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Changement d’humeur dramatique chez les Allemands

Changement d’humeur dramatique chez les Allemands

par | 2 octobre 2015 | Géopolitique

Changement d’humeur dramatique chez les Allemands

La semaine dernière, l’image s’est renversée : l’afflux de réfugiés suscite désormais la peur chez la majorité des Allemands. La popularité de la chancelière est en baisse. La popularité de son critique le plus en vue, Seehofer, fait une progression à deux chiffres.

Après l’arrivée en Allemagne, en septembre, de plus de 200.000 demandeurs d’asile – c’est plus que jamais en un seul mois – le regard que la population porte sur l’immigration s’assombrit. L’humeur semble basculer.

Selon ARD-Deutschlandtrend, [sondage réalisé] par Infratest Dimap pour l’ARD, [émission] Thèmes du jour, et Die Welt, l’inquiétude croît : si, début septembre, seulement 38% des sondés admettaient être effrayés par le nombre de réfugiés arrivant en Allemagne, quatre bonnes semaines plus tard, un Allemand sur deux (51%) concède son inquiétude. Il est également possible que la violence croissante dans les centres de réfugiés y ait contribué.

Le fort changement d’état d’esprit est particulièrement remarquable dans la seule dernière semaine. En sept jours, le nombre de sondés en accord avec la proposition : « Cela me fait peur que tant de réfugiés viennent chez nous » a augmenté de six pour cent.

Cette préoccupation entraîne également une perception plus sceptique de l’immigration en général : alors qu’au début de septembre, 45% des sondés croyaient que l’immigration serait avantageuse pour la République fédérale, ils ne sont plus actuellement qu’un tiers (35%). A contrario, 44% pensent aujourd’hui que les inconvénients de l’immigration pour l’Allemagne prédominent.

Selon Deutschlandtrend, l’immigration est considérée comme critique, moins pour des raisons économiques que pour des raisons socioculturelles. Alors que six sondés sur dix sont d’avis que les réfugiés trouveront à s’employer sur le marché du travail, et qu’autant doutent que le nombre élevé de réfugiés ne menace sérieusement le bien-être de la République fédérale, à peine la moitié des Allemands (47%) perçoivent actuellement les réfugiés comme un enrichissement pour la vie en Allemagne. Il y a un mois, encore cinq pour cent étaient plus confiants.

Comme dans de nombreuses autres études, Deutschlandtrend laisse entrevoir qu’en Allemagne également la situation économique personnelle influence le regard porté sur les réfugiés. Alors que seulement 44% des personnes avec un revenu net mensuel supérieur à 3000 euros ont peur de l’immigration de masse, elles sont 54% parmi celles disposant de moins de 3.000 euros.

Le soutien à la chancelière s’érode

Le mécontentement croissant vis-à-vis des migrants se répercute également sur la popularité du gouvernement fédéral et de son patron, en forte baisse. Alors que le cabinet de Berlin a pu, pendant un an et demi, se targuer d’un jugement plutôt positif de l’électorat, il rencontre avec ses prestations actuelles un accueil mitigé. Après 53% de satisfaits en septembre, il n’y a plus actuellement que 48% des Allemands à porter un jugement globalement favorable sur le travail du gouvernement, contre 51% qui le critiquent – c’est la première fois depuis longtemps que se dégage une courte majorité [de mécontents].

Comme d’autres enquêtes auparavant, Deutschlandtrend confirme également une baisse de popularité pour la chancelière allemande Angela Merkel (CDU). Actuellement, seulement 54% des Allemands (-9%) sont satisfaits du travail du chef du gouvernement, la valeur la plus faible depuis décembre 2011. Cependant, d’autres politiciens accusent un recul significatif de leur soutien. Parmi ceux-ci, on peut compter le ministre SPD des Affaires étrangères Frank-Walter Steinmeier (-7%, à 65%) et le ministre des Finances CDU Wolfgang Schäuble (-5%, à 64%), ainsi que le ministre de la Défense CDU, Ursula von der Leyen (-6%, à 39%) confrontée à des allégations de plagiat.

Seul le ministre-président de la Bavière Horst Seehofer progresse très significativement (+11%). Le président CSU exprime avec son parti, depuis plusieurs semaines, le malaise provoqué par l’ouverture de facto de la frontière aux réfugiés et aux migrants en provenance de l’Espace Schengen, et attaque violemment Merkel.

Il touche là, bien évidemment, une zone sensible : avec 39%, il atteint sa plus haute cote d’approbation, selon Deutschlandtrend, depuis avril 2014. C’est loin d’être sans intérêt pour les rapports de force au sein de l’Union : alors que le leader de la CSU progresse fortement chez les militants et sympathisants (+7%), Merkel voit là aussi ses soutiens s’éroder (-5%).

L’AfD à 6%

L’incapacité durable du gouvernement fédéral à gérer les flux migratoires de manière ordonnée profite en particulier à l’AfD, qui a dérivé de manière significative vers la droite depuis le départ du fondateur du parti Bernd Lucke. Elle semble marquer des points dans la crise des réfugiés, avec ses exigences de frontières sûres, de moins d’immigration et de plus d’expulsions.

Si des élections législatives avaient lieu dimanche, le parti de droite conservatrice ferait son entrée au Parlement avec 6% des voix (+2%). De même, avec 5%, le FDP pourrait revenir dans le nouveau Bundestag. Alors que le SPD stagne à 24%, l’Union (40%) et les Verts (10%) reculent tous deux de 2% par rapport au mois précédent. Les autres partis atteindraient ensemble un total de 6%, comme le mois précédent.

Marcel Leubecher
Source : Die Welt
Titre original : Gravierender Stimmungsumschwung bei den Deutschen
Traduction : F.S.
01/10/2015

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