Par Paul Tormenen, juriste et spécialiste des questions migratoires ♦ La récente prise de contrôle de l’Afghanistan par les Talibans a amené nos dirigeants à présenter la France comme un refuge pour ceux qui veulent fuir l’islamisme. Notre pays est-il un havre de paix si sûr pour ceux qui refusent l’application de la charia, ou, plus simplement, qui critiquent l’islam ? A bien des égards, les belles déclarations faites par le président de la République et des membres du gouvernement ne résistent pas à l’examen des faits.
Un accueil sans limite
Lors d’une allocation télévisée le 16 août, le président de la République, Emmanuel Macron, a indiqué que la France allait « mettre en sécurité nos compatriotes ainsi que tous les Afghans qui ont travaillé pour la France ». Sans s’en tenir à cette annonce, il a également déclaré que notre pays allait proposer son aide « à tous les Afghans menacés en raison de leur engagement » (1).
On peut s’interroger sur le réalisme de cette position, compte tenu du nombre potentiellement considérable d’Afghans « menacés » soit physiquement soit économiquement par l’arrivée des Talibans aux commandes de l’Afghanistan. Au-delà, notre pays est-il bien placé pour être présenté comme un refuge contre l’islamisme ? Plusieurs raisons que nous présentons ci-dessous permettent d’en douter.
En France, de plus en plus de quartiers conquis par les islamistes
Notre pays est un terrain fertile pour les islamistes : la France a la communauté musulmane la plus importante d’Europe. Les ressortissants d’Afrique du nord sont les plus représentés parmi les étrangers à qui un titre de séjour et la nationalité française sont accordés chaque année (2). Notre pays est donc bien placé, si l’on peut dire, pour subir l’offensive des islamistes qui gagnent chaque jour de nouveaux adeptes. Les islamistes ne se limitent en effet pas à pratiquer leur foi. En France comme ailleurs, ils ont un projet prosélyte d’imposition d’un nouvel ordre politico-religieux.
Un universitaire, Bernard Rougier, a, dans un livre paru fin 2019, décrit méthodiquement l’emprise des islamistes dans une partie croissante de la population musulmane. C’est une véritable stratégie de conquête de quartiers à forte concentration d’immigrés qui est à l’œuvre (3). Et c’est bien en France que cela se passe.
Le voile islamique, signe visible de la transformation de la société française
Cette stratégie passe notamment par la création d’écosystèmes islamistes dont les fidèles partagent une vision binaire du monde, divisé entre les mécréants et les fidèles de la communauté des croyants, la « Oumma ».
Les services de renseignement auraient évalué à plus de 100 000 les tenants d’un islam radical clairement identifiés en France (4). Mais comme le révèlent notamment les travaux de l’Institut Montaigne, de plus en plus de musulmans, notamment les jeunes, placent le Coran au-dessus des lois de la République. La conception intolérante de l’islam va donc bien au-delà de ce « premier cercle » (5).
Le fait que nos dirigeants fassent, contrairement à ceux d’autres pays comme l’Autriche, preuve d’une coupable complaisance vis-à-vis de la branche « présentable » des islamistes composée par des Frères musulmans, n’y est sans aucun doute pas étranger.
La stratégie des islamistes vivant en France a également été décrite dans un rapport parlementaire paru en juillet 2020 qui pointe le « développement d’un séparatisme islamiste (qui) s’est accéléré au cours de 20 dernières années » (6). Les rapporteurs soulignent que la mise en place d’écosystèmes intégristes de plus en plus nombreux expose non seulement les musulmans à un repli communautaire, mais également à un risque de radicalisation. Ils citent plusieurs exemples de la diffusion dans la société française de normes islamisées, comme l’importance croissante de la nourriture halal, la généralisation du port du voile parmi les femmes musulmanes, etc.
En France, l’exode des Français de souche et des juifs de certains quartiers
L’instauration de quartiers plus en plus homogènes religieusement et en rupture avec les mœurs autochtones aboutit à un exode de nombreux Français de souche. Le récit de l’expérience personnelle d’une journaliste dans le nord de Paris l’illustre : même les intellectuels les plus cosmopolites font parfois le constat de l’échec du « vivre-ensemble » (7). De nombreux Français de confession juive ont également fui certains quartiers, notamment en Seine Saint Denis, dont ils ressentaient l’environnement hostile.
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En France, la volonté des islamistes de s’infiltrer dans l’ensemble de la société
La stratégie de conquête et de transformation de la société française des islamistes vivant en France ne se limite pas aux musulmans. Dans les entreprises, à l’université, dans les services publics, les islamistes cherchent à imposer leur ordre politico-religieux.
Dans les entreprises, les comportements « rigoristes » signalés par les employeurs sont en augmentation depuis quelques années. L’islam est la religion repérée comme étant de loin la principale à l’origine des conflits (port du voile, refus de serrer la main à une femme, etc.) (8).
A l’université, la persistance du déni concernant l’entrisme islamiste a amené une centaine d’universitaires à dénoncer dans une tribune parue en octobre 2020 la frilosité de leurs pairs à ce sujet (9).
Plus largement, dans les services publics, à l’école et ailleurs, les islamistes entendent faire accepter des « accommodements raisonnables » aux règles communes, qui sont en fait des régressions sur mesure (10).
En France, un nombre croissant de personnes sous protection policière permanente
L’importance croissante de l’islamisme en France a une autre conséquence tangible : plusieurs dizaines de nos concitoyens vivent en France sous protection policière permanente après avoir été menacés de mort. (11). Quelle en est la raison ? Ils ont simplement émis des critiques vis-à-vis de l’islam et ont, pour certains d’entre eux, dénoncé l’islamisme qui gangrène notre société. Ils font l’objet de « fatwas » lancées par d’obscurs imams, ce qui signifie qu’ils sont désignés comme des cibles à abattre.
Pour ne citer que quelques noms : Éric Zemmour, Robert Redeker, l’imam Hassen Chalgoumi, Mohamed Sifaoui, Waleed Al-Husseini, Zineb El Rhazoui, Philippe Val, Gilles Kepel et plus récemment la jeune Mila, font partie de ces exilés de l’intérieur, privés de la liberté de mouvement et de contacts.
La France, le pays le plus touché d’Europe par les attentats islamistes
La forme la plus extrême de l’islamisme se manifeste dans les attentats qui endeuillent notre pays depuis quelques années. La France est le pays le plus touché de toute l’Union européenne par les attentats islamistes, selon une étude réalisée en 2019 par l’institut Fondapol (12) . Elle concentre près de 44% des attentats islamistes commis dans l’U.E. entre 1979 et 2019, loin devant le Royaume-Uni.
L’auteur de l’attentat à Rambouillet venait d’être régularisé : le scandale doit cesser
Le directeur général de Fondapol, Dominique Reynié, affirmait récemment que « la France est clairement le pays d’Europe le plus touché, avec 80 attaques et 330 morts entre 1979 et février 2021 ». La vague d’attentats de masse (Bataclan, Nice, etc.) a laissé la place à une série d’actes isolés et impulsifs à forte charge symbolique : meurtre du prêtre Hamel lors d’un office, décapitation du professeur Samuel Paty, attentat dans une basilique à Nice, assassinat d’une policière sur son lieu de travail à Rambouillet, etc. Chacun sait que ce type d’actes perpétrés par des islamistes a de fortes chances de se renouveler.
Dans ce contexte, est-il bien raisonnable de présenter notre pays comme un refuge contre l’islamisme à des ressortissants afghans dont les convictions religieuses sont, d’après une enquête faite par le Pew research, très majoritairement marquées par un rigorisme extrême (13) ? La réponse est bien évidemment dans la question.
Avant d’ouvrir toujours davantage les frontières de notre pays à des ressortissants étrangers, notre président jupitérien serait bien inspiré d’entreprendre l’un des douze travaux d’Hercule, nettoyer les écuries d’Augias.
Paul Tormenen
07/09/2021
(1) Allocution du président de la République relative à la situation en Afghanistan. 16 août 2021. Site de l’Elysée
(2) Chiffres clefs de l’immigration. 2020. Ministère de l’intérieur.
(3) « Les territoires conquis de l’islamisme ». Bernard Rougier. PUF. 2019
(4) « 100 000 tenants de l’islamisme radical en France ». Le Figaro. 17 août 2020
(5) « Un autre islam est possible ». Institut Montaigne. Septembre 2016. Sondage IFOP pour Charlie hebdo et la fondation Jean Jaurès du 2 septembre 2020
(6) Rapport n°595 de Madame Jacqueline Eustache-Brinio. Sénat. 7 juillet 2020
(7) « Rue Jean6pierre Timbaud ». Geraldine Smith. E. Stock. 2016
(8) « Les conflits liés au fait religieux augmentent en entreprise ». Réforme.net. 6 mai 2021
(9) « Une centaine d’universitaires alertent : « sur l’islamisme, ce que nous menace, c’est la persistance du déni ». Le Monde. 31 octobre 2020
(10) « Une France soumise. La voix du refus ». Ouvrage collectif. Ed. Albin Michel. 2017
(11) « Ligne rouge. Islamisme. Enquête sur une menace ». BFM TV. 29 mars 2021
(12) « Les attentats islamistes dans le monde. 1979-2019 ». Fondapol.
«(13) « Afghanistan : la France va-t-elle répéter les mêmes erreurs que lors de la crise migratoire de 2015 ? ». Breizh-Info. 24 août 2021