« Aucune majorité parlementaire prévisible, en 2017 ou avant s’il y a lieu, n’osera voter cette abrogation, j’entends une véritable abrogation avec son coût politique. »
En campagne pour la présidence de l’UMP, samedi 15 novembre, devant le collectif « Sens commun », Nicolas Sarkozy a tout d’abord déclaré qu’il faudrait une « réécriture complète » de la loi Taubira de 2013. Puis, sous les cris de « Abrogation ! » scandés par le public, il a osé un méprisant : « Si ça vous fait plaisir, ça coûte pas cher de dire Abrogation ». Aussi la foule a-t-elle exulté, mais les dupes qui la composaient ont dû bien vite revenir de leur illusion collective. Car l’ancien président de la République, s’il est plutôt resté dans le vague, n’a toutefois pas caché qu’il y aurait toujours, à son idée, un mariage adapté pour les homosexuels (peut-être un peu déconnecté des règles de la filiation). Il n’a donc à peu près rien dit de sûr : évidemment, à ce train-là, ça ne coûte pas cher. C’est du moins ce qu’il pensait…
La question de l’abrogation de la loi
Depuis, les déclarations sur l’impossibilité supposée d’abroger la loi sur le mariage homosexuel fleurissent dans la presse. Pourtant l’abrogation est formellement possible, les situations personnelles antérieures étant mises à l’abri de la rétroactivité, pour solder le passé, comme en matière d’annulation de mariage (théorie bien rodée dite du mariage putatif).
Ce que la loi peut faire, la loi peut le défaire, cela est en droit formel parfaitement clair.
En revanche, ce qui est plus douteux, c’est quant à l’ordre moral, puisque à travers les droits ravis par le Conseil constitutionnel et les prérogatives concédées par la République aux juges de la Cour européenne des droits de l’homme, nos lois peuvent désormais être censurées, au nom d’un prétendu « État de droit » (*) d’importation qui n’est en réalité qu’une morale subversive antidémocratique.
Le Conseil constitutionnel, par un arrêt de 1971, a perpétré un véritable coup d’État juridictionnel par sa jurisprudence dite du « bloc de constitutionnalité ». Aux termes de cette jurisprudence, le Conseil s’est arrogé le droit d’annuler une loi sur des motifs idéologiques ou moraux. Pour parfaire ce « gouvernement des juges », François Mitterrand a livré la France, dès 1981, à la juridiction du machin-truc cosmopolite de Strasbourg, qui juge comme-ci, comme-ça, en fonction de principes tout aussi partiaux.
C’est ainsi qu’une hypothétique loi d’abrogation risque d’être mise en échec, soit par son annulation sous l’autorité de la première de ces juridictions, soit par la condamnation de la République à des dommages et intérêts par la seconde. Mais ni les membres du Conseil constitutionnel, ni les juges de la Cour européenne des droits de l’homme, prêts à se faire les souteneurs du « droit à l’amour », n’ont l’onction démocratique. Alors ? Le déficit démocratique total.
Seule la démocratie directe…
Aucune majorité parlementaire prévisible, en 2017 ou avant s’il y a lieu, n’osera voter cette abrogation, j’entends une véritable abrogation avec son coût politique. Nos responsables politiques, dans leur écrasante majorité, ne songent qu’à leur carrière et, par conséquent, ils ne prendront pas d’initiatives : en effet, ça peut coûter très, très cher. Contrairement aux promesses, comme monsieur Sarkozy le sait…
Dans ces conditions, seul le référendum permettrait de revenir sur la subversion de l’institution matrimoniale et le démantèlement de la famille. Seuls les orateurs politiques qui s’engageraient à soumettre la question au référendum peuvent être crédibles.
Mais le référendum, négation de l’ « État de droit », négation de l’ordre moral, fait peur aux gens du Système. Et si, au-delà de la question ponctuelle du « mariage pour tous », ce procédé de démocratie directe ne nous débarrasse pas du gouvernement des juges, notre avenir nous échappera. J’entends : échappera au peuple.
Éric Delcroix
18/11/2014
(*) Antonyme d’État souverain.