Par Michel Geoffroy, auteur de La Super-classe mondiale contre les peuples, La Nouvelle guerre des mondes et Bienvenue dans le meilleur des mondes ♦ Grande nouvelle : le roi Charles III est en visite officielle en France. Les médias ne nous parlent que de cela : combien y aura-t-il de couverts au dîner officiel, que mangeront les altesses, que vont-elles visiter, etc. Bref, comme toujours, les médias de grand chemin nous « informent ». Mais ils évitent de poser la seule question qui importe : que nous apporte vraiment cette visite ?
On sait en effet depuis l’enfance que 0 + 0 = la tête à Toto, c’est-à-dire zéro. La rencontre officielle de Charles III et d’Emmanuel Macron, c’est la rencontre de deux impuissances : elle ne débouchera donc sur rien, sinon un énième spectacle politico- médiatique. Et une occasion pour Emmanuel Macron de faire croire qu’il compte encore sur la scène internationale puisqu’il parle anglais. Du spectacle, donc, à l’usage des Français.
Le roi n’est qu’une belle marionnette
Le monarque britannique n’a aucun pouvoir politique depuis la révolution anglaise. Il en a même encore moins qu’un président de la Quatrième République, qui, lui au moins, pouvait engager des consultations politiques en vue de désigner le futur président du Conseil.
Les cinéphiles se souviendront sans doute du film de Tom Hooper Le Discours d’un roi, où l’on voit George VI annoncer péniblement à la radio la déclaration de guerre contre l’Allemagne : mais ce discours, il le reçoit du Premier ministre britannique juste avant d’enregistrer et sans pouvoir y modifier quoi que ce soit Le roi présente bien mais n’est qu’une marionnette.
Le roi d’Angleterre est d’autant plus populaire – du moins chez les autochtones grands-bretons – qu’il inaugure les chrysanthèmes au nom du peuple britannique, et qu’il n’est à l’origine d’aucune décision d’importance. On dit Charles III écolo, ce qui va bien avec les chrysanthèmes…
C’est le prototype du monarque progressiste qu’aime tant la gauche : celui qui laisse les autres – riches, partis et lobbies – gouverner et qui ne peut rien empêcher. Il a de belles mains, car il n’a pas de mains.
Macron n’a prise sur rien
Emmanuel Macron se trouve dans une situation institutionnelle différente mais le résultat est à près le même que pour Charles III, sauf que le président français est impopulaire et ne peut plus aller nulle part en France sans se faire huer ou casseroler.
Mais, comme Charles III, Emmanuel Macron n’a prise sur rien de réel.
Parce que la France, devenue l’homme malade de l’Europe, a perdu toute crédibilité, ne joue plus son rôle de puissance d’équilibre dans le monde et n’est plus leader en Europe, rôle dévolu désormais à l’Allemagne.
Parce que la diplomatie d’Emmanuel Macron est à la fois brouillonne et enfantine : il a réussi à se brouiller avec à peu près tout le monde pour des broutilles, tout en s’alignant en tout sur l’Allemagne, l’UE, l’Ukraine et l’OTAN au mépris des intérêts français, comme sur le marché européen de l’énergie par exemple. Et il assiste, impuissant, à la perte d’influence de la France en Afrique, qu’il a lui-même contribué à accélérer par ses gaffes.
Emmanuel Macron n’a enfin prise sur rien parce qu’au sein de l’UE les gouvernants visibles ne sont pas ceux qui prennent les vraies décisions.
Son seul pouvoir – et c’est en fait la mission que lui a donnée l’oligarchie – est de réprimer et de censurer les Français pour leur imposer ce dont ils ne veulent pas : toujours plus d’immigration, toujours plus d’écologie punitive, toujours plus de désindustrialisation et de pauvreté, toujours plus de guerre en Europe, toujours plus de pouvoirs pour la Commission européenne, toujours plus d’atlantisme.
Nous étions seuls
En recevant Charles III, Emmanuel Macron ne se contente pas de faire de la communication. Il tente aussi de renouer avec la vieille politique de la France affaiblie, cherchant désespérément auprès de la Grande Bretagne un appui contre la puissance allemande. Comme elle le fit après la guerre de 1870 et surtout après celle 1914-1918.
Mais comme le rappelle Gérard Araud dans son essai “Nous étions seuls”[1] cette politique ne produisit pas les résultats escomptés, car la Grande Bretagne, entre la France et l’Allemagne, choisit cette dernière : elle se méfiait en effet d’une hégémonie française en Europe. Les Etats-Unis firent la même chose car ils voulaient commercer avec l’Allemagne et n’aidèrent pas la France à obtenir les réparations de guerre qu’elle espérait.
Il en va toujours de même aujourd’hui.
Avec l’UE et la guerre en Ukraine les pays anglo-saxons ont atteint leur objectif séculaire : marginaliser la France et couper l’Europe de la Russie. Ils ne vont pas renoncer à cet acquis pour complaire à un Emmanuel Macron marginalisé sur la scène internationale.
Le vassal reçoit le suzerain
Il y a cependant une différence de taille entre Charles III et Emmanuel Macron, et pas seulement quant à l’éthique personnelle de chacun. L’éducation et la tenue d’un roi d’un côté, celles d’un banquier arriviste de l’autre.
Charles III incarne aussi le monde anglo-saxon, celui qui dirige encore l’Occident par le truchement des États-Unis, dont la Grande-Bretagne est le courtier en Europe. Le roi est encore du côté des maîtres, même si le monde polycentrique est en train de mettre à mal cette domination.
Emmanuel Macron, lui, est du côté des vassaux : de ceux qui ne sont plus libres de leur destin, de ceux qui sont alignés, de ceux qui obéissent.
À Versailles, ce ne sont donc pas deux chefs d’État qui se rencontrent, deux « homologues », comme disent les médias, mais un vassal français qui reçoit son suzerain britannique.
Michel Geoffroy
22/09/2023
[1] Tallandier, 2023
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