Par Pierre Boisguilbert, journaliste spécialiste des médias et chroniqueur de politique étrangère ♦ Puisqu’ils se servent de tout, tout est bon à prendre. Et quand on se sent moins seul, c’est que l’on a marqué des points et progressé.
À dire la vérité, on pouvait penser que ce serait impossible. Tous les matins on peut se demander jusqu’à quand ce sera toléré, jusqu’à quand ça va durer ? CNews brise ce qui était la norme : plus on multipliait les chaines de télévision plus on renforçait l’idéologie médiatique. En effet, l’info en continu participe en permanence au formatage de l’opinion à sens unique. Tout le monde traite les mêmes sujets et tout le monde dit la même chose. Ce n’est plus le cas de CNews, en tout cas pas tout le temps.
Un couac dans l’église cathodique
Entre l’intellectuel dissident Éric Zemmour et l’animateur iconoclaste Pascal Praud, la chaine se démarque nettement sur certains créneaux horaires, ou elle bat des records d’audience. Ce qui se passe sur cette chaine installée dans le PAF est un hommage à tous ceux qui depuis des années, en commençant par Polémia, fustigent l’instrumentalisation à sens unique de l’information dominante.
Sur CNews, on dénonce le discours unique, l’orientation des sujets, leur choix, la tyrannie de la victimisation contre l’homme, le Blanc, la France, notre histoire. C’est un éléphant dans le magasin de porcelaine médiatique.
Alors, bien sûr, il y a des dérapages, des erreurs, des vulgarités mais surtout des vérités qu’il fallait chercher exclusivement auparavant en dehors du courant « mainstream ». Ce qui était marginal devient visible et reconnu. Il est rappelé presque au quotidien que la liberté d’expression, c’est aussi pour ceux qui ne pensent pas comme tout le monde ou comme l’on doit penser selon l’église cathodique.
Proportionnellement, c’est peu de choses en réalité mais, pour les maitres de la bonne parole, c’est inacceptable. On voit donc un affolement des bien-pensants qui suscite la multiplication des vocations de petits inquisiteurs.
Surveillance et audiences
La chaine est sous surveillance, on peut s’en douter. On va tenter de la toucher au portefeuille pour dissuader Vincent Bolloré de continuer à la soutenir, d’où procès couteux et retraits d’annonceur. Mais, pour le moment, ça tient.
La meilleure protection est bien sûr l’audience. Elle est au rendez-vous, car le bouche à oreille draine vers ce média tous ceux qui ne supportent plus le langage unique. Il y a la curiosité, puis l’adhésion. Une certaine France a besoin d’une autre information, d’un autre regard sur l’actualité. Cela est déjà pris en compte sur LCI. La fissure peut se transformer en brèche et le barrage redoute de céder.
Les dangers pour la chaine sont donc de plus en plus nombreux. Le dérapage fatal en premier lieu, tout le service public attend le « point de détail » de CNews. Mais il y a aussi le côté un peu répétitif des analyses de Zemmour et la cacophonie des intervenants chez Pascal Praud. Tout n’est pas parfait et des médias alternatifs tels TVLibertés sont parfois plus professionnels et mieux construits. Mais CNews a le mérite d’exister au milieu du système, au cœur du système. Il ne faut certes pas trop en attendre. Mais dans la bataille que nous menons depuis si longtemps, et souvent si seuls il faut « sauver le soldat CNews ».
Pierre Boisguilbert
09/04/2021
Source : Correspondance Polémia