Par Nicolas Faure, spécialiste de l’Allemagne et traducteur ♦ Plus que ses voisins encore, l’Allemagne – sous la pression des Verts – s’est engagée dans la sortie du nucléaire et le développement des énergies renouvelables. À rebours de cette politique, le parti identitaire AfD conteste les thèses du GIEC et refuse le dogme du réchauffement climatique d’origine anthropique ainsi que la « décarbonation » qui en résulte. Spécialiste de l’Allemagne et de l’AfD, traducteur, Nicolas Faure (à ne pas confondre avec Nicolas Faure d’I-Média et Sunrise !) nous présente ce point de vue atypique.
Polémia
Une transition énergétique radicale
L’Energiewende désigne la transition énergétique allemande. Ses deux mesures phares sont la sortie du nucléaire en 2022 et une électricité 100 % renouvelable en 2050.
En 2011, à la suite de la catastrophe nucléaire de Fukushima, les autorités allemandes lancent la transition énergétique, l’Energiewende.
L’abandon du nucléaire et des énergies fossiles, leur remplacement par des énergies renouvelables, si possible locales, le développement de la mobilité électrique et l’accession à une économie non émissive en carbone constituaient des buts vertueux qui paraissaient envisageables à relativement court terme et au prix d’un effort financier raisonnable.
Depuis, le pays est passé de 20 à 33% d’énergies renouvelables électriques. En Allemagne, les énergies renouvelables sont accessibles au grand public, et 50% des installations sont au profit de particuliers ou d’agriculteurs.
L’Energiewende est devenue l’une des préoccupations majeures de l’État allemand, promue au rang de projet de société par le soutien « quasi unanime » des différents partis politiques et de la population.
Cela étant, la position du parti de la droite nationale allemande, l’AfD, semble se démarquer assez nettement de l’impression de consensus qu’ont suscitée les projets de loi au sujet de la transition énergétique, votés au parlement au cours de ces dernières années.
Les critiques de l’AfD
Climatosceptique, l’Alternative für Deutschland déclare vouloir mettre un terme à la politique de lutte contre le réchauffement climatique. Son programme affirme que « le CO2 n’est pas un produit polluant »et que davantage de CO2 permettrait même des récoltes plus abondantes. Il critique aussi la politique énergétique de l’Allemagne et veut stopper l’« expansion incontrôlée de l’énergie éolienne », l’un de ses leaders, Björn Höcke, proposant même d’interdire les éoliennes. Le parti s’engage par ailleurs en faveur du diesel et de l’exploitation du charbon.
Voici un extrait de son programme en matière d’environnement :
Le climat se modifie depuis que la Terre existe. La politique de protection du climat repose sur des modèles climatiques hypothétiques qui se basent sur des simulations informatiques du GIEC (groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat). Le gaz carbonique (CO2) n’est pas un polluant, mais un composant indispensable à toute vie. Le GIEC s’emploie à démontrer que les émissions de gaz carbonique causées par l’homme conduisent à un réchauffement global avec des conséquences très graves pour l’humanité. A cette fin, l’on se réfère à des simulations informatiques dont les conclusions ne sont pas corroborées par des mesures ou des observations. Depuis que la terre est dotée d’une atmosphère, des ères glaciaires et des périodes chaudes se succèdent. Nous connaissons aujourd’hui une période chaude avec des températures identiques à celles des périodes chaudes du moyen-âge ou de l’époque romaine. Les simulations du GIEC ne peuvent expliquer ces changements climatiques.
Au XXe siècle, la température moyenne globale a augmenté d’environ 0,8°C. Depuis la fin des années 90 du siècle dernier, il n’y a pourtant pas eu de nouvelle augmentation, contrairement à ce que prévoyait le GIEC et bien que, durant cette période, les émissions de gaz carboniques aient progressé plus que jamais. Le GIEC et le gouvernement fédéral passent sous silence l’effet bénéfique du gaz carbonique sur la croissance végétale et, par conséquent, sur l’alimentation mondiale. Plus l’atmosphère en contient, plus la croissance végétale est forte.
Sous le slogan « Une Allemagne climatiquement neutre pour 2050 » par le biais de la « décarbonisation », le gouvernement fédéral a profité abusivement de la concentration croissante de gaz carbonique pour procéder à la « grande transformation » de la société avec, pour conséquence, une réduction massive des libertés individuelles et économiques. La réduction forcée et programmée des émissions de gaz carbonique de plus de 85 % affaiblirait l’économie allemande et ferait baisser le niveau de vie. Notre approvisionnement en électricité jusque-là fiable serait déstabilisé et plus lourdement taxé ; par ailleurs, la production de chaleur par des combustibles fossiles doit être pratiquement ramenée à zéro. L’AfD dit de ce fait « oui à la protection de l’environnement », mais souhaite mettre fin à la « politique de protection du climat » et aux programmes de décarbonisation et de « transformation de la société ». L’AfD désire mettre un terme à la perception du gaz carbonique comme étant uniquement un polluant et empêcher les initiatives allemandes de réduction des émissions de gaz carbonique en faisant cavalier seul. Nous ne taxerons pas les émissions de CO2. Les organisations de protection du climat ne seront plus subventionnées.
Toute politique énergétique efficace doit poursuivre trois objectifs : la production d’électricité doit être sûre, peu coûteuse et respectueuse de l’environnement. Ce triple principe, qui a toujours caractérisé le système d’approvisionnement énergétique allemand, a été abandonné à l’adoption de la loi sur les énergies renouvelables (EEG). La loi sur les énergies renouvelables et la transition énergétique mettent en danger la production d’électricité.
Les éoliennes, par exemple, détruisent l’aspect de nos paysages culturels et constituent, de surcroît, un piège mortel pour les oiseaux. L’électricité d’origine éolienne ou solaire varie continuellement entre zéro et la puissance maximale. La puissance de ces producteurs d’électricité qui accusent de telles fluctuations s’élève à présent à plus de 80 gigawatts et devrait suffire à alimenter en électricité l’Allemagne entière, même pendant les pics de consommation. En réalité, ces installations productrices d’énergie renouvelable n’ont livré dans le passé qu’une fraction de leur puissance nominale, et même, certains jours quelques pour cent seulement. C’est la raison pour laquelle aucune grande centrale électrique traditionnelle ne peut être remplacée par de telles installations. De plus, ces installations nécessitent un développement important des réseaux qui augmente encore les coûts. Le nombre croissant de producteurs d’électricité accusant des fluctuations compromet de plus en plus la stabilité du réseau.
La loi sur les énergies renouvelables est un instrument d’économie planifiée et revient à abandonner l’économie sociale de marché. Les frais de subvention, qui s’élèvent maintenant à 27 milliards d’Euros chaque année, sont répercutés sur les consommateurs sous la forme du prélèvement au titre de la loi sur les énergies renouvelables. Le prix de l’électricité a déjà doublé ces dix dernières années. Au bout du compte, une gigantesque redistribution des revenus de la population et des acteurs économiques s’opère au profit de quelques bénéficiaires des subventions.
L’AfD veut mettre fin au projet de décarbonisation et annuler le « plan de protection du climat 2050 » du gouvernement fédéral.
Nous ne voulons pas mettre hors service les centrales nucléaires existantes avant la fin de leur durée d’utilisation. L’Allemagne ne pourra pas non plus renoncer à l’utilisation de centrales modernes au gaz et au charbon.
(Grundsatzprogramm / Alternative für Deutschland | Bundesparteitag in Stuttgart | 30. April bis 1. Mai 2016).
Le groupe demande donc de ne pas sortir du charbon, de ne pas continuer à promouvoir les énergies renouvelables, et de ne pas suivre les recommandations de la « Commission du charbon », qui envisage une transition vers un approvisionnement énergétique sans charbon.
Un sabordage de l’économie allemande ?
Steffen Kotré, membre du Bundestag (AfD) a reproché au gouvernement fédéral de saborder l’économie allemande en voulant abandonner le charbon. « Environ 100, 150 milliards d’euros seront pris dans la poche des citoyens sous forme d’argent des contribuables et de prix de l’électricité ». L’abandon du charbon ne permet pas de réaliser les économies de CO2 annoncées et comme il n’existe pas de substitut au charbon, l’approvisionnement en électricité ne peut être assuré.
Kotré craint donc une hausse des prix de l’électricité. De son point de vue, cela pèserait particulièrement sur les bas salaires. La sortie du charbon est « totalement inadaptée par rapport à son objectif ; elle est antisociale et dangereuse », a-t-il déclaré. « Si l’on renonce au charbon pour la production d’électricité, on risque d’assister à un recul de l’industrie et de la croissance économique ».
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Quoiqu’il en soit, aujourd’hui l’horizon s’est obscurci. L’Allemagne produit certes un tiers de son électricité grâce aux énergies renouvelables mais elle paie cette performance remarquable au prix fort, le prix de l’électricité pour les petits consommateurs ayant plus que doublé entre 2000 et 2013. Parallèlement, elle continue d’avoir largement recours au charbon pour produire son électricité et reste un des pays d’Europe les plus émetteurs en CO2 par habitant. Fermer les centrales au charbon et au lignite est un objectif qui divise la population et met en jeu la sécurité de son approvisionnement. Le développement massif des énergies renouvelables intermittentes a compromis l’équilibre du système électrique et impose la construction de milliers de kilomètres de lignes à haute tension, sur fond de forte opposition locale. Une éventuelle électrification du transport plongerait encore davantage dans la crise le secteur automobile, déjà fragilisé par les scandales successifs.
Nicolas Faure
04/05/2022