Par l’Observatoire du journalisme ♦ Le 25 avril 2018, « le zoom de la rédaction » de France Inter, émission diffusée chaque jour de la semaine à 7h16 dans la Matinale semble marquer un tournant dans la ligne éditoriale de la radio.
Ce mercredi 25 avril 2018, le « zoom de la rédaction » de la Matinale de France Inter, Matinale présentée par Nicolas Demorand et Léa Salamé, est tourné vers le Sénégal, sur le thème « Quand la diaspora revient ». France Inter intègre le concept de « remigration » en variant la formule, concept habituellement considéré, en particulier sur cette même antenne, comme étant de « droite extrême ». Un tel événement méritait une écoute approfondie.
Géraldine Hallot aux manettes entre deux bobards
Ce zoom est réalisé par Géraldine Hallot, grand reporter au service reportages de France Inter depuis 2009, diplômée du Celsa, enseignante en section radio à l’IPJ de Paris Dauphine. Hallot n’est pas n’importe quelle journaliste, elle est détentrice d’un Bobard d’or, la plus importante des distinctions à laquelle peut prétendre un journaliste des médias officiels. Son reportage du zoom du jeudi 25 avril 2018 est ainsi annoncé par Nicolas Demorand : « Dakar, où vous avez rencontré, Géraldine, des repatriés, j’ai bien dit des repatriés (l’auditeur sent que Demorand est conscient de ce qui se passe), un néologisme qui désigne les immigrés souvent très diplômés qui ont décidé de revenir vivre et travailler dans leur pays d’origine. Au Sénégal, ils sont de plus en plus nombreux à faire ce choix. Avec succès ».
Le Sénégal présenté comme exemple à suivre ?
Le reportage (extraits) :
« Soad Diouf a tous les attributs de la femme d’affaires. Hyperconnectée, en tailleur sombre et talons vertigineux, la poignée de main volontaire. Elle nous reçoit au siège de son entreprise dans le centre de Dakar. Il y a un an et demi, Soad Diouf, 32 ans, a quitté Rouen, où elle a fait toutes ses études (en génie des systèmes industriels) et elle est revenue s’installer à Dakar. Elle y a ouvert un cabinet d’audit énergétique, grâce notamment à une subvention de 7 000 euros, versée par l’Ofii (Office français de l’immigration et de l’intégration), l’organisme qui finance les retours volontaires. Pour Soad Diouf, le retour au pays était un “devoir moral”. Il vaut mieux rentrer et développer notre pays en étant sur place, plutôt que d’envoyer de l’aide. (…) Un pays ne s’est jamais développé avec de l’aide. Au départ sa famille n’était pas franchement ravie. “Pour eux, il faut rester en Europe. C’est l’Eldorado, explique-t-elle. Mais c’est un mythe. Ils adorent l’Europe mais ils ne la connaissent pas. Ils ne voient que les touristes qui viennent ici, mais quand on est en vacances, forcément, tout est parfait !”Aujourd’hui, Soad Diouf ne regrette pas la France, même si elle est un peu “nostalgique” de la Normandie ».
Premières informations importantes :
- Le témoin est heureux d’être retournée dans son pays d’origine, après que la France ait financé toutes ses études et subventionné son choix rapatriement/remigration (ce dernier mot qui effraie sans doute Demorand, n’est pas prononcé ).
- C’est une immigrée ayant conservé son identité africaine malgré sa jeunesse passée en France qui l’affirme et non des identitaires européens : l’Europe n’est pas un « eldorado » pour les africains ; « l’aide » européenne ne permet pas le développement. Autrement dit les politiques migratoires et de développement actuelles sont complètement inutiles. Les citoyens contribuables seront heureux que cette réalité leur soit confirmée sur France Inter.
« Au Sénégal, les opportunités de travail pour ces “repatriés” sont nombreuses. La croissance du PIB atteint 7 % et, grâce au plan Sénégal émergent, lancé par le président Macky Sall, le pays est un vaste chantier. Des villes nouvelles sortent de terre, sur le modèle de ce qui s’est fait en France. Abdoulaye Ba est le directeur d’un cabinet de conseil. Lui aussi est un ancien immigré. Multidiplômé, il est rentré de France dès 2008. L’Eldorado c’est l’Afrique. Parce qu’en Afrique, tout est à faire, tout est à construire. Toutes les matières premières viennent d’Afrique. Les Africains sont de plus en plus formés et qualifiés. Abdoulaye Ba appelle de ses voeux un “sursaut patriotique” pour que la jeunesse africaine reste chez elle. “Chacun peut apporter sa contribution.” Il cite John Fitzgerald Kennedy : « Ne vous demandez pas ce que votre pays peut faire pour vous, demandez-vous ce que vous pouvez faire pour votre pays ».
Secondes informations importantes :
- L’Afrique connaît une croissance qui devrait lui permettre de mener elle-même sa propre lutte contre la pauvreté et pour son développement, et donc de réguler en conséquence sa démographie.
- « L’eldorado c’est l’Afrique »
- Le « patriotisme » devient, ce jeudi 25 avril 2018, une valeur positive sur France Inter. Il paraît alors urgent de suivre la recommandation du président Kennedy et de se mettre au service de son pays plutôt que de migrer.
Et ce sont les immigrés ayant remigré qui le disent… d’autant que « le succès de ceux qui sont revenus pourrait dissuader ceux qui veulent partir ».
« Ces retours sont évidemment loin de compenser le nombre de départs vers l’Europe. Mais le succès de ceux qui sont revenus pourrait dissuader ceux qui veulent partir. C’est l’avis de Moubarak Wade, patron d’une agence de communication à Dakar. Il est rentré de France en 2012, après avoir vécu neuf ans à Nice avec un visa étudiant. “Ce matin (9 avril NDLR), une pirogue a chaviré à Saint-Louis. Ces gens-là partaient pour l’immigration clandestine. Il y a cinq morts”, déplore le jeune homme. “Ces jeunes-là n’ont rien compris. Pour partir, ils ont dû payer au moins 300 000 ou 500 000 francs CFA (760 euros)”, explique-t-il. Ils auraient pu utiliser ce même courage, cette même hargne qu’ils ont mis pour partir en pirogue, pour monter un business ici. L’Europe est un miroir aux alouettes, disent ces anciens immigrés, qui, pour certains, ont connu en France le chômage ou la xénophobie. Pour eux, l’avenir est clairement en Afrique. »
Troisièmes informations importantes :
- La volonté et le courage des Africains auraient intérêt à être utilisés sur place, ainsi que l’argent qu’ils dépensent pour les passeurs, .
- L’avenir des Africains est « en Afrique ».
Si les informations qui ressortent de ce reportage étaient diffusées par un site ou une personne considérés comme de droite (par France Inter), les médias hurleraient sans aucun doute au « racisme » ou à la « lepénisation des esprits ». Là, c’est un reportage de France Inter et ce sont les Africains remigrés eux-mêmes qui le disent : la place des Africains n’est pas en Europe, elle est en Afrique. Retour au réel pour France Inter ?
Source : Observatoire du journalisme
Crédit photo : Domaine public, via PixaBay