Derrière DSK, il y avait une campagne de manipulation médiatique de l’opinion. Conduite par les communicants d’Euro RSCG. Décryptage de Polémia.
L’argent, les femmes et la judéité
Interrogé fin avril par Libération, DSK avait avoué trois fragilités possibles : « L’argent, les femmes et sa judéité ».
De fait, un homme qui avait déclaré « Je me lève chaque matin en me demandant ce que je peux faire pour Israël » risquait d’avoir du mal à mobiliser le vote des banlieues arabo-musulmanes qui s’était massivement porté sur Ségolène Royal en 2007.
Mais avant même d’arriver à l’élection, encore fallait-il remporter la primaire socialiste !
Comment un homme qui incarnait la superclasse et la finance mondiales aurait-il pu gagner les suffrages des militants socialistes dont beaucoup continuent d’appartenir à la fonction publique ? Comment un homme qui avait imposé le plan de rigueur de la Grèce et salué le modèle tunisien de Ben Ali aurait-il pu rassembler les suffrages de la gauche militante ?
De même, il est étonnant que le PS, parti féminin et parti féministe, ait pu envisager de se donner à un homme porté au harcèlement agressif envers les femmes, selon un registre plus proche de la prédation que de la séduction.
Comment diable dans ces conditions DSK pouvait-il donc passer pour présidentiable ?
DSK caracolait dans les sondages grâce à son image de sauveur économique de la planète.
Il faut ici distinguer la réalité de l’image véhiculée par les médias.
Dans la réalité, le FMI et son patron ont fonctionné comme une sorte de secrétariat permanent du G20. Mais en dehors de communiqués ronflants, les G20, G8 ou G5 n’ont pris que bien peu de décisions concrètes ; et surtout ils n’ont en rien remis au carré les pratiques douteuses de la finance mondiale. Bien au contraire, ils ont ménagé les intérêts des grandes banques d’affaires et n’ont rien entrepris contre la fraude systémique.
C’est la seule magie de la communication qui a fait de DSK le deus ex machina d’une hypothétique sortie de crise économique. Et il n’y a que les Français qui croyaient cela. A New York, on l’a vu, DSK n’a pas la célébrité que les Français lui prêtent…
Les Français ont été victimes de manipulations médiatiques
C’est l’agence de communication Euro RSCG (groupe Bolloré) qui était à la manœuvre. Cette agence a obtenu la communication du FMI pour l’Europe et l’Afrique. En pratique elle a contribué à imposer en France l’image de « super DSK ». Stéphane Fouks, le patron d’Euro RSCG, avait, dès les années 1990, la réputation « d’être un commerçant capable de vendre une télé couleur à un aveugle ». Et Euro RSCG est une puissante agence. Elle assure la communication de 14 sociétés du CAC 40. Sans compter la banque Lazard, Orange et Mac Donald’s France.
Le métier d’Euro RSCG est de faire passer aux patrons de presse et aux médias les « messages » politiques des gros annonceurs. Or beaucoup d’entre eux jugeaient le patron du FMI comme le meilleur candidat à la présidentielle française du point de vue de la finance et des multinationales. On est ici en plein mélange des genres entre la presse, la publicité, les affaires et la politique.
Vers un scandale Euro RSCG ?
Outre Stéphane Fouks, le patron d’Euro RSCG, trois personnes semblent avoir travaillé quasiment à plein temps (et à très gros salaires et « faux frais ») pour DSK : Ramzi Khiroun (l’homme à la Porsche Panamera), Gilles Finchestein (une plume de DSK) et Anne Hommel (attachée de presse). Ce sont eux qui sont aujourd’hui soupçonnés d’avoir lancé la thèse du « complot » pour tenter de protéger DSK.
La moralité, sinon la légalité, de toutes ces pratiques est plus que douteuse.
En France les règles du financement politique excluent le financement d’une campagne politique par les entreprises privées comme par les Etats étrangers ou les organisations internationales.
De même une entreprise n’a pas le droit de servir gratuitement les ambitions d’un homme en abusant de ses biens sociaux. La promotion nationale de DSK entrait-elle dans le marché international passé par le FMI avec Euro RSCG ? Et sous quelles conditions ?
Qui au final règlera les factures de la pré-campagne des primaires de DSK ? Le FMI, le PS ou Anne Sinclair ?
Quoi qu’il en soit on voit ici la malfaisance des « spin doctors » à la française : ces manipulateurs d’opinion, ces petits génies de la communication, qui tentaient d’imposer à la gauche d’abord, aux Français ensuite, un homme manifestement peu fait pour les hautes fonctions auxquelles la superclasse mondiale aspirait pour lui !
Andrea Massari
18/05/2011