Mais cela ne veut pas dire qu’il y a autant de fraudeurs.

Les deux parlementaires avancent d’ores et déjà quelques recommandations : limiter la durée de vie des cartes vitales, obliger les Français à déclarer tout changement de domicile, contrôler les prestations versées à l’étranger …..

Quatre observations

  • Visiblement ce que clame le juge Prats depuis près de 10 ans semble se confirmer. C’est le chaos dans la gestion des fichiers. Une fois de plus les Français rémunèrent en toute confiance des mandataires incompétents et qui ne se montrent pas à la hauteur de leur tâche et de leurs responsabilités.
  • Le coût de la fraude qui en résulte est pour l’instant subodoré (14 Md€ ?) mais non connu d’une manière certaine. Le chiffre de 7 à 9 Mds estimé par l’ACOSS cité dans les médias est celui de la fraude aux cotisations. Or cette affaire de fichier RNIPP concerne la fraude aux prestations, ce qui n’est pas la même chose. Notons au passage qu’en 2012 la Cour des Comptes avait estimé le coût de la fraude aux cotisations autour de 25Md€.
  • Dans ces premiers constats, il n’est pas question de l’immigration. Certes s’il y a fraude, son origine ne se trouve pas dans la seule immigration. Mais il ne faudrait pas que dans les conclusions et les évaluations définitives, celle-ci soit purement et simplement escamotée.

Dans cette logique, il ne faudrait pas non plus que les propositions de réforme ne visent que les Français comme pour les changements de domicile ci-dessus. Elles doivent concerner en priorité les non-Français inscrits dans ce fichier.

André Posokhow
04/09/2019

Source : Correspondance Polémia

André Posokhow

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