Jean-Claude Rolinat, homme politique, cadre administratif puis dans le privé…
♦ Nous allons développer ci-dessous une hypothèse qui en vaut bien d’autres et qui présente l’avantage d’avoir la logique d’un puzzle dont toutes les pièces s’emboîtent parfaitement.
« Bien joué ! », si je puis dire. Chapeau l’artiste ! Du grand art, belle séquence politique fignolée sans doute par ce lecteur du Prince de Machiavel.
Et pourtant, avec sa mine de chien battu, son allure d’ordonnateur des pompes funèbres et son look de petit comptable de chef-lieu de canton – pardon pour les ruraux, dont je fais partie –, le président de la République vient de réussir « un coup de maître », un hold-up sans précédent sur une élection majeure et, suprême subtilité, sans être lui-même candidat.
« Je n’y serai pas, l’autre non plus »….
« Je n’y serai pas, l’autre non plus », s’est dit le chef de l’Etat. Assuré d’être éliminé au soir du premier tour d’après tous les sondages, pire, d’être défait par ses concurrents lors d’une primaire socialiste, il a préféré renoncer à la course et adouber, secrètement, l’un de ses affidés. Car on ne me fera pas croire que l’irruption quasi magique d’un Macron a été spontanée.
Le complot remonte à loin. « Dis-moi qui te soutient, je te dirai qui tu es » : Attali, Minc, Drahi, Cohn-Bendit, Kouchner, Bayrou, rien que du beau monde… Le beau jeune homme n’est pas un perdreau de l’année, comme voudrait nous le faire croire l’intelligentsia dominante. Le produit a été lancé à grands renforts de pub comme une vulgaire lessive : pas une « Une » de magazine sans une photo du couple Macron sous toutes les coutures, des radios, des télés, des pages et des pages dans la presse, un martèlement continu de la Grosse Bertha médiatique.
Restait à peaufiner le scénario avec une démission à l’amiable sans que François et Emmanuel ne s’égratignent trop publiquement. Oubliés le passage à la banque Rothschild, deux ans au secrétariat-général de l’Elysée et deux autres à Bercy.
Seconde phase de l’histoire : l’élimination du favori qui caracolait en tête, l’accès au Palais de l’Elysée lui étant garanti après sa victoire à l’issue des primaires de la droite et du centre. Il fallait donc neutraliser François Fillon.
Une République oligarchique des juges ?
Le dossier, sous le coude depuis des lustres, était prêt : direction Le Canard enchaîné qui s’est… déchaîné, au bon moment ! Et on ne peut pas dire que le pauvre Fillon se soit défendu avec brio. Ses communicants n’ont pas été à la hauteur. Un pas en avant, un pas en arrière, un mea culpa raté et trop tardif. Il a mis la main dans le pot de confiture, légalement – on serait tenté d’écrire « honnêtement » –, comme nombre de ses pairs. Il n’est ni plus ni moins coupable que ses 576 autres collègues de l’Assemblée nationale.
Chaque député dispose de trois enveloppes : une pour son indemnité personnelle, une pour ses collaborateurs, dont il choisit souverainement le nombre ainsi que leur salaire, et la troisième pour « arroser » sa circonscription. J’en sais quelque chose en tant qu’élu local, notre député finance ici ou là quelques travaux indispensables dans nos communes : quel est le maire, l’adjoint au maire, le conseiller municipal qui refuserait pareille aumône ? C’est le système qui est coupable, pas les hommes qui en profitent au vu et au su de tous.
On peut voir dans les poursuites engagées contre Fillon un certain acharnement judiciaire. Rapide, quand il le faut, la justice : le lendemain même de la parution du papier dansî, Thémis saisissait François Fillon par le cou. On connait la suite, lente descente aux enfers avec un cruel raffinement digne d’un tourmenteur vietminh.
Une hâte incroyable, pourquoi ? C’est que le 16 février le Parlement avait voté A L’UNANIMITÉ une loi de réforme de la prescription qui devrait entrer en vigueur le 28. Pas une minute à perdre pour le parquet. Le « Pénélopegate » allait emporter, polluer, pourrir définitivement la candidature de celui qui s’était hissé à la première place dans les sondages, paré de toutes les vertus d’un chevalier blanc.
On nous dit que la Justice, avec un grand « J », est indépendante, au-dessus des intérêts des uns ou des autres. Il est vrai qu’il y a bon nombre de magistrats, Dieu merci, qui appliquent la loi et instruisent les affaires en conscience, en honnêtes hommes ou femmes convaincus de l’importance de leur tâche, mettant l’impartialité au-dessus de leurs préférences naturelles, bien compréhensibles. Mais il en est d’autres, peut-être, minoritaires sans aucun doute, qui subissent les influences d’un engagement philosophique et intellectuel, ou la pression de leur choix idéologique. Souvenons-nous du scandaleux « Mur des cons » qui décorait les locaux d’un syndicat engagé à l’extrême gauche.
Lorsque ses adhérents, revêtus de leurs robes et de l’hermine, dominent de leur suffisance les justiciables recroquevillés dans le prétoire, que leur passe-t-il par la tête ? Il suffit de lire certains attendus de jugements pour se rendre compte qu’il y a une justice à plusieurs vitesses. La Fontaine, plus que jamais, est toujours d’actualité : « Selon que vous serez puissant ou misérable », etc. On nous dit qu’il ne faut pas critiquer la justice et que nous n’aurions pas le droit de contester un arrêt, un attendu de cour ? Oui, respectons la justice, mais cette institution vieille comme nos Etats n’est qu’un instrument de la force publique, financé sur nos deniers. Ses fonctionnaires, employés, greffiers, juges, procureurs, etc., vivent de nos impôts et, s’ils rendent la justice « Au nom du peuple français », alors ils doivent s’y soumettre, c’est-à-dire respecter une certaine hiérarchie des peines prévues par la loi – le législateur, c’est nous, et nos députés le sont par procuration ! – en fonction de la gravité des actes commis. Il y a trop de distorsions d’un bout à l’autre de ce pays. Par exemple, les « sauvageons » de Juvisy qui ont mis « à feu et à sang » une cité de cette ville s’en sortent trop bien par rapport à tel commentateur de l’actualité poursuivi pour ses propos iconoclastes pour la classe dominante parus dans la presse ou diffusés sur une antenne. Aux Etats-Unis, les juges sont ÉLUS par le peuple. Ici, en France, ils sont nommés. Par qui ? Je n’entamerai pas ce débat, mais la question mérite bien d’être, un jour, posée.
Après Fillon, éliminer Valls
François Hollande ayant choisi secrètement son dauphin, écartant désormais sans aucun doute le ténor de la droite molle, il ne restait plus qu’à neutraliser son bouillant premier ministre. C’était chose faite avec les primaires du PS, désignant le député frondeur Benoît Hamon, chouchou de beaucoup d’électeurs musulmans de sa circonscription de Trappes. Le talentueux orateur Mélenchon ayant un ego disproportionné, l’alliance de la gauche avec l’extrême gauche ne pouvait se faire. La division de cet électorat verrouillait la porte à une union des gauches, assurant ainsi à Macron un score supérieur à chacun de ces deux candidats.
Casser la droite et saborder la Marine…
Mais l’orfèvre du Faubourg-Saint-Honoré devait parachever son œuvre. Eliminer, quasiment, les rivaux potentiels de son poulain ne suffirait pas à lui assurer avec certitude la victoire. Il fallait diviser l’ennemi et freiner celle qui caracolait, à son tour, en tête des sondages. Le poison de la défaite étant inoculé chez les Républicains (on peut se réjouir ou se lamenter, c’est selon, de voir, les uns après les autres, tous les gnous LR quitter la réserve fillonesque en quête de nouveaux herbages), on allait s’atteler à entraver la course de Marine Le Pen avec, au choix, l’affaire des emplois fictifs, des supposés démêlés avec le fisc ou une « abracadabrantesque » histoire de clichés de massacres de Daech diffusés via son compte Twitter.
Et le bel Emmanuel, pur comme un éphèbe de la statuaire grecque, au programme vide comme une cervelle de moineau, émergerait avec « sa maman » dans le halo d’une lumière mystique, anesthésiant toute défense immunitaire rationnelle…
Voilà le plan, supposé par votre serviteur, d’un chef de l’Etat en phase terminale de mandat, en train de se réaliser… à moins qu’une fois encore un grain de sable, le destin ou le hasard qui, pour les chrétiens ne sont que les doigts de Dieu, ne contrarient le déroulé d’une élection qui était bien trop prévisible. La ficelle est tellement grosse que c’en est une corde à nœuds ! Macron, Juppé, Hamon, Mélenchon ? L’horreur absolue…
Jean-Claude Rolinat
6/07/2017
Correspondance Polémia- 7/03/2017
Image : Emmanuel Macron ne lâche pas son mentor !