Il fallait s’y attendre : instituée par Jacques Chirac en 2006, la « Journée de la mémoire de la traite négrière, de l’esclavage et de leurs abolitions » a, cette année, donné lieu au déluge de repentances et de mensonges par omission de la part du pouvoir, et d’exigences ahurissantes de la part des « victimes ».
Motus sur la traite arabo-africaine, les chrétiens razziés et l’esclavage moderne
Le 12 mai, après ses deux prédécesseurs, François Hollande a battu sa coulpe – sur la poitrine des Français dont la quasi-totalité n’a en rien profité de la traite, au contraire des « dynasties bordelaises » (1), comme l’a rappelé le même jour Jean-Yves Le Gallou sur Polémia (2) – à l’occasion de ce nouveau « devoir de mémoire » pour ce qui a été qualifié de « crime contre l’humanité » dans la loi Taubira de 2005.
Mais pas un mot, bien sûr, de la traite négrière arabo-africaine, sujet d’ailleurs désormais tabou dans nombre d’ « écoles de la République » sous la pression des élèves et des parents musulmans ; et encore moins des « captifs d’Allah » : plus d’un million de chrétiens razziés de la Dalmatie à l’Écosse par les Barbaresques entre le XVe et le début du XIXe siècle (3). Silence total également sur l’esclavage moderne pratiqué en France même par des résidents, voire des naturalisés, originaires du Maghreb, du Moyen-Orient ou d’Afrique noire. Bien que plus de cent vingt procès soient actuellement pendants de ce chef devant la seule Cour d’appel de Paris, pas question d’ulcérer par un rappel inopportun « ceux qui sont chez eux chez nous », et moins encore les richissimes investisseurs du Golfe arabo-persique.
De l’impudence du CRAN…
En revanche, le CRAN, Conseil représentatif des associations noires de France calqué sur le CRIF, Conseil représentatif des institutions juives de France, a parlé ou plutôt gueulé pour deux. Son nouveau président, le Martiniquais Louis-Georges Tin, a ainsi annoncé en fanfare avoir « assigné en justice la Caisse des dépôts et consignations, la banque d’État qui a joué un rôle considérable dans l’esclavage » et s’est ainsi rendue « complice de crime contre l’humanité » en encaissant « des sommes équivalant à 21 milliards de dollars » entre 1825 et 1946 en échange de l’indépendance de Haïti qui aurait ainsi été frappée d’ « une double peine » car « cette rançon a précipité Haïti dans une spirale infernale d’instabilité et de misère ».
En conséquence de quoi la CDC, qui se serait également « enrichie grâce à l’exploitation colonialiste », est sommée « d’abonder à hauteur d’au moins 10 millions d’euros un fonds de dotation pour financer des recherches », sans parler du montant des « réparations », avec intérêts cumulés.
L’agitateur Tin, par ailleurs militant homosexuel qui s’illustra dès l’École normale supérieure en y créant l’association « Homonormalités » avant de diriger le Dictionnaire de l’homophobie (publié en 2003 aux Presses universitaires de France avec une préface de Bertrand Delanoë), n’oublie qu’une chose : la somme de 150 millions de francs-or que devait acquitter Port-au-Prince avait été fixée conjointement par le président haïtien Pétion et Charles X le 11 juillet 1825 en compensation de l’expropriation et de l’expulsion des colons français, consécutives à la déclaration unilatérale d’indépendance de l’île.
Cette somme, d’ailleurs ramenée par Louis-Philippe en 1838 à 90 millions de francs, ne paraissait pas extravagante. Haïti n’était-elle pas à l’époque la colonie française la plus riche de toute l’Amérique grâce aux immenses profits résultant d’une industrie sucrière très dynamique et de celle de l’indigo ?
… à l’hypocrisie de Christiane Taubira
Mais qu’importent ces « points de détail de l’histoire » ? Le camarade Tin, qui a été à bonne école, celle de « l’industrie de l’Holocauste » (dénoncée par Norman Finkelstein dans le livre éponyme, paru en 2001 aux éditions de La Fabrique), tient à ses indemnisations léonines et, sous couvert de corriger le tir, sa copine Christiane Taubira a aussitôt apporté sa pierre à la stèle de la « mémoire » en préconisant une gigantesque réforme foncière.
« Il faudrait envisager, sans ouvrir de guerre civile, des remembrements fonciers, des politiques foncières », expliquait le garde des Sceaux dans Le Journal du dimanche. « Il y a des choses à mettre en place sans expropriation, en expliquant très clairement quel est le sens d’une action publique qui consisterait à acheter des terres. En Guyane, l’Etat avait accaparé le foncier, donc là, c’est plus facile. Aux Antilles, c’est surtout les descendants des “maîtres” qui ont conservé les terres, donc cela reste plus délicat à mettre en œuvre. » Mais, ajoutait Mme le ministre en tablant sur la mauvaise conscience systématiquement instillée aux Français, « les temps sont mûrs pour faire cette politique intelligemment et de façon équitable… Cela fait dix ans que je le dis, je crois que c’est vraiment possible. »
Les Antilles et la Guyane menacées de « haïtisation » ?
En quelques décennies, du fait de la corruption, de l’impéritie, de l’incompétence et des rivalités sanglantes entre Noirs et Mulâtres, la si enviable prospérité de la « Perle des Antilles » ne fut plus qu’un souvenir et Haïti, indépendante depuis plus de deux siècles maintenant, est devenue l’un des États les plus pauvres du monde, ne subsistant, de manière végétative, que de l’aide internationale, des subventions des ONG et de l’argent envoyé au pays par des immigrés (au Canada, aux États-Unis et en France) dont l’exode est continu.
Les « descendants d’esclaves » antillais et guyanais menacés par la redistribution des terres souhaitent-ils vraiment connaître ce glorieux destin ? Et la grande bourgeoise Taubira elle-même qui, dans sa déclaration de patrimoine, faisait état de propriétés en Guyane, est-elle prête à morceler ses terres pour les offrir aux plus pauvres ?
Mais tout cela n’est que gesticulations même si, au final, celles-ci risquent de nous coûter très cher. Avec sa réforme foncière, le ministre de la Justice essaie de redorer son blason, bien terni en Guyane par sa défense du mariage gay auquel sont opposés presque tous ses compatriotes. Quant à Louis-Georges Tin, son coup d’éclat s’inscrit dans la sombre lutte qui se livre pour la direction du CRAN, entre ressortissants des Dom-Tom et Africains : un tel Black mic-mac (4) que Libération, caution antiraciste s’il en est, titrait le 6 mai sur « Le Cran à l’arrêt et à couteaux tirés ».
Un front noir plutôt fissuré
Dès l’annonce de l’assignation de la CDC, le pharmacien d’origine béninoise Patrick Lozès, ancien président du CRAN et aspirant à le redevenir, déplorait « cette dérive qui consiste à réduire la mémoire de l’esclavage à une transaction matérielle et à des considérations financières » et il condamnait solennellement « cette initiative intempestive » qui s’appelle « un rendez-vous manqué avec l’Histoire ». Et toc !
Cette polémique constitue le nouvel épisode d’un feuilleton dont le clou avait été précédemment la tentative de Madeira Diallo, « militant historique de la cause noire, qui s’était proclamé publiquement président du CRAN » en lieu et place de Tin. Du coup, ce dernier avait, selon Libération, « qualifié la manipulation de “coup d’État” et immédiatement saisi en référé le Tribunal de grande instance de Paris », lequel a rendu fin avril un arrêté « faisant défense » à Madeira Diallo s’usurper la présidence sous peine d’une astreinte de 100 euros par infraction constatée.
Pour M. Tin, le doute n’est pas permis : Diallo n’est que « l’homme de paille » de Lozès aujourd’hui menacé par une enquête de la Brigade de répression de la délinquance économique (BRDE) pour blanchiment et abus de confiance. Lui serait en effet reproché un détournement de subventions publiques, à concurrence de « 130.000 euros perçus entre janvier 2009 et août 2011 sur son compte », ainsi que des « virements de l’ordre de 240.000 euros versés sur le compte de sa société par World Children’s Fund » ; on se demande bien, d’ailleurs, quel était l’intérêt dans cette affaire de cette dernière organisation humanitaire internationale créée par Joseph Lam, un Chinois originaire de Hong Kong, la protection de l’enfance malheureuse ne figurant pas dans les statuts du CRAN.
Culpabiliser à tout prix les Français
Ces sommes ont-elles été détournées pour financer la (très éphémère) campagne de Lozès à la présidentielle de 2012 sous l’appellation « Allez la France »-sic ? En tout cas, on sait qu’une partie importante a été versée en 2007 à la Sofres pour « un coûteux sondage, dans lequel 56% des Noirs de France assuraient subir des discriminations ».
Voilà à quoi sert notre argent : à financer des opérations destinées à culpabiliser toujours plus les Français. Et tel est aussi l’objectif de Louis-Georges Tin : convaincre les descendants des « colonialistes français » qu’ils sont – et eux seuls – responsables et coupables de la faillite haïtienne et, d’une manière générale, de toutes les banqueroutes, disettes, guerres tribales et autres fléaux ravageant de manière endémique leurs anciennes possessions.
Claude Lorne
16/05/2013
Notes
(1) Titre d’une étude de Paul Butel parue en 1991 aux éditions Perrin. Parmi les fondateurs de dynastie : Jacques Adami, Alexandre Jacob, Jacob Azevedo, les frères Bethmann et Eschenauer, M. Hirschfeld, David et Moïse Gradis, la famille Journu-Kappelhoff, Edouard Kerstein, Jacob Mendès (ancêtre de Pierre Mendès-France), Edouard Weiss, etc.
(2) « Descendants d’esclaves ou descendants de maîtres d’esclaves ? »
(3) À quand une repentance pour les « captifs en Barbarie » ?
Giles Milton, Captifs en Barbarie, Petite Bibliothèque Payot, 2008 :
(4) Il ne faut voir aucun racisme dans cette expression : il s’agit du titre d’un film réalisé en 1986 par Thomas Gilou avec une kyrielle d’acteurs noirs dont Cheikh Doucouré, Sidi Lamine Diarra, Khoudia Seye.