« Il y a là des éléments stratégiques d’importance qui méritent une intervention. »
Ce petit texte, intitulé « Au nom du réalisme », traite de notre politique étrangère dans le Proche-Orient et en particulier de notre participation à l’action menée contre l’État Islamique.
« Nous devons participer à la coalition contre l’État Islamique (1). Nous devons y aller pour mettre un terme à la barbarie mise en œuvre par ces terroristes ; n’oublions pas ces images atroces de journalistes et humanitaires égorgés au couteau devant les caméras. Nous devons y aller pour mettre un terme aux massacres généralisés commis par ces barbares ; nous avons tous vu toutes ces images de têtes coupées, d’assassinats d’hommes à terre, mitraillés par dizaines, à la Kalash, dans le désert. Nous devons y aller au nom de la solidarité civilisationnelle, pour défendre les chrétiens d’Orient persécutés comme les autres minorités d’ailleurs (Yézidis notamment mais aussi les Zoroastriens, les Kurdes, etc.). »
Il y a ainsi de quoi (2) mobiliser les consciences et justifier une intervention.
Toutes ces dénonciations sont vraies, malheureusement.
Cela étant dit, regardons ce qu’il en est… par ailleurs. Traversons les apparences, dépassons ces injonctions, cette « version pour France-Dimanche et la presse du cœur ». Pensez-vous que ce sont ces genres de motifs qui guident vraiment les États dans la conduite des guerres (aujourd’hui ou par le passé, d’ailleurs) ? Soyons sérieux deux minutes.
Procédons par ordre. Superposez trois cartes.
La première, celle des exploitants et des concessions pétrolières et gazières en Irak. Vous y trouverez celles de Total, ExxonMobil, Shell, BP, Lukoil, Petronas, Korea Gaz Corporation, ENI, China National Petroleum, Chevron, etc.
La seconde, celle du tracé des pipelines gaziers et pétroliers dans ce pays.
La dernière, celle du territoire que couvre actuellement ce fameux État Islamique.
L’on s’aperçoit que l’État croupion du « Calife à la Rolex » coiffe précisément les éléments présents dans la première et dans la seconde carte.
Et voilà : vous avez le motif profond de l’intervention. Par-delà la parabole, ce réel caché par un réel apparent, il y a là des éléments stratégiques d’importance qui méritent une intervention. Ce n’est pas plus compliqué que cela. Sans compter que personne ne nous dit qui achète et à quel prix le pétrole et le gaz que vend cet État Islamique. En dehors du problème des approvisionnements en énergie fossile, il ne faut pas négliger non plus l’impact que peut avoir sur les marchés des hydrocarbures cette nouvelle entité islamique ; les contrats d’exploitation et les concessions sont menacés. Sans avoir à affiner, à chercher les détails, nous avons là, déjà, des motifs nécessaires et suffisants pour une intervention.
Mais, bien sûr, les premiers motifs cités plus haut, sont plus «sexy» médiatiquement parlant. Aujourd’hui, il faut savoir jouer avec non seulement les opinions publiques mais aussi avec la susceptibilité de certains États. Alors, va pour les grands sentiments et la compassion !
Giovanni Drogo
Source : giovanni.drogo.over-blog.com
19/09/2014
Notes
- Pardon : le « Daesh » ; c’est ainsi qu’il faut désigner cette entité. Alors que cela veut dire exactement la même chose en arabe, mais passons…
- Toutes ces horreurs sont parfaitement médiatisées, diffusées, propagées à l’envi par les médias de masse et autorisées en cela par les différentes autorités. Ce n’est pas un hasard.