L’arroseur arrosé est un comique dont on ne se lasse jamais. Le 29 octobre, deux douches froides sont tombées dru sur la bien-pensance médiatique de BFM TV.
Donald Trump, Puerto Rico et l’immigration
Tout d’abord Trump. La chaîne française d’info en continu fait campagne – et elle n’est pas la seule – contre le candidat républicain. Elle pense avoir trouvé le moyen de lui nuire en mettant en avant une blague d’un humoriste trumpiste qui, lors du gigantesque meeting à New York, avait comparé Porto Rico à une sorte d’immense poubelle flottante. Ce racisme assumé allait, analysaient et surtout espéraient les journalistes, coûter à Trump l’élection en lui faisant perdre les suffrages hispaniques. D’ailleurs, il allait devoir s’expliquer devant la presse. On était donc prêt pour le procès médiatique en direct du « fasciste ». Un direct est programmé. Finalement, il n’y a pas de questions de la presse mais la retransmission sur la chaîne d’une allocution devant des partisans de l’ancien président américain. Un discours centré sur l’immigration. Lors de cette fausse conférence de presse, Donald Trump en a profité pour parler fort. Il a notamment qualifié les migrants « d’assassins, de meurtriers qui risquent de détruire notre pays ». Il s’est appuyé sur le témoignage de personnes venues sur place ou en vidéo. S’il s’en est pris aux migrants, il s’en est également pris aux gangs qui seront la cible de sa première mesure s’il est élu. « J’annonce aujourd’hui que la première chose que je ferai si je suis élu, c’est de mettre hors d’état de nuire tous ces gangs, et que je prendrai des mesures pour dédommager les victimes de ces gangs. »
En revanche, aucun mot sur la polémique autour de Porto Rico.
Et pendant vingt minutes, on a donc entendu sur BFM TV le candidat fustiger les migrants Des propos cinglants qui en France tomberaient sous le coup de la loi et ne passeraient jamais d’ailleurs dans les médias français. On se demande même si la télé ne pourrait pas être poursuivie pour propagation par diffusion de propos discriminatoires et racistes… Ce serait la cerise sur le gâteau ! Cerise sur le gâteau il y a eu déjà avec le président Biden réagissant et laissant entendre que les « ordures » n’étaient pas à Porto Rico maïs du côté de Trump. Parlait-il des propos ou des électeurs, on ne saura jamais, lui-même non plus certainement d’ailleurs. Mais le mal est fait : malgré un rétropédalage, il pénalise la campagne de Kamala qui décidément ne va pas bien.
Yassine Belattar en voyage officiel au Maroc
Et puis, dans l’après-midi, BFM TV qui, contrairement à CNews et Europe 1 qui n’en avaient pas dit un mot, a tenté de faire le buzz sur la présence, dans la pléthorique délégation française au Maroc, de l’islamo-humoriste Yassine Belattar. L’insupportable Benjamin Duhamel, avec son ton suffisant et supérieur, s’est retrouvé insulté par son invité. Récit de l’entretien dans Le Figaro : « On a l’impression que l’Élysée n’assume pas votre présence… », lance le présentateur qui cherche à comprendre pourquoi sa présence semble finalement gêner. Réponse de l’intéressé : « C’est vous qui n’assumez pas que des gens qui s’appellent Yassine Belattar puissent être autre chose que des cibles, éliminées du débat public. »
L’humoriste autoproclamé se montre cinglant, intimant à son interlocuteur de « devenir un journaliste à part entière ». Avant de reformuler les mêmes griefs : « Votre petit monde d’éditorialistes, d’animateurs ou de quasi-journalistes n’a jamais accepté l’idée que des gens comme moi s’émancipent pour faire autre chose que raconter des blagounettes. »
Le journaliste essaie à plusieurs reprises de donner un meilleur cours à l’interview : « On va essayer de fixer des règles pour cet échange », « Je me permets d’être ferme, on arrête les attaques ad hominem », « Je regrette qu’on ne puisse pas avoir cette discussion de façon plus apaisée »… On boit du petit-lait. Il se fait tout petit, le donneur de leçons, face au Belattar ; s’en prendre à lui est, il le sait, un pari risqué pour un journaliste de la conformité diversitaire. Belattar au Maroc, une insulte pour les Marocains si traditionnels et respectueux de la famille. Un binational comme les « indigènes » les détestent.
Identité et élections
Décidément, le président Macron a du mal avec le respect des identités nationales et des sensibilités spécifiques. Il est comme Kamala Harris, finalement. Faire campagne chez les Afro-Américains et les Latinos en vantant les valeurs transgenres, c’est vouloir attraper des mouches avec du vinaigre et cela pourrait lui coûter l’élection. Les Français, selon BFM TV, sont très largement pour Kamala contre Donald. Les médias hexagonaux globalement s’en félicitent, mais les Français ne votent pas aux élections américaines pas plus que nos journalistes. Trump conserve donc toutes ses chances.
Pierre Boisguilbert
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