Les refus successifs de Angela Merkel, François Hollande et David Cameron d’être présents à Moscou le 9 mai 2015 pour célébrer l’anniversaire du 9 mai 1945, destiné à marquer la victoire de l’URSS sur l’Allemagne nazie et honorer les morts russes tombés dans la Grande Guerre patriotique, conjuguent l’offense délibérée à la pure bêtise.
Il s’agit d’abord d’affaiblir Vladimir Poutine dans l’esprit des citoyens russes, en laissant penser que, par la faute de sa politique en Ukraine et en Crimée, il est en train de brouiller la Russie avec toute l’Europe. Or manifestement, ce sera le contraire qui se produira. Attaquée, la Russie se resserrera autour de son gouvernement et de ses valeurs.
C’est aussi de la pure bêtise car on ne voit pas les avantages que tirera l’Europe de cette insulte à la Russie. Manifestement, à un moment où, se sentant rejetée par l’Europe, sous la pression incessante de l’Amérique, la Russie toute entière s’investit dans la construction d’un nouvel ordre international tourné vers l’Asie, cet affront ne fera qu’accélérer le mouvement.
Au plan intérieur des politiques européennes, par ailleurs, on peut penser que de plus en plus de citoyens allemands, français et britanniques reprocheront à leurs dirigeants de les enfermer dans des politiques de sanctions dont ils ressentent les inconvénients croissants. De les enfermer aussi dans des politiques qui sont confusément ressenties, au moins sur le continent proprement dit, comme la négation de siècles d’histoire au cours desquels les échanges entre l’Europe et la Russie avaient produit les résultats culturels les plus riches. Merkel et Hollande ne sortiront pas grandis de cet épisode peu glorieux.
Le plus coupable aux yeux de l’histoire sera François Hollande. On pourrait comprendre qu’Angela Merkel marque une certaine réserve à l’égard de la commémoration d’une victoire sur son pays, de la même façon que la France ne s’enthousiasme pas de la célébration par l’Europe de la bataille de Waterloo. « Right or wrong, my country ». Mais François Hollande ne peut en rien exciper de cet argument. Il se comporte simplement en cette affaire du 9 mai comme le petit porte-serviette de Barack Obama et de John Kerry.
On peut penser que Charles De Gaulle n’aurait rien fait de la sorte. Quant aux morts de l’escadron de chasse 2/30 Normandie Niemen, tombés sur le front russe, une nouvelle fois leur mémoire ne sera pas évoquée
Jean Paul Baquiast
Source : Europe solidaire
15/03/2015